Sciences de l'éducation : les chercheurs ne s'adressent pas suffisamment aux acteurs de terrain (dossier de l'IFE)
Paru dans Scolaire le mardi 16 décembre 2014.
"Comment aborder scientifiquement l’éducation ?" s'interroge Marie Gaussel dans le dernier dossier de Veille et analyse de l'IFE (Institut français de l'éducation). L'auteure ajoute aussitôt une seconde question: "Comment utiliser les concepts et les méthodes originaires du champ pour alimenter les réformes et les pratiques ?"
Elle souligne d'abord que "définir une recherche scientifique de qualité en éducation, soulève de nombreux débats un peu partout dans le monde occidental". Les sciences de l'éducation apparaissent comme "trop confuses" aux yeux des décideurs politiques, d'autant qu'avec "l’avènement du mouvement 'evidence-based research' ou 'recherche basée sur la preuve' (données probantes), les débats s’intensifient et dépassent les cercles scientifiques pour rejoindre les querelles politiques". Peu ou prou, même si l'auteure ne le dit pas en ces termes, il s'agit de savoir si les questions d'éducation peuvent être traitées selon les méthodes du positivisme. Elle distingue d'ailleurs trois types de travaux scientifiques : "La recherche qualitative prend ses fondements dans le paradigme interprétatif", fait référence à la sociologie et à la philosophie pragmatique et se fonde sur des "étude de terrain, recherche naturaliste, ethnographique, phénoménologique, herméneutique, qui requièrent différentes techniques de collecte et d’analyse de données". "La recherche quantitative (positivisme, post-positivisme) utilise des mesures de comptage, des échantillonnages, des statistiques ou des données standardisées (...)". "La recherche-développement (ou recherche-action) est une stratégie de recherche qualitative qui vise (...) à mettre au point une intervention nouvelle (...)" ou encore à élaborer une méthode de mesure.
Pour ajouter à la confusion, en France, la recherche en éducation "est marquée par la coexistence de différents organismes (...) parfois fortement imbriqués les uns dans les autres". La difficulté "consiste à rendre plus visibles les travaux de recherche", ce à quoi travaille le service Veille & Analyses de l’IFÉ, alors que "la dissémination des résultats de la recherche est rarement organisée officiellement par les institutions", que les revues émanant des laboratoires de recherche "sont souvent méconnues et peu visibles", et que "la communauté des chercheurs en éducation s’adresse rarement à la société ou même aux acteurs de l’éducation de façon organisée et collective".
Ce dossier (n° 97, décembre 2014), "Production et valorisation des savoirs scientifiques sur l’éducation" (Marie Gaussel, IFE-ENS Lyon) est téléchargeable sur le site de l'IFE, ici.