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L'OCDE milite pour l'éducation prioritaire et l'autonomie des jeunes (document de travail)

Paru dans Petite enfance, Scolaire, Orientation le lundi 15 avril 2013.
Mots clés : OCDE, éducation prioritaire, RSA, Bouhlol, jeunesse,

"Concentrer les moyens de l’éducation sur l’école primaire et les milieux défavorisés" et "développer l’autonomie des jeunes" sont deux des recommandations faites à la France par le département des affaires économiques de l'OCDE. Si ce texte apparaît à bien des égards comme une compilation de documents connus, il n'en constitue pas moins un encouragement très net de l'organisation internationale à la "refondation" lancée par Vincent Peillon, et à une "politique jeunesse" qui pourrait aller plus loin.

C'est ainsi que son auteur, Hervé Boulhol, estime qu'une "réelle extension du RSA aux jeunes adultes réduirait l’intensité de la pauvreté". Elle devrait être progressive, par exemple 240 € à 18 ans et 475 à 25, les étudiants pour leur part continuant à être soutenus par des bourses. Mais il considère surtout que notre pays doit améliorer son système éducatif, et que "les efforts doivent porter principalement sur le primaire et l’université". Il faut revoir le calendrier scolaire, "augmenter le nombre de jours passés à l’école, diminuer le volume horaire quotidien et raccourcir les vacances scolaires", "concentrer les moyens de l’éducation nationale, et en particulier de l’éducation prioritaire, à un âge précoce – écoles élémentaire et maternelle voire toute petite enfance" puisque "les mesures ciblées sur la prime enfance dans les milieux défavorisés (...) sont très rentables économiquement et réduisent les inégalités".

Education prioritaire et salaire des enseignants

Une meilleure allocation des moyens disponibles passe par "la suppression de nombreuses options disciplinaires dans l’enseignement secondaire, qui sont coûteuses et tendent à accroître les inégalités en tant que vecteur d’une sélection précoce déguisée". Quant aux "résultats décevants de la politique d’éducation prioritaire, [ils] ne doivent pas surprendre compte tenu de la faiblesse des moyens mis en œuvre (...), les expériences convaincantes à l’étranger s’appuient sur des moyens beaucoup plus importants, d’au moins 12 000 euros par enfant, soit environ le double des dépenses actuelles en France." Mais cela pose la question de l'efficacité de la politique de la Ville qui "n’a pas permis de réduire les difficultés de ces quartiers" : "Il n’est pas prouvé que le fait de cibler les politiques sociales sur des territoires plutôt que directement sur les personnes soit efficace."

L'auteur plaide aussi pour une revalorisation du salaire des enseignants, qui est, en France, "égal à 77 % du salaire d’un diplômé du supérieur en moyenne contre 86 % en moyenne pour les pays de l’OCDE", pour que les directeurs d'école aient "plus d’autorité" et qu'ils soient mieux formés, et pour que les parents soient davantage impliqués. "Les écoles de l’éducation prioritaire doivent redoubler d’efforts pour nouer des liens avec les parents les moins impliqués."

Il s'intéresse à la formation initiale des enseignants qui "reste trop académique, n’est pas assez tournée vers l’apprentissage de méthodes pédagogiques, et valorise peu les capacités non-cognitives des enfants, qui sont pourtant essentielles à leur réussite" et il s'inquiète de la persistance d'un modèle de formation "consécutif", d'abord les formations disciplinaires puis la formation professionnelle, alors que mieux vaudrait leur alternance. Quant à la formation continue, elle est "insuffisante et mal ciblée sur les besoins réels".

Notation, redoublement, orientation...

L'OCDE estime que nous accordons "trop tôt une place importante à la notation, une pratique potentiellement anxiogène, notamment pour les élèves en difficulté qui peuvent développer une peur puis un rejet de l’école", et que "la pratique intensive du redoublement est à la fois inefficace et coûteuse". Mais "les dispositifs visant à prendre en compte les difficultés des élèves de façon plus individualisée (...) sont mal articulés entre eux". 

