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Maternelle obligatoire : les raisons d'E. Macron, le coût pour les collectivités, les questions des enseignants

Paru dans Petite enfance, Scolaire le mardi 27 mars 2018.

"J'ai décidé de rentre obligatoire, dès la rentrée 2019, l'instruction à 3 ans", déclare Emmanuel Macron. Le président de la République intervenait, ce 27 mars, en ouverture des "Assises de la maternelle". Il a, à cette occasion, évoqué le rôle "éminemment politique" de l'Ecole, puisque c'est "dans et par l'Ecole" que s'est inventée la République", qu'elle a sa part dans le traitement des "causes profondes" des "déchirures de notre société" et dans la lutte contre les "pulsions de mort" de ceux "qui n'y ont pas construit leur avenir". Pour lui, l'Ecole maternelle a un rôle important à jouer puisque "80 % des décrocheurs étaient déjà en difficulté au cours préparatoire". Il précise que cette obligation peut sembler inutile quand 97 % des enfants sont déjà scolarisés, mais cette moyenne couvre des inégalités territoriales, notamment dans les DOM, et "dans la journée", puisque certains enfants ne vont à l'école que le matin. Il ajoute qu'il ne rend pas obligatoire l'école maternelle à 2 ans, mais il s'engage à "donner les moyens" de cette scolarisation partout où elle apparaîtra "utile". Il annonce qu'il reviendra "dans quelques mois" sur la nécessité de développer une école "authentiquement inclusive".

Cette obligation pose un certain nombre de questions, notamment en ce qui concerne l'enseignement privé. "Presque toutes" les classes maternelles des écoles sous contrat sont elles-mêmes sous contrat, selon les informations recueillies par ToutEduc. Le nombre de postes d'enseignants du privé qui devraient donc être attribués à des "contractuels" rémunérés par l'Etat serait réduit. Interrogé par ToutEduc, Jean-Marc Huart (DGESCO) estime d'ailleurs "que ce n'est pas une question", mais n'a pas de données sur leur pourcentage. Le privé compte 11 940 classes pré-élémentaires, la plupart situées dans 4 957 "écoles primaires" (réunissant maternelle et élémentaire, chiffres 2016). Selon les chiffres communiqués par le ministère au SNEP (le syndicat UNSA de l'enseignement privé, sont déclarées "57 écoles maternelles sous contrat d'association avec l'enseignement public", 118 écoles maternelles hors contrat, 13 écoles sous contrat simple ou sous contrat d'association pour une partie des classes.

Un surcoût pour les collectivités

Si le surcoût pour l'Etat est, vraisemblablement, faible, il pourrait en revanche être important pour les collectivités locales. Damien Berthilier, président du réseau des "villes éducatrices" et adjoint à l'éducation à Villeurbanne l'estime en première approximation à 1 M€ pour sa commune. En effet, dès lors que l'école est obligatoire, la collectivité doit en financer les coûts de fonctionnement, notamment les salaires des ATSEM. Certes, beaucoup de collectivités financent déjà des classes maternelles, mais dans le cadre de "gentlemen's agreements". Par ailleurs, d'autres participants à ses Assises se demandent si certaines écoles Montessori ne vont pas demander à passer sous contrat, ce qui augmenterait le surcoût pour les collectivités et pour l'Etat.

La présidente de l'AGEEM (l'association des enseignants de maternelle) se réjouit que l'école maternelle bénéficie de cette reconnaissance, mais elle s'interroge sur l'âge des enfants qui y seront accueillis. "Si 'à 3 ans' signifie qu'ils ont effectivement 3 ans au 1er septembre, nous accueillerons surtout des élèves de 4 ans". Elle demande si un texte rendra obligatoire "un.e ATSEM par classe", puisque certaines classes comptent 30 enfants pour un seul adulte. Elle s'inquiète aussi du volume des "formations communes" de ces personnels communaux avec les enseignants, qui paraît nécessaire, mais qui ne concerne actuellement que quelques dizaine de personnes dans chaque département.

La maternelle "reconnue et sécurisée"

Les syndicats FGAF (SNALC et SNE) "se félicitent" de voir l'école maternelle "officiellement comme une École à part entière" et soulignent "l’importance de l’assiduité, d’un cadrage national pour des carnets de suivi des apprentissages harmonisés et d’une formation renforcée spécifique des professeurs de maternelle". Ils insisteront sur "l’amélioration impérative du taux d’encadrement, sur la nécessité d’avoir une ATSEM par classe et sur le besoin d’une présence systématique du RASED dès la petite section."

Pour le SE, la maternelle est "reconnue et sécurisée", mais "il faut diminuer les effectifs par classe, améliorer les équipements matériels et accroître la formation de tous les personnels" et pour le syndicat UNSA des enseignants, ces assises marquent "le début d’un travail qui devra conforter et consolider une école maternelle bienveillante, sans pression excessive et attentive aux besoins de chaque enfant".

Quid des programmes de 2015 ?

Le SNEP, "attaché à la qualité de l'enseignement dont doivent bénéficier tous les élèves" et demande "que la carte scolaire de tout le 1er degré" [y compris donc le privé sous contrat] soit étudiée par les instances départementales.

Le SNUIPP s'interroge sur les effets de cette réforme alors que l'école maternelle "est [déjà] fréquentée par la quasi-totalité des enfants de 3 ans". Le syndicat FSU du 1er degré s'inquiète notamment "des moyens nécessaires à cette scolarisation dans les départements d'Outre-Mer où le taux atteint péniblement les 70% comme à Mayotte ou en Guyane", et se demande s'il faut voir dans cette annonce "une remise en cause de l’accueil des moins de 3 ans et des dispositifs créés sous le quinquennat précédent". Il se demande également "quelles modalités" envisage le gouvernement "pour éviter que l’extension générale aux écoles privées n’exacerbe la concurrence scolaire". Il demande "une amélioration des conditions d’accueil (espaces adaptés, mobilier…) et d’apprentissage avec notamment une diminution des effectifs par classe", davantage de formation, le maintien des programmes de 2015...

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