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Le rapport au vitriol sur la gestion des AESH et l'accueil des élèves porteurs de handicap (Défenseure des droits)

Paru dans Scolaire, Périscolaire le lundi 29 août 2022.

- “En ce matin de rentrée scolaire mon garçon ne s’est pas levé pour prendre le petit-déjeuner avec son frère et sa sœur ! Non, lui il n’a pas école, car il n’a pas d’AESH“...

- “Depuis juin je suis en contact avec l’école, on m’a dit de rappeler, de rappeler encore, puis le 7 juillet d’attendre désormais fin août, où j’aurai enfin une réponse. Nous avons passé l’été, à la fois plein d’espoir et d’angoisse, puis la veille de la rentrée, rien, pas d’AESH pour notre fils“...

Ces deux exemples illustrent les “difficultés persistantes rencontrées encore par trop d’enfants en situation de handicap pour accéder à l’éducation, sans discrimination, à égalité de chances avec les autres“ que pointe le dernier rapport de la Défenseure des droits concernant l’accompagnement humain des élèves porteurs de handicap à l'école, qui sont au nombre de 430 000 aujourd'hui.

Elle y précise avec minutie et, saisines à l'appui, que “trop d’enfants ne bénéficient pas d’un parcours scolaire adapté, sont victimes de stigmatisation et ne voient pas leurs besoins pris en compte du fait de l’impréparation du système éducatif qui les a pourtant accueillis au nom de l’inclusion".

Système

Pour Claire Hédon, c'est d'ailleurs le système global de l’accompagnement humain comme principale réponse à l’inclusion qui est à repenser. Elle indique que les nombreuses saisines reçues chaque année “démontrent que le système scolaire actuel demande, encore trop souvent, aux enfants en situation de handicap de s’adapter, au risque de les stigmatiser et, in fine, de les exclure". La défenseure des droits se dit d'ailleurs “régulièrement saisie par des familles dont l’enfant se voit refuser par l’établissement une scolarisation complète, voire toute scolarisation, au motif de l’impossibilité des équipes éducatives à accueillir l’enfant en l’absence de son AESH“ alors que “la présence d’un personnel chargé de l’accompagnement n’est ni un préalable ni une condition à la scolarisation de l’élève“, rappelle-t-elle.

De même, la rigidité des programmes et objectifs scolaires “qui réduit la réussite aux performances scolaires, laisse peu de place à la singularité de chacun“, tandis que “les importants effectifs scolaires par classe, outre la limite du parc immobilier, sont des freins à l’accessibilité matérielle“.

Enfin, le manque, voire, l’inexistence de formation des professionnels de l’Education nationale à l’inclusion scolaire les met en difficulté pour envisager d’autres aménagements de la scolarité que le recours à l’aide humaine“, ce qui entraîne “une mauvaise utilisation des outils d’évaluation des besoins de l’enfant, et “s’agissant plus précisément des enseignants, ce manque est un frein à l’accessibilité pédagogique qui suppose une adaptation des contenus des cours et de leurs supports".

Egalité

Au delà de ce premier constat, la défenseure des droits évoque une gestion des besoins en accompagnement humain qui ne permet pas un accès égal à l’éducation des élèves en situation de handicap. Ainsi, “face à un nombre de notifications d’AESH en constante augmentation, beaucoup restent lettre morte.“ Certaines académies refusent d’honorer une notification intervenue en cours d’année scolaire “au motif que le budget alloué aux AESH étant calculé en début d’année scolaire, elles ne disposent pas des moyens nécessaires pour procéder au recrutement".

