De situations en observations, les vagabondages d'une éducatrice pour réfléchir la pédagogie (ouvrage)
Paru dans Petite enfance, Scolaire le dimanche 02 janvier 2022.
“Tout comme de bonnes conditions d'apprentissage ou d'enseignement éliminent la peur, l'appréhension de ne pas comprendre et le mal de ventre qui l'accompagne, les connaissances bien présentées se transmettent, s'assimilent et se goutent plaisamment“, considère Bernadette Moussy dans son dernier ouvrage.
Pour l'éducatrice de jeunes enfants, la pédagogie, discipline entre art et science composée de méthodes, d'organisation, de projets, ou encore de planifications, “n'est-elle pas souvent une succession de réajustements et d'adaptations à l'autre afin que celui-ci à son tour s'ouvre à la connaissance ?“
Est ici proposé par l'auteure un “autre itinéraire“ comme elle le nomme, sorte de vagabondage, et même un “essai de partage“ construit à partir de situations réelles tirées de ses observations d'éducatrice, d'expériences de formatrice et d'enseignante.
Il s'agit dans cet ouvrage, pour la psychologue clinicienne et psychothérapeute, co-préfacière, Sevim Riedinger d'une “expérience originale qui nous amène à rencontrer la pédagogie au cœur même de la vie quotidienne“, d'un livre qui se place au niveau de l'esprit d'enfance, “cette puissance créative et poétique qui souffle en chacun de nous. Rouvrir l'accès à cet espace resté intact au creux de nous-même en est le propos passionnant.“
Si une seule phrase bien choisie est plus utile que de beaux discours, comme l'affirme Jean-Jacques Rousseau dans L'Emile ou l'éducation, Bernadette Moussy estime que “nous avons tellement tendance à répéter nos directives, comme si nous voulions que ‘ça rentre‘ ou que nous voulions nous en convaincre nous-mêmes. Ne s'agit-il pas plutôt de faire surgir de l'enfant un élan vers le mieux ?“
L'auteure relate son intérêt pour la pédagogie, évoque ses manies de formatrice, mais pense avant tout, que “la pédagogie se révèle, dans sa dimension formelle, là où on ne l'attend pas“. Et d'évoquer des confrontations constructives d'où “des lumières surgissent“, car sortir ou éviter la souffrance du rapport de force entre adultes et enfants lui “paraît être la fonction de la pédagogie.“
Une “humilité“ et une “douceur de conteuse“ qui saisit l'ancien directeur de La revue de la petite enfance Jacques Kühni (autre préfacier), pour qui Bernadette Moussy a choisi la gentillesse contre la brutalité pédagogique. Mais, ajoute-t-il, chez l'éducatrice “pas question d'entonner les trompettes des politiques qui confondent allègrement pédagogie et fabrique du consentement.“ Et de préciser que “Nous savons bien que le savoir c'est le pouvoir. La question pédagogique qui domine, c'est de trouver des pratiques qui contiennent les abus de pouvoir et qui relativisent les abus de savoir.“
Flânerie pédagogique, Bernadette Moussy, Chronique Sociale Editions, 176p., 10,90€