En termes d'orientation, l'organisation internationale souligne que "nombre de collégiens, notamment dans les milieux défavorisés, n’ont qu’une vague idée des trajectoires offertes par les différentes formations" et elle plaide pour une seconde de transition dans "les voies technologique ou professionnelle" comme dans la voie générale. Elle plaide aussi pour une réforme des fonctions des CO-Psy, "en séparant nettement les fonctions spécifiques d’orientation (...) des fonctions psychosociales". L'OCDE dresse de plus un tableau contrasté de notre système d'apprentissage : "malgré des aides substantielles, de nombreux jeunes ne trouvent pas d’entreprises pour leur contrat d’alternance", et elle ajoute qu'il est "désormais bien établi qu’en France la population d’origine étrangère est victime de fortes discriminations de la part des employeurs et que les jeunes sont particulièrement touchés". L'existence de missions locales constitue une atout, mais "de nombreux défauts de coordination minent la cohérence et l’efficacité du système". 

La lutte contre le décrochage supposerait une meilleure coordination entre le SPE (service public de l'emploi) et la MGI (mission générale d’insertion) de l’Education nationale : "la MGI semble peu efficace, ne prenant en charge qu’à peine la moitié des sortants sans diplôme alors qu’environ la moitié des jeunes en contact avec les missions locales sont accueillis pour la première fois plus d’un an après la sortie du système scolaire et un sur cinq plus de trois ans après".

Le document, d'une cinquantaine de pages (en français) est téléchargeable ici.

Voici l'essentiel des recommandations de l'OCDE "pour améliorer la situation des jeunes"

 I - Concentrer les moyens de l’éducation sur l’école primaire et les milieux défavorisés

- Réallouer substantiellement les dépenses d’éducation du secondaire vers le primaire (...)

- Consacrer le surcroît de dépenses publiques allouées à l’éducation [les 60 000 postes, ndlr] à rendre l’éducation prioritaire réellement prioritaire (...)

- Développer l’autonomie des écoles primaires et de leurs directeurs (...)

- Améliorer la formation des enseignants en mettant l’accent sur les pratiques pédagogiques

- Réduire drastiquement et rapidement le recours au redoublement

- Réformer les fonctions et mieux contrôler l’activité des conseillers d’orientation-psychologues (...) Introduire une première année de tronc commun dans le deuxième cycle des voies technologique et professionnelle (...) 

II - Améliorer l’équité et l’efficacité de l’enseignement supérieu r

- Réduire la segmentation de l’éducation supérieure en rééquilibrant le financement public des différents établissements en faveur des universités (...)

- Amplifier l’autonomie des universités (...) Augmenter les droits d'inscription (...)

III - Développer l’autonomie des jeunes et augmenter l’emploi des jeunes

- Faciliter l’accès des jeunes au logement social en élargissant l’offre de petits logements

- Etendre le RSA aux jeunes adultes (...) Éliminer en particulier le rattachement au foyer fiscal des enfants majeurs (...)

- Réduire le salaire minimum relativement au salaire moyen et réduire la dualité du marché du travail.

- (...) Mieux coordonner voire rapprocher les deux voies – scolaire et alternance – de l’enseignement professionnel. Évaluer la performance des centres de formations des apprentis (...).

- Améliorer la coordination entre les nombreux acteurs de l’insertion professionnelle (...)

- Envisager d’étendre le dispositif des Écoles de la deuxième chance en fonction des résultats de l’évaluation gouvernementale en cours.

III. Rationaliser les politiques de zonage

- Mettre à plat la géographie prioritaire en rendant le(s) zonage(s) de la politique de la ville plus lisible(s) et en assurant sa cohérence avec celui de l’éducation prioritaire. Une réforme plus radicale (...) pourrait consister à remplacer les politiques axées directement sur les territoires par des politiques d’allocations de ressources basées sur les caractéristiques des individus (...)."

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