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Laïcité : l'historien Jean-Louis Auduc pourfend ceux qui ne la comprennent pas et l'instrumentalisent

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Orientation le vendredi 24 février 2023.

Comment "rendre la laïcité désirable et porteuse de fraternité", se demande Jean-Louis Auduc, agrégé d’histoire, membre du Conseil des Sages de la laïcité, une instance créée par Jean-Michel Blanquer aux prises de position duquel il s'oppose frontalement dans un petit ouvrage à paraître.

Il y défend une laïcité "respectueuse de tous les citoyens", combattue "par les intégristes de l’islam politique, du catholicisme virulent, du christianisme à la Trump, des évangélistes, du judaïsme...", mais aussi "par certains qui ont une vision d’une laïcité purement antireligieuse" et qui surtout connaissent très mal la loi de 1905, la jurisprudence et les principes auxquels ils prétendent se référer. L'auteur évoque tous les domaines de la vie privée ou publique, dont l'école et il pourfend "ces intégristes (de la laïcité) (qui) s’offusquent de ce que la laïcité permet le développement de l’esprit critique, la liberté d’expression, autorisant la critique, même outrancière, des idées, des principes, des valