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Justice des mineurs : Eric-Dupont Moretti détaille ses projets (Délégation des droits de l'enfant)

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Justice le jeudi 15 décembre 2022.

“Les propositions de la Ciivise sont actuellement expertisées“, indique Eric Dupond-Moretti lors de son audition mercredi 14 décembre par la délégation aux droit de l'enfant de l'Assemblée nationale.

Le Garde des sceaux a salué l'action du juge Edouard Durand et de la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (voir ToutEduc ici), “bel outil“, “travail considérable“, mais il considère que certaines préconisations peuvent poser un problème constitutionnel pour entrer dans le texte de protection de l'enfance qu'il prépare.

Concernant les violences sexuelles potentiellement commises au sein d'un foyer, il souhaite que "le juge statue de façon systématique sur le maintien de l'exercice de l'autorité parentale“, mais il se dit sceptique quant à une suspension des droits (notamment de visite) avant condamnation du fait “de risques constitutionnels et d'instrumentalisation“.

Interrogé sur les violences sexuelles commises contre les enfants handicapés, contre lesquels des infractions plus nombreuses sont recensées du fait de “proies plus fragiles“, est souligné un renforcement des contrôles avec 54 ETPT mobilisés pour ces missions par la PJJ en 2022, et “20 de plus en 2023“, dont une partie concernera les contrôles de fichiers où sont répertoriés les auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (FIJAIS). Le ministre a également souligné le recrutement de 1500 magistrats et tout autant de greffiers supplémentaires prévus en 2023, les 2000 contractuels recrutés dont 1000 au civil pour simplifier les procédures et constituer une équipe autour du magistrat afin de rendre des décisions plus rapides, ce qui a déjà permis un “déstockage“ de 25 % d'affaires en moins au niveau national. Est d'ailleurs précisé que les délais de jugement sont passés “du double au simple“ (à 9,1 mois en moyenne) du fait de la mise en place du code de justice pénale de mineurs il y a un an.

Face aux députés, ont en outre été mises en avant par l'ancien avocat les mesures prises par le gouvernement pour la protection de l'enfance, comme la future hausse de plus de 10 % des moyens alloués à la PJJ avec 92 agents supplémentaires recrutés l'an prochain, ou encore la dotation dans chaque département en 2024 d'une unité d'accueil pédiatrique des enfants en danger (UAPED), alors qu'il en existe 75 aujourd'hui.

“Outil de plus au service des victimes“, le ministre annonce un déploiement plus large du dispositif des “chiens d'assistance judiciaire“ originaire de Cahors. Ils sont actuellement 10 sur le territoire, et seraient multipliés sur les 164 tribunaux judiciaires. La présence du chien permettrait “d'appréhender moins mal le procès qui s'ouvre“, il apporterait calme et tranquilité aux enfants lors de leur témoignage au tribunal et pourrait aider en partie “à se libérer du traumatisme“.

En outre, Eric Dupont-Moretti a mentionné l'importance pour les mineurs de connaître leurs droits afin qu'ils puissent savoir comment les actionner, les points d'accès aux droits qui sont ouverts dans les établissements pénitentiaires pour mineurs seront généralisés.

Est encore indiqué que la PJJ “se déplace dans les établissements scolaires“ pour permettre aux enfants de connaître leurs droits, et que la mise en place d'un passeport “éduc droit“ (voir Touteduc ici) est envisagée avec l'EN car “le rapport qu'on a avec les enfants aujourd'hui a beaucoup changé, on ne les considère plus comme des sujets passifs, mais comme des citoyens de demain, donc l'appréhension de ce qu'est l'importance du droit, de la règle de droit et même de l'état de droit, commence par là“.

D'ici la fin du mois sera également prise une circulaire dédiée à la lutte contre les violences faites aux enfants “d'une envergure similaire à celle contre les violences conjugales“. Pour lutter contre la prostitution des mineurs seront également menées des actions “de repérage de ces situations, de lutte contre ces réseaux“ en lien avec les services du ministère de l'intérieur.

Au niveau Européen, des travaux sont en cours dans le cadre de la prévention et de la lutte contre les abus sexuels sur les mineurs, un règlement "ASM" est en préparation.

Pédopornographie

Au sujet de la lutte contre la pédopornographie en ligne justement, est expliqué que la Commission européenne propose la création d'un Centre européen de prévention et de lutte contre les abus sexuels sur mineurs, mais aussi de renforcer les obligations générales pesant sur les fournisseurs de service en ligne, avec des obligations plus ciblées de signalement, de détection, de retrait, de blocage et d'identification des contenus sous la responsabilité des autorités nationales de coordination. Eric Dupont-Moretti estime à ce sujet que l'accès libre à la pornographie et les contenus violents sont des phénomènes nouveaux, qui sont générateurs de délinquance tout comme l'a été le confinement". Il indique que les services de ministère de la justice “travaillent avec des techniciens pour interdire l'accès à la pornographie à des mineurs“ avec différents outils comme la carte d'identité, la carte bancaire..

Le sens général, poursuit-il, c'est qu'il y a “une forme de corruption de mineurs“, d'où l'idée d'associer différents acteurs comme l'ARCOM, pour traiter la question et “vite“. Outre le travail technique, un travail est en cours sur les textes, pour toucher la plateforme “mais aussi celui qui fait le film“, réfléchir à réglementer sur le plan pénal, et pourquoi pas “imposer qu'un certain nombre de choses soient faites par ceux qui produisent ces films et qu'ils soient sanctionnés si ils ne prennent pas toutes les précautions pour protéger les mineurs“.

Enfants rapatriés

Suite à l'arrêt de la CEDH concernant le retour des enfants de combattants terroristes retenus en Syrie, le Garde des sceaux explique souhaiter étendre un dispositif (existant à l'étranger, ndlr) d'accompagnement des plus petits enfants pour faciliter leur témoignage, qu'ils puissent bien regarder la salle, l'appréhender et “se familiariser avec cet endroit“. Il assure par ailleurs que la CEDH “n'a condamné la France que pour le manque de formalisation du processus décisionnel conduisant au non-rapatriement“ et que “nous n'avons pas été condamnés parce que nous n'avons pas rapatrié“. Celle-ci “a considéré que la France ne peut pas être tenue pour responsable des conditions de vie dans les camps du Nord-Est de la Syrie“. Il ajoute que les demandes ont été réexaminées et les réponses ont été motivées, et donc que la France s'est mise en conformité avec l'arrêt de la cour alors qu'il a “lu tellement de choses, notamment que nous abandonnions les enfants, qui sont assez loin de la réalité“. En revanche, estime-t-il, “nous le faisons (rapatrier) et le ferons chaque fois que c'est possible“.

Il décrit dès lors une situation complexe qui nécessite à la fois humanité vis à vis d'enfants non responsables des choix criminels de leurs parents, et vigilance “psychologique“ pour les 270 enfants rapatriés, dont 71 % ont moins de 10 ans et 119 sont nés en zone Irako-Syrienne, sans état civil et sans filiation. Ils sont répartis sur le territoire national en fonction des lieux où ils peuvent avoir des attaches familiales.

Ces enfants font systématiquement l'objet d'une double prise en charge, ils sont systématiquement suivis à leur arrivée dans le cadre de procédures d'assistance éducative, éventuellement cumulées avec des placements en famille quand cela est possible, ou en structure éducative. Un suivi judiciaire qui se double d'un suivi administratif au sein des cellules de prévention de la radicalisation et d'accompagnement des familles, soit l'implication de l'ensemble des acteurs locaux en contact avec ces enfants.

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