D’autres, “refusent systématiquement de remplacer les AESH absents, estimant qu’elles ne peuvent anticiper ces absences et que, d’un point de vue administratif, elles respectent la notification de la MDPH". Claire Hédon ajoute que “les contraintes budgétaires des académies ne sont pas toujours sans influence sur le sens des décisions prises. De tels biais introduits dans la prise de décision des CDAPH interrogent en ce qu’ils viseraient à répondre à des dysfonctionnements financiers et structurels et non plus réellement aux besoins de l’enfant.“

Les évolutions positives récentes concernant l'emploi des AESH réjouissent la Défenseure des droits, mais celle-ci les estime toujours “insuffisantes pour rendre les emplois attractifs et répondre aux besoins.“ De fait, si dans les faits, la grande majorité des AESH se voient proposer un contrat de 24 heures/semaine, “dans les textes, rien n’impose à l’employeur de limiter le contrat à une telle durée“. Elle note que ces emplois à temps partiels sont souvent rythmés par une importante mobilité des professionnels, et que si les AESH peuvent être recrutés pour exercer leurs fonctions d’accompagnement au sein d’un ou plusieurs établissements et/ou auprès de plusieurs enfants dans un même établissement, “il est largement fait usage de cette possibilité à des fins de rationalisation du personnel, sans tenir compte ni des besoins des enfants, ni des conditions de travail des AESH.“

Précarité et manque de reconnaissance

Les saisines de la Défenseure des droits montrent par ailleurs que “des AESH disent se sentir isolés, tant vis-à-vis des autres acteurs de la communauté éducative (notamment les enseignants) que de leurs pairs“, et elle souligne “l’absence d’intégration de la fonction d’AESH dans la fonction publique“ qui “contribue à un sentiment de marginalisation“.

Plus encore, “leur sentiment d’appartenance à un corps professionnel semble altéré“, et ce malgré la mise en place des PIAL (pôles inclusifs d’accompagnement localisés) et des AESH référents, et les AESH regrettent “de ne pas pouvoir échanger régulièrement avec leurs pairs aussi bien sur les situations à gérer au quotidien que sur leurs pratique“.

PIAL

Les PIAL sont aussi sévèrement critiqués. La Défenseure des droits déplore “que l’expérimentation du dispositif n’ait pas débouché sur une évaluation de celui-ci avant sa généralisation". Les contours des PIAL “restent dès lors extrêmement flous en pratique, ce qui conduit à un fonctionnement très disparate en fonction des territoires, sans qu’une coordination appropriée n’ait été pensée".

A celà s'ajoutent un certain nombre de PIAL qui “font primer la gestion des ressources humaines sur la réponse aux besoins de l’enfant“, avec des “conséquences non négligeables“ sur son accompagnement, “la continuité de celui-ci, et, in fine, sur sa scolarisation“ mais également “sur des professionnels en souffrance, tiraillés entre les demandes des familles et celles des enseignants, qui finissent par démissionner.“

Quel rôle, quel accompagnement ?

Claire Hédon détaille pour finir l'inadaptation des modalités d’accompagnement aux besoins des élèves en situation de handicap. Elle a par exemple été alertée de la situation de plusieurs AESH qui n’auraient reçu aucune formation, ni avant leur prise de fonction, ni au cours du premier trimestre de l’année scolaire, contrairement à ce qui était spécifié dans leur contrat, et les AESH interrogé.e.s “sont unanimes sur l’insuffisance de leur contenu, voire l’utilité même de celui-ci".

Quant au rôle de l'AESH, il n'apparaît pas comme convenablement défini : “il ressort des situations soumises au Défenseur des droits que les frontières entre le rôle de l’AESH et celui de l’enseignant sont souvent poreuses.“

Les AESH rencontrent encore des difficultés “pour trouver leur place au sein des équipes pédagogiques, en raison le plus souvent d’une méconnaissance de leur rôle par celles-ci, de l’absence de préparation de ces équipes à accueillir dans leur classe des AESH et de difficultés à articuler leurs interventions sur le terrain.“

Enfin, en raison notamment du manque d’AESH, de leur emploi du temps réduit et de l’intervention sur plusieurs établissements, “il ne leur est pas permis de participer systématiquement aux équipes de suivi de scolarisation (ESS) pour coconstruire l’accompagnement des enfants (GEVA-SCO), aux rencontres pluri-partenariales et aux rendez-vous avec les parents des enfants qu’ils accompagnent.“

Le rapport “L’accompagnement humain des élèves en situation de handicap“ ici

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