Petite enfance : lire les bons livres au bon moment, dès 6 mois (recherche, université de Floride)
Paru dans Petite enfance, Périscolaire le lundi 08 janvier 2018.
Si des études récentes ont validé l'intérêt de lire des histoires aux enfants dès le plus jeune âge et des livres différents, parce que cela "a un impact positif sur leur développement cognitif et langagier" (vocabulaire plus étendu, amélioration des compétences qui faciliteront l’entrée en lecture, et progrès dans l’apprentissage conceptuel), le laboratoire en psychologie "Brain, cognition & development lab" de l'université de Floride s'est interrogé sur le type d'ouvrages qui seraient "les plus à même de susciter des interactions plus riches et un meilleur apprentissage". Celui-ci a mené une série d'études sur l'apprentissage des bébés afin "de mieux comprendre l'impact de la lecture partagée sur le développement cognitif et comportemental". Dans un article publié sur le site The Conversation, "Pour développer le cerveau de bébé, lisez-lui les bons livres au bon moment", l'une des chercheuses du laboratoire, Lisa S. Scott, livre les résultats d'une étude expérimentale menée auprès de bébés, tout au long du deuxième semestre de leur vie, et dont les résultats ont été publiés le 8 décembre 2017 dans la revue Child Development. Ceux-ci valident la théorie que "tous les livres ne se valent pas".
Cette étude, financée par la National Science Foundation, a consisté à observer des enfants en laboratoire, en deux étapes distinctes. Lors d'une première étape en laboratoire, a été observé le niveau d'attention prêté par des enfants de six mois à des personnages qui leur étaient inconnus. Les réactions de leur cerveau étaient mesurées par électroencéphalographie (EEG), afin d'observer, au travers de leurs réactions neuronales lorsqu'ils regardaient des images affichées sur un écran d'ordinateur, leur capacité à faire la différence entre les personnages qu'on leur montrait. Ont aussi été analysés les mouvements oculaires afin de mesurer leur durée d'attention et de repérer les parties des images sur lesquelles ils se concentraient le plus.
Capacité à faire appel à des représentations mentales dès le plus jeune âge
Les sujets, 34 au final répartis équitablement entre garçons et filles, ont dans un deuxième temps été répartis en trois groupes. Dans le premier, les parents ont été chargés de lire aux petits des livres contenant six personnages qui leur étaient inconnus, et dont chacun avait un nom. Le deuxième groupe disposait des mêmes livres, mais les personnages y étaient tous désignés par le même nom, choisi au hasard. Le reste des familles, un groupe contrôle, n'a rien lu de particulier pendant la durée de l'étude. Trois mois plus tard, une nouvelle mesure de l'attention portée aux personnages, réalisée à nouveau en laboratoire, a montré que "seuls ceux qui avaient reçu des livres où les personnages portaient des noms distincts avaient fait des progrès". Les bébés ayant appris une variété de noms témoignaient de "leur capacité à faire la différence entre les différents personnages", "apprenaient davantage, généralisaient ces acquis à de nouvelles situations et montraient des réponses cérébrales plus spécialisées", développe la chercheuse, "effets" qui n'apparaissaient pas chez les enfants du groupe contrôle, ni chez ceux dont les livres ne comportaient aucune légende, ou une légende commune pour chaque image.
Ces conclusions, poursuit Lisa S. Scott, "suggèrent que les enfants sont capables dès le plus jeune âge de faire appel à des représentations mentales pour découvrir le monde qui les entoure, et que la lecture partagée est un outil très efficace pour soutenir leur développement dans la première année de leur vie". Et "pour que la lecture puisse porter ses fruits, il faut choisir les bons ouvrages au bon moment".
L'article de recherche ici (en anglais)
L'article dans The Conversation ici (en français)
Camille Pons