Recherches et publications

Génération 2010 : des jeunes plus optimistes, un rapport au travail plus genré et peut-être plus instrumental (CEREQ)

Paru dans Orientation le lundi 26 décembre 2022.

“Les jeunes arrivés sur le marché du travail en 2010 témoignent globalement d’une forme certaine d’optimisme par rapport à l’avenir -qui va même en croissant à mesure que les années passent“, constate le CEREQ dans une étude sur la place du travail dans l'existence des jeunes entre 2010 et 2017 publiée vendredi 23 décembre.

Pour tenter de savoir si les jeunes générations, face à des modalités d’insertion dans l'emploi “plus incertaines et brouillées“, donc un moindre accès à l’emploi stable, font face à une reconfiguration profonde de la place et du rapport à l’emploi, Estelle Bonnet, Zora Mazari et Elise Verley distinguent quatre catégories de jeunes qui se situent, 7 ans après leurs débuts dans la vie active, entre “satisfaction et résignation“.

Cette classification laisse apparaitre des jeunes “rarement en état d’impasse ou de renoncement total, quelle que soit leur situation professionnelle“, et pour qui “même dans les situations de vulnérabilités exacerbées, l’optimisme reste dominant, et la résignation est loin d’être systématique“. L'étude du CEREQ montre en effet que 98 % des “serein.es engagé.es“ sont optimistes concernant leur emploi en 2017 (versus 99 % en 2013), les arrivé.es le sont à 80 % (vs 83 %), les désabusé.es persévérant.es à 87 % en 2017 (contre 80 %) et les insatisfait.es résigné.es à 55 % (contre 32 % en 2013).

Une situation qui semble “pour le moins paradoxale“ selon les dires des sociologues, pour qui “cette apparente distance entre des conditions d’accès à l’emploi, objectivement peu favorables avec les répercussions de la crise financière de 2008, et des sentiments plutôt en décalage avec cette réalité pose question“.

Les autrices évoquent l’hypothèse “du possible développement d’un rapport plus instrumental au travail à mesure de l’avancée dans la trajectoire et surtout en âge, associée à des impératifs liés à la décohabitation, l’entrée en conjugalité, voire en parentalité“, davantage développé chez cette génération que chez leurs aînés. Ainsi ces jeunes relativiseraient l'importance du travail par rapport à d’autres champs d’implication (activités militantes ou associatives, bénévolat..), ou bien, au contraire, “cette apparente distance ne serait que le produit d’une intériorisation de la transformation des normes d’accès et d’évolution professionnelle, induisant une incertitude plus forte des devenirs professionnels“.

Autre point, les catégories à prévalence féminine priorisent majoritairement le fait de "ménager leur vie hors travail", alors que celles à prévalence masculine priorisent majoritairement le fait d’ "améliorer leur situation professionnelle‘“ déclarent les chercheuses, mettant en évidence les rapports au travail genrés chez les jeunes. Elles ajoutent à cela qu' “à mesure de l’avancée dans le parcours de vie, les rôles sociaux sexués, notamment en lien avec l’arrivée des enfants, tendraient à se réaffirmer, en particulier dans les arbitrages entre engagement dans la sphère professionnelle et dans la sphère personnelle.“

Si le rapport plus instrumental au travail reste encore difficile à étayer, pour Estelle Bonnet, Zora Mazari et Elise Verley les classes majoritairement féminines (et le plus souvent inscrites dans des configurations marquées par la conjugalité) tendent néanmoins “à être celles qui font preuve d’un plus fort désengagement du travail“. Les femmes “tendraient à mettre à distance l’emploi, en particulier au moment de l’arrivée du premier enfant, mais ce, de façon plus transitoire que par le passé et avec de moindres conséquences quant à leur participation au marché du travail“.

Finalement, ces attitudes à l’égard du travail et de l’emploi “doivent être rapportées à un jeu de positions et de dispositions inégales“, d'où en partie le titre de la note “l'inégalité des possibles“. Les jeunes y définissent différemment leurs priorités “au fil des trajectoires de vie, sous la forme d’un engagement plus ou moins marqué dans le travail (faire carrière vs investir d’autres sphères de l’existence) et d’une persévérance plus ou moins forte face aux possibilités d’amélioration de leurs conditions d’emploi (persévérer vs se résigner)“.

La note ici

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