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Salon de l’Éducation : On peut empiler les réformes... mais il faut d'abord changer les cultures (Louise Tourret)

Paru dans Scolaire le samedi 29 novembre 2014.

"Les devoirs écrits à la maison sont interdits depuis 1956 [circulaire du 29 décembre 1956, en application de l'arrêté du 23 novembre 1956, relative à la suppression des devoirs à la maison, ndlr]. La culture est donc plus forte que les réformes. Réfléchissons à cela. On peut empiler les réformes, certes. Mais sensibilisons plutôt, formons les enseignants, parlons ensemble..." C'est l'une des recommandations qu'a faites Louise Tourret, productrice de l'émission "Rue des écoles" (France Culture), ce jeudi 27 novembre 2014 alors qu'elle intervenait en introduction de la rencontre nationale organisée par la Ligue de l'enseignement sur le thème "Refondation de l’École: deux ans... Et après?". Cette rencontre s'est déroulée sur deux jours dans le cadre de la 16e édition du salon européen de l'éducation qui se tient à Paris jusqu'au 30 novembre.

Globalement, explique-t-elle, il faut "interroger notre culture de l’École, ce qui fait que l’École a été une grande institution et ce qui empêche aujourd'hui sa réforme". Pour mieux changer cette culture scolaire, selon elle, il faut déjà réfléchir à la façon de "créer des consensus autour des réformes et pas des consensus d'experts".

Former les enseignants à lire par exemple les revues scientifiques pour les amener à innover

Les changements attendus en matière d'évaluation passent également, selon elle, par "un travail d'acculturation scolaire pour changer notre relation à la note", car "il ne suffit pas de décréter d'en haut pour supprimer les notes". Celle-ci rappelle que déjà "en 67, on préconisait de mettre des lettres plutôt que des notes". Même problématique pour l'innovation "qui doit être au cœur de la refondation", comme le préconise notamment le rapport de Didier Lapeyronie remis à la ministre le 10 novembre dernier. "On ne peut pas dire 'innovez'! C'est encore une question de culture", estime-t-elle. "Par exemplen comment a-t-on été formé à lire les revues scientifiques sur la pédagogie ?".

Les injonctions données pour encourager l'innovation se heurtent par ailleurs à un double discours, poursuit-elle: d'un côté "oui, il faut de l'innovation", d'un autre côté "les enseignants innovants sont confrontés à des difficultés importantes quand ils enseignent différemment dans leur établissement". Les réseaux sociaux via lesquels ils échangent constituent une "ressource non négligeable qui peut aussi permettre de changer la culture" en introduisant ce principe de "relations entre pairs et horizontalisées", estime-t-elle. Enfin, dans le même ordre d'idées, changer les relations aux parents doit "se penser évidemment dans la formation des enseignants".

Des points "aveugles" dans la réforme

Au-delà du nécessaire travail sur la culture, la journaliste a soulevé quelques points susceptibles de faire obstacle à mise en œuvre complète de la réforme. Elle estime notamment que le sujet de la mixité sociale "devrait être au cœur de la refondation", constat étant qu'aujourd'hui "l'évitement scolaire continue d'augmenter et, surtout, il se banalise". Un phénomène auquel il faut prendre garde "car on touche au cœur même de l’École publique, de l’École de tous." Ellei évoque les systèmes qui ont permis de maintenir en certains endroits cette mixité, comme le maintien d'options musique ou Grec. Pour elle, il est nécessaire de "trouver d'autres dispositifs sans nécessairement plus de moyens". De la même manière elle évoque le "point aveugle" que constituent les écoles privées qui n'ont pas été engagées dans la refondation.

Enfin, d'autres obstacles sont aussi à prendre en compte, parmi lesquels "les questions d'agendas politiques et médiatiques". "Quand un nouveau ministre arrive, même s'il dit qu'il va continuer l’œuvre du précédent, il est impossible qu'il ait les mêmes axes de communication", souligne-t-elle. "Nous avons d'ailleurs une ministre qui se dit ministre des parents, c'est le nouvel axe."

Camille Pons

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