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Les ressources pédagogiques ne sont pas adaptées aux pratiques enseignantes (dossier de l'IFÉ)

Paru dans Scolaire le mercredi 19 novembre 2014.

De quelles ressources pédagogiques disposent les enseignants ? C'est le sujet du "dossier" de l'IFE (l'Institut français de l’Éducation) de ce mois de novembre 2014. Faire que les données et les moteurs soient personnalisables pour développer chez les enseignants les utilisations des portails en ligne, inventer des dispositifs permettant de regrouper les ressources pour une gestion moins complexe, mettre en place des formations pour apprendre aux enseignants à critiquer et à créer de nouvelles ressources..., c'est ce que suggère cette revue de la littérature scientifique pour faire évoluer les ressources et les mettre au service de nouvelles approches pédagogiques.

Une partie du dossier se penche sur la question incontournable de l'intégration du numérique dans les pratiques. Au-delà de constats assez connus -utilisation "assez fréquente" des outils numériques pour la recherche d’informations mais peu en classe-, l'auteure, Catherine Reverdy, fait part d'observations moins répandues sur les "effets [de ces utilisations] sur l’engagement des enseignants dans leurs activités", donc sur leur motivation.

Des données et moteurs de recherche personnalisables pour inciter à exploiter les ressources en ligne

Le dossier évoque d'ailleurs des pistes pour favoriser l'intégration des ressources numériques dans les pratiques. Pour les élèves, elle "semble être (...) facilitée par la personnalisation de leur environnement de travail". Dès lors, pourquoi ne pas imaginer aussi pour les enseignants un dispositif qui les regrouperait ? Cette proposition se heurte toutefois à une limite soulignée dans les différents rapports publiés sur le sujet : les ENT (environnement numériques de travail), "servent essentiellement à la gestion administrative et non comme tremplin pour les innovations pédagogiques".

L'auteure cite aussi plusieurs chercheurs qui, face à la sous-exploitation des portails de ressources en ligne par les enseignants, suggèrent que "les métadonnées de ces ressources et les moteurs de recherche associés soient enrichis et personnalisables pour chaque enseignant". "Ces portails devraient également prendre en compte les aspects pédagogiques, ce qui est encore trop peu le cas, à savoir l’utilisation éventuelle par les élèves et les différentes contraintes éducatives pesant sur les enseignants".

Apprendre à mobiliser plusieurs ressources et à les utiliser de différentes manières

Catherine Reverdy s'intéresse aussi aux analyses et retours d'observations concernant les programmes et manuels, qui, contre toute attente, ne sont pas toujours perçus et utilisés comme ressources principales. Concernant les programmes, des études menées en 2008 montrent qu'ils sont parfois considérés comme la "norme à transgresser". Quant aux manuels, la littérature montre que les enseignants s'appuient d'autant plus sur eux "qu'ils ne sont pas sûrs de leurs connaissances", et que, dans ce cas, le manuel remplit "essentiellement des fonctions de formation"... des enseignants, qui d'ailleurs manquent de temps pour rester informés des avancées pédagogiques et didactiques.

Nombre de chercheurs défendent d'ailleurs l'idée de favoriser le développement de "la compétence de l'enseignant à considérer et mobiliser les ressources existantes dans le but de façonner les séquences pédagogiques". Le dossier cite deux moyens pour ce faire: mettre en place une formation continue pour que les enseignants sachent "tester différentes manières d'utiliser les mêmes ressources", et s'attaquer aux ressources institutionnelles elles-mêmes qui doivent être conçues de manière à "inclure des contenus susceptibles de développer les connaissances des enseignants" ou encore de manière à les aider "à anticiper les réactions des élèves, développer leurs connaissances didactiques, adopter une perspective globale sur l’année". D'autres préconisent une formation initiale à la critique et à l’adaptation de ressources existantes pour "permettre aux enseignants débutants d'être plus efficaces dès le début de leur enseignement".

Des manuels actuels qui contribuent à renforcer les inégalités d'apprentissage 

Quant aux manuels scolaires, la comparaison de ceux des années 50 et ceux d'aujourd'hui nous apprend que ces derniers sont "plus exigeants qu’avant sur la construction du savoir par les élèves" et qu'ils contribuent "à augmenter les inégalités d’apprentissage". Parce que "présentant un savoir complexe", "morcelé sur plusieurs pages dans des représentations de nature diverse, les concepteurs de manuels attendent que l’élève mobilise certaines dispositions supposées, réalise des sauts cognitifs pour s’approprier ces savoirs, mais sans cadrage." Toutefois, une équipe réunissant universitaires et enseignants a travaillé en 2006 à la conception de manuels de mathématiques qui "invitent les élèves à pratiquer l’auto-évaluation, à utiliser différentes approches pour un même problème, à voir quelles stratégies ils pourraient aborder dans leur apprentissage, à prendre en compte leurs émotions." 

Le dossier fait aussi référence aux pratiques de mutualisation et de travail collaboratif, dont certaines ont abouti à la création de manuels (comme Sésamath). Des expériences intéressantes, mais qui pourraient se heurter aux mêmes problématiques que pose l'accès aux ressources éducatives libres: comment garantir la qualité de ces ressources et la liberté de choix si l'on introduit "une validation quelconque par les autorités éducatives". L'auteure rappelle d'ailleurs que les manuels produits par Sésamath, "n'ont pas été tout de suite officiellement reconnus et appréciés par l’institution et par les éditeurs, voire qu[ils] ont été fortement déconseillés".

Enfin, si le dossier conclut au besoin de formation "au niveau de l’accessibilité des ressources, de leur prise en main, de la gestion de leur hétérogénéité", il souligne la nécessité de prendre en compte "l’engagement de l’enseignant", visible notamment au travers des collectifs d'enseignants, "dans une perspective de développement professionnel collectif". À ce titre, estime Catherine Reverdy, "les formations proposant à un groupe d’enseignants à la fois de critiquer et de créer des ressources semblent les plus prometteuses".

L'intégralité du dossier ici

Camille Pons

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