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Protection de l'enfance : il faudra tirer les enseignements, positifs ou négatifs, du confinement d'enfants en difficulté (ONPE)

Paru dans Petite enfance, Scolaire, Périscolaire, Justice le mardi 12 mai 2020.

"Il faudra, après la crise, réinterroger les modes de prise en charge en protection de l’enfance, qui apparaissent morcelés, peut-être trop intenses, et retravailler leur meilleure adéquation aux besoins fondamentaux des enfants." C'est l'un des enseignements du premier bilan d'observations sur la gestion du confinement, publié par l'ONPE (Observatoire national de la protection de l'enfance). Ce document fait état des retours d'expériences de 14 directeurs départementaux des services enfance - famille et certains sont étonnamment positifs, voire paradoxaux.

C'est ainsi que certains enfants placés semblent aller mieux. "Plusieurs départements font état de retours d’assistants familiaux et de directeurs d’établissements qui témoignent d’enfants plus apaisés sur le plan affectif, n’étant plus ballotés d’un endroit à l’autre et vivant à leur rythme dans un contexte protégé." Ils "se posent, sont plus disponibles pour un travail de type psychique et éducatif, en étant moins parasités par les questions scolaires". La situation de confinement crée une stabilité "favorable aux enfants ayant des troubles de l’attachement" ce qui amène certains professionnels à s'interroger sur la nécessité de "penser différemment les projets des enfants", avec des prises en charges "plus simples et moins morcelées, avec un seul référent".

Autre point positif, cette situation de crise a favorisé "l’émergence de nouvelles dynamiques à la faveur du travail à distance par téléphone ou visio-conférence". Certaines familles semblent investir "plus facilement le lien avec les éducateurs par ce biais" et le confinement a "mis en lumière des compétences inattendues chez certains parents dont l’investissement, éducatif et parfois matériel, est perceptible notamment pour assurer une continuité pédagogique auprès de leurs enfants". Il est vrai que "les retours chez leurs parents d’enfants confiés semblent avoir été limités (...) aux situations d’assistance éducative dans lesquelles existaient des droits de visite et d’hébergement se déroulant dans de bonnes conditions". Toujours est-il que ces retours ne se déroulent "pas mal", même si "l’évolution dans la durée de ces appréciations doit être suivie", d'autant que les éléments d'information parviennent aux professionnels principalement par des communications téléphoniques avec les familles. Il faudra "faire un bilan plus approfondi" de l'évolution des enfants au cours de cette période et recueillir leur parole. "Des interrogations s’expriment quant aux limites des contacts téléphoniques pour apprécier la situation des enfants, notamment des plus jeunes (...). Une minorité de professionnels commence à faire des visio avec les enfants." Et "l’hypothèse de dynamiques positives concernant certaines familles ne doit pas occulter la grande préoccupation de l’ensemble des professionnels rencontrés qui sont conscients que la rupture de liens et que le manque de visibilité dans une situation de confinement peuvent favoriser le repli sur les problématiques familiales."

Certains départements s'inquiètent "de situations qui pourraient émerger en sortie de confinement". Un département note qu' "après une période relativement calme durant les trois premières semaines et demi, les effets du confinement se sont fait sentir avec, dans les familles, des explosions des parents mais aussi des enfants devenant tyranniques notamment en situation de monoparentalité". Les structures d'accueil sont très sollicitées : un département signale "une augmentation de 20 % des ordonnances de placement provisoire sur la période, dont 40 % pour des enfants de moins de trois ans", ce qui l'a obligé à mettre en place "un recrutement dérogatoire d’assistants maternels par la pouponnière". Plusieurs autres ont dû "assouplir le recrutement d’assistants familiaux, et contourner l’obligation de stage préalable de 60 heures".

Ces "premières observations" mettent aussi en évidence, même si l'ONPE se garde bien de le souligner, le sentiment de solitude des services de protection de l'enfance. "Les équipes sont confrontées à des difficultés à contenir les enfants dans les lieux d’accueil", le département "est à la recherche d’espaces privés (jardins ...) pour organiser des sorties" afin que des enfants accueillis en internats puissent prendre l’air, "mais se heurte à des refus de l’administration de l’Intérieur pour obtenir des dérogations de sortie". Une ordonnance (n° 2020-304 du 25 mars 2020" prévoit certes "une adaptation des règles procédurales mais maintient le principe d’une appréciation au cas par cas par le juge des enfants" alors que sont concernées "des milliers de situations individuelles" et qu'il est impossible "d’obtenir autant de décisions judiciaires". Par ailleurs, "il a pu être regretté le manque de soutien des Agences Régionales de Santé". "Plusieurs services d’ASE se sont heurtés, sur des demandes d’accueil de jeunes, à l’exigence d’un test Covid-19 à l’entrée/sortie d’établissements médico-sociaux qui a abouti à rendre impossible ce type d’accueil compte tenu des difficultés d’accès et du temps nécessaire au test (...). Concernant les services de la PJJ, là encore, les directeurs ont été surpris par la rapidité des prises de décisions (...) avec un retour des jeunes chez leurs parents (qui) les a mis en difficulté (...). Il n’a pas été fait mention d’une déclinaison sur le plan local et institutionnel de liens partenariaux forts entre le département et l’Education nationale sur lesquels il aurait été possible de s’appuyer davantage pour aborder la question du travail scolaire des enfants accueillis et faciliter la continuité pédagogique".

Mais, à l'inverse, cette situation "a conduit certains départements à créer avec leurs partenaires des dispositifs expérimentaux (...) dont le maintien pourrait être envisagé (...). Ainsi, il serait intéressant de tirer les enseignements de la structure d’accueil à bas seuil d’exigences pour des adolescents ayant des difficultés avec les règles de vie collective (...), et d’apprécier si ce type d’organisation tolérant les entrées et sorties offre aux jeunes fugueurs la possibilité de mieux se poser. Dans un autre département, un dispositif de répit a été institué par certains ITEP et IME pour des situations critiques d’enfants se trouvant soit dans leur famille, soit dans des structures de protection de l’enfance (...)."

Le dossier (une vingtaine de pages) ici

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