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Les souffrances scolaires doivent être prises très au sérieux et soignées (colloque de l'AFAR)

Paru dans Scolaire le vendredi 13 mars 2015.

"L'école sera de plus en plus un lieu d'expression de la souffrance" et les personnels demanderont de plus en plus le soutien des soignants. Bertrand Lauth, pédopsychiatre français installé à Reykjavik (Islande) a ainsi conclu le colloque organisé hier 13 mars par l'AFAR (un organisme de formation dédié aux professionnels de la santé), avec pour titre "L'école du rire au larmes, soigner les souffrances scolaires". Et l'universitaire d'en tirer une conclusion pratique immédiate, il faut que les enseignants soient formés à la conduite de réunion, puisque toute collaboration passe par un positionnement clair de chacun.

Les "pathologies anxieuses" se développent en effet, souligne Nicole Catheline (pédopsychiatre, Poitiers). Elles sont toujours liées à "un cumul de choses", "un enchaînement de petites catastrophes", mais c'est "une urgence médicale", car elles "se chronicisent très vite". En même temps, les médecins ne doivent pas se précipiter sur un retour à l'école, au risque de "refermer" le dossier et de voir ressurgir quelques années plus tard le symptôme. Nicolas Girardon, autre pédopsychiatre (Fondation santé des étudiants de France) ajoute que c'est potentiellement grave et il constate que pendant très longtemps en France, on a parlé "d'échec scolaire" tandis que les Anglo-saxons, les Allemands, les Japonais parlaient déjà de "phobies scolaires", un ensemble complexe de peurs irrationnelles, de souffrances au long cours qui trouvent souvent leurs causes dans des troubles de l'identité et des difficultés familiales, mais qui sont "mal vécues par les enseignants".

Signaler au procureur les situations de harcèlement

Ces pathologies peuvent aussi être corrélées à des situations de harcèlement, et Roselyne Vénot, commandant de police détachée au rectorat de Versailles est très claire, le code pénal oblige les adultes à signaler les délits ou les situations de danger dont ils sont témoins. Un ensemble de violences répétées avec l'intention de nuire constitue un délit défini par la loi. En même temps, il ne revient pas à un enseignant ou à un éducateur de savoir si les faits sont supportables par un jeune, ou de déterminer des responsabilités. C'est au procureur de trancher. Elle ajoute que souvent les enseignants se font souvent une idée fausse des modes d'intervention des gendarmes ou des policiers, et elle leur recommande de "connaître leurs interlocuteurs" hors situation de crise, de façon à pouvoir "négocier avec eux" les moments propices à leur présence dans l'établissement lorsqu'elle devient nécessaire.

William Couturier, autre policier, estime à "3 ou 4" le nombre des suicides de jeunes, chaque année, du fait de cyber harcèlement, un délit puni de deux ans de prison. Il ajoute que souvent, les élèves ne sont pas conscients de commettre des infractions, comme cette élève de lycée professionnel qui, harcelée, crée pour se défendre et se venger une page facebook en usurpant l'identité de sa harceleuse. Et il s'inquiète. De nouveaux réseaux se mettent en place, comme Whisper ou Yik-Yak qui promettent l'anonymat, donc l'impunité, aux auteurs, actuellement déjà difficiles à identifier du fait, notamment, du coût des réquisitions. Quant à Olivier Phan, psychiatre, co-auteur de l'enquête PELLEAS sur les écrans et jeux vidéos à l'adolescence, il estime que 80 % des collégiens ont déjà joué à des jeux réputés interdits aux moins de 18 ans (selon la nomenclature PEGI), mais que "tout le monde s'en fout". En revanche, il estime qu'en l'état actuel des recherches, on peut établir une corrélation entre les addictions aux jeux et le redoublement, sans pouvoir dire où est la cause, où est l'effet...

A noter encore que Florence Delteil (neuropédiatre) plaide pour que les TSA (troubles spécifiques des apprentissages) entrent dans le champ du handicap. Les MDPH les reconnaissent comme tels, mais ils étaient largement méconnus en France au tournant du siècle. En même temps le développement des offres de bilans diagnostiques entraîne "un risque de surmédicalisation" et la ritaline, destinée à soigner les troubles déficitaires de l’attention avec hyperactivité, concernait 0,02 % de la population scolaire en 1989, est "indiquée"en 2006 pour 2,51 % d’entre eux. Plus de 7 % des garçons âgés de 7 à 15 ans sont concernés.

Les interventions seront en ligne sur le site de l'AFAR (ici) d'ici deux mois.

L'enquête PELLEAS ici

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