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Adoption de la loi sur le droit des étrangers: le réseau des enseignants du primaire en résistance appelle à refuser la transmission de données aux autorités

Paru dans Scolaire le dimanche 26 juillet 2015.

Le projet de loi relatif au droit des étrangers en France a été adopté en première lecture, après engagement d'une procédure accélérée, ce jeudi 23 juillet 2015 en fin de journée par l'Assemblée nationale. Cette loi introduit dans son article 25 une disposition qui autorise les préfets à demander des informations auprès de plusieurs organismes et administrations, dont les établissements scolaires et les établissements d’enseignement supérieur, dans le cadre de "l'instruction d’une première demande de titre de séjour, à une demande de renouvellement de titre ou au contrôle du maintien du droit au séjour". Déjà en campagne depuis début juillet contre le projet de texte, le réseau des enseignants du primaire en résistance (ici) déclare qu'il appellera les enseignants "à refuser en masse de communiquer des données aux autorités", comme le rapporte Annie Biancarelli, l'une de ses membres. Celle-ci indique que les membres du réseau seront de leur côté "prêts à risquer sanctions financières, blâmes, commissions de disciplines et jusqu'à [leur] place".

Le réseau, "en sommeil depuis 2012", avait été réactivé après prise de connaissance de cette nouvelle disposition introduite par un amendement adopté le 30 juin dernier. Réunis à Saint-Étienne entre le 4 et le 8 juillet, les membres avant lancé un appel en ligne, "Nous, enseignants du primaire en résistance, refusons de dénoncer nos élèves sans papiers" et une campagne auprès des députés dès le 10 juillet, par le biais de ses 85 membres "référents", pour appeler les élus à voter contre le texte. Une cinquantaine de lettres auraient été envoyées, selon Annie Biancarelli. Si aujourd'hui, précise-t-elle encore, "les modalités des actions à venir ne sont pas finalisées, le réseau n'exclut pas d'écrire aux préfets, aux inspecteurs d'académie ainsi qu'au président de la République".

Un "droit de communication" "sans que s'y oppose le secret professionnel autre que le secret médical"

La loi précise que ce "droit de communication" ainsi institué "s'exerce sur demande de l'autorité administrative compétente, de manière ponctuelle et à titre gratuit, quel que soit le support utilisé pour la conservation des documents" et "sans que s'y oppose le secret professionnel autre que le secret médical". Elle précise aussi que l'administration peut y avoir recours afin de contrôler "la sincérité et (...) l'exactitude des déclarations souscrites" ou "l'authenticité des pièces produites en vue de l'attribution d'un droit au séjour ou de sa vérification".

"Il est hors de question de donner des renseignements sauf dans le cas de l'intérêt supérieur de l'enfant, donc s'il est en danger. Ce n'est pas notre rôle", s'insurge l'enseignante de maternelle. "Notre rôle est de faire en sorte que tous les enfants, quelles que soient leurs situations, puissent bénéficier d'une protection et d'un cadre serein qui les mettent dans de bonnes conditions d'apprentissage et leur permettent de devenir des citoyens libres. Si les parents ne peuvent plus faire confiance à l'enseignant et à l'école à qui ils donnent des informations en toute confiance, à terme ils ne mettront pas leurs enfants à l'école alors que c'est un droit garanti par la convention internationale des droits de l'enfant."

Elle affirme également que "dans la première mouture passée en commission, le texte prévoyait de donner autorisation aux autorités de se servir directement dans les bases de données des administrations, donc directement dans 'Base-élèves'". "De toute façon", regrette-t-elle, "le recteur y aura accès et pourra donc les donner à l'insu des enseignants, ce qui est scandaleux!"

La mise en place de "Base élèves" était l'un des motifs de contestation qui avaient donné naissance au réseau en 2008, tout comme le refus de mettre en place les évaluations nationales. Réactivé quelques semaines avant le vote de ce texte, le réseau, qui aurait rassemblé selon Annie Biancarelli quelque 3000 enseignants, avait déjà appelé à la désobéissance civile en 2008.

Camille Pons

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