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Bac 2015: maths, français, physique, les modifications de barèmes camoufleraient l'échec de la réforme du lycée

Paru dans Scolaire, Orientation le samedi 04 juillet 2015.

Les modifications de barèmes dans plusieurs disciplines du bac, effectuées alors que les corrections étaient déjà en cours, ont suscité la colère des enseignants et de plusieurs syndicats, à tel point que le SNAL-FGAF a même proposé un "palmarès" afin de classer les événements des plus aux moins "catastrophiques". Ces sont les modifications du barème du bac de sciences physiques dans la filière S qui ont fait le plus de "bruit" -"médaille d'or" du SNALC-FGAF-, modification intervenue "afin de bonifier les questions simples et d'éviter une catastrophe sur les questions de réflexion jugées a posteriori trop difficiles". Ce même syndicat décerne une "médaille d'argent" à la modification du barème de commentaire de texte du bac Français intervenue en filières S et ES au constat que des élèves avaient composé "à partir du mauvais texte". Au-delà des critiques relatives aux conditions de correction imposées aux enseignants, ou encore de critiques de "formes" -des questions "sans doute mal pensées en amont" en physique-chimie, juge par exemple le SNALC-FGAF-, ces événements sont surtout révélateurs de "mauvaises" réformes ou politiques adoptées en direction du lycée et en matière d'évaluation depuis quelques années.

Le SNFOLC (Syndicat national force ouvrière des lycées et collèges) estime que surévaluer les copies permet au ministère de "masquer le triste bilan de la réforme du lycée sur le niveau scientifique [des] élèves". Or cette réforme qui "se traduit dans toutes les disciplines par une baisse des horaires disciplinaires" dont 1h30 en physique-chimie, est responsable de "la dégradation spectaculaire du niveau".

Les enseignants de physique-chimie vont dans le même sens en mettant en cause le programme mis en place depuis trois ans. Dans une lettre ouverte adressée à l'inspection générale le 29 juin, l'Union des professeurs de physique et de chimie (UDPPC), exprime sa "colère contre une hiérarchie dans le déni, incapable, malgré des avertissements répétés remontant de la base depuis la mise en place du nouveau programme en série scientifique, d’estimer et de comprendre le fossé abyssal qui s’est creusé entre les attentes du programme et le niveau moyen des élèves sortant de terminale S". Impossible désormais, "après trois années de mise en œuvre de ce programme, [de] rejeter la faute sur des enseignants qui l'auraient mal compris".

L'IGEN justifie programme et épreuve mais appelle "à tirer des leçons"

Si la réponse de l'IGEN, reçue par l'UdPPC le 3 juillet, vise à rassurer les enseignants sur cette possible accusation, elle défend en revanche le principe de ces programmes "fondamentalement transformés par rapport aux précédents, écrits par compétences, avec une place plus réduite de la modélisation mobilisant les mathématiques" parce qu'ils doivent répondre à certaines "exigences", notamment celles de développer la "vocation pour la science" et de "préparer à des études scientifiques post-baccalauréat". "Ambitions" qui justifient du même coup, écrit encore l'inspection générale, des épreuves amenant les élèves à mobiliser "une grande diversité de connaissances et de compétences attestant du niveau de maîtrise de la démarche et du raisonnement scientifiques".

Si l'IGEN prend acte des difficultés rencontrées durant l'examen par les élèves et appelle, elle aussi, "à tirer des leçons pour l'avenir", sa principale recommandation est destinée aux équipes de concepteurs des sujets de baccalauréat: ceux-ci devront trouver, estime-t-elle, "le juste équilibre qui permette à chaque élève, se destinant ou non à des études scientifiques, d'attester de la qualité de son investissement au cours des deux années et de son niveau de maîtrise des compétences exigibles". En déclarant vouloir par ailleurs poursuivre ses efforts, en lien avec les IA-IPR, en faveur de l'accompagnement pédagogique des enseignants (production et mises en ligne de ressources notamment), c'est en matière de préparation et de formation de ces derniers qu'elle affirme donc vouloir mettre l'accent et non du côté des programmes ou des élèves. L'IGEN annonce ainsi dans son courrier que la formation en filière S comme l'évaluation terminale au baccalauréat feront l'objet de nouvelles rencontres avec les professeurs, et invite également à une rencontre avec les responsables de l'UdPPC sur ce sujet.

Quant au SNALC-FGAF, il dénonce au travers de ces opérations une atteinte progressive à la notion de mérite, "en rien récompensée aux examens nationaux", "pire (…) même plus reconnue" et directement responsable de sa disparition dans le milieu du travail. "On met ici le doigt sur ce qui gangrène l'école depuis fort longtemps", accuse le syndicat. "On ment aux élèves quant à leur niveau en manipulant les barèmes. Cela pénalise les élèves sérieux, à qui l'on montre que travailler, c'est franchement inutile. Cela pénalise aussi à long terme les élèves moins consciencieux: on leur dit en substance qu'ils ont bien raison de ne pas trop se forcer."

Camille Pons

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