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Gérard Larcher (pr du Sénat) donne sa vision de l'Ecole au service du renforcement de l'appartenance républicaine

Paru dans Scolaire, Périscolaire le mercredi 15 avril 2015.

Le président du Sénat, comme son homologue de l'Assemblée nationale, a remis ce matin son rapport au président de la République qui lui avait demandé  de réfléchir au "renforcement de l’appartenance républicaine" et de formuler "une série de propositions susceptibles de raffermir le lien civique au sein de la nation", dans le prolongement de l'émotion suscitée par les attentats du début de l'année. Les médias généralistes mettront sans doute l'accent sur ses propositions relatives aux flux migratoires. Un certain nombre des analyses de Gérard Larcher concernent toutefois l'Ecole et le service civique. En voici l'essentiel.

"L’école se met au service de l’émergence d'un citoyen français rationnel s’affranchissant de sa communauté. Il faut, comme le dit Alain Finkielkraut, que 'les élèves puissent oublier leur communauté d’origine et penser à autre chose qu’à ce qu’ils sont pour pouvoir penser par eux-mêmes'. (...) Mais depuis près de quarante ans (...), divers pédagogues ont fait de la spontanéité de l’enfant la condition nécessaire de l’apprentissage. Les pédagogies constructivistes, d'après lesquelles c'est l'enfant qui construit lui-même son savoir, ont pris le pouvoir dans l'enseignement (...)".

La primauté des savoirs et le "pédagogisme"

L’école est "une institution qui élève les enfants à la dignité de citoyens français capables d’exercer leur propre libre arbitre". Cette ambition suppose "de faire respecter certaines conditions, à commencer par l’autorité du maître qui transmet à l’élève et la primauté des savoirs sur tout 'pédagogisme' qui réduirait l’éducation à des techniques d’apprentissage (...)"

Les enseignants "doivent être soutenus sans réserve (...) lorsqu’ils sont confrontés à des manifestations d’opinions ou des comportements contraires aux valeurs républicaines, ou à la contestation idéologique ou religieuse du savoir transmis". Il incombe aux autorités académiques "de rappeler, en cas de transgressions répétées des enfants aux principes de la République, la responsabilité première des parents dans leur rôle d’éducateur (...) Ce rappel doit éviter le double écueil de l’angélisme incantatoire ou, à l’opposé, de la pénalisation 'en trompe l’œil', polémique et jamais réellement appliquée. Il doit être graduel et progressif. Mais, in fine, il peut reposer (...) sur (...) la suspension de l’aide financière apportée par la solidarité nationale (....)".

Une plus grande autonomie pour les établissements scolaires

"A cette présence forte de l’institution scolaire, là où elle est indispensable (la restauration de l’autorité, la fixation des objectifs du système scolaire et la définition des programmes, la collation des diplômes), doit répondre une plus grande autonomie pour chaque établissement scolaire dans l’organisation de l’enseignement, à proprement parler. La liberté pédagogique et l’autonomie administrative, en même temps que la dévolution des moyens correspondant et la gestion des ressources humaines doivent être transférées aux établissements scolaires. A charge pour eux de rendre compte des résultats qu’ils obtiennent (...) Dans le second degré, le chef d’établissement doit pouvoir donner un avis sur les enseignants qui envisagent de rejoindre un établissement scolaire, voire dans certains cas, choisir le profil adapté au projet et à l’environnement de l’établissement. Dans le premier degré (...) il est urgent de donner aux directeurs d’école l’autorité nécessaire pour piloter les écoles primaires, qui ont vocation à devenir des établissements publics du premier degré dotés de la personnalité morale (...)".

"A côté du rétablissement de l’autorité du maître, du développement de l’autonomie des établissements, la valorisation du mérite de l’élève constitue le troisième élément pour que l’école joue à nouveau le rôle de creuset républicain (...) Avec la fin officielle des classes de niveaux, qui permettaient pourtant d’adapter le rythme de l’enseignement à la capacité des élèves, ce fut le choix des options et des classes bilangues qui a permis d’orienter son enfant (...) Partout ailleurs, le mérite scolaire, dans la mesure où il devenait 'accessible à tous' en distinguant de moins en moins les élèves dans leur parcours, n’a plus suffi (...) Les nouveaux 'héritiers', pour reprendre le mot de Bourdieu, ne sont plus les élèves que distinguait une méritocratie scolaire jugée par certains trop élitiste, mais les enfants des familles qui peuvent désormais payer des cours privés (...)"

Le "roman national", le dessein de la nation et la fierté

L’enseignement de l’histoire "doit faire l’objet d’une refonte complète permettant à chaque élève, quelle que soit sa culture d’origine, de se réapproprier le roman - le récit - national, qui repose sur l’idée que la communauté nationale est le fruit d’une construction volontaire, d’un progrès constant, d’un dessein propre à la nation française (...) Chaque élève doit pouvoir y trouver une source d’intelligence et de réflexion, d’identification et de fierté (...)"

"Il me semble non seulement possible mais nécessaire d’introduire un enseignement du 'fait religieux' comprenant notamment une approche historique de l’apparition des religions de l’Extrême-orient à l’Occident (...)"

Gérard Larcher estime encore qu'il convient de "restaurer la cohésion nationale", ce qui passe "par l’abolition de l’esprit victimaire" et de la "discrimination positive". Il considère aussi que "l’école républicaine doit retrouver le sens éducatif, moral et symbolique de la 'liturgie' républicaine et de ses rites", comme la remise des prix.

Restauration scolaire : "un peu de bon sens"

En ce qui concerne la laïcité, le président du Sénat considère que "la détermination des menus dans les restaurants scolaires ne doit pas devenir l’objet d’un débat (...) Les menus sont connus longtemps à l’avance, permettant à chaque famille de s’adapter. Ce principe n’est pas négociable et il ne saurait y avoir des menus confessionnels dans les écoles publiques. Il n’y a pas plus de 'droit', dans notre pays, à exiger des repas sans porc, qu’il ne peut y avoir de 'droit', dans un restaurant public scolaire, à manger casher, hallal ou du poisson le vendredi (...) Mais dans des classes qui accueillent des enfants de confession musulmane ou juive, la diversité alimentaire permet aujourd’hui, avec un peu de bon sens, d’éviter de soumettre régulièrement les enfants au choix entre le respect d’une tradition, peu importe d’ailleurs qu’elle soit religieuse ou culturelle, et le fait de manger à la cantine."

Quant au service civique, qui ne doit pas être "une forme d’emploi aidé", mais "un moment important à la fois d’engagement au profit de l’intérêt général et d’éducation par l’action". L'Etat "ne peut continuer à se reposer aussi largement sur les associations et doit mobiliser ses services déconcentrés pour répondre à l’objectif de montée en puissance de ce dispositif. Il en va de même pour les collectivités territoriales (...)"

Le service civique obligatoire pour les futurs enseignants ?

"Le principe de réalité budgétaire ne nous permet pas, pour l’heure, d’envisager aujourd’hui un service civique obligatoire pour l’ensemble d’une classe d’âge, même si cette idée (...) constituerait un beau projet de société (...) Le fait de ne pas poser d’obligation générale n’interdit en rien d’imaginer de rendre obligatoire une forme d’engagement civique pour certaines catégories de personnes (...), en particulier pour (...) celles et ceux qui se destinent à servir l’Etat et qui s’apprêtent à devenir fonctionnaire, d’une part, et les candidats à l’acquisition de la nationalité française, d’autre part."

Le rapport, "La Nation française, un héritage en partage" est téléchargeable sur le site du Sénat, ici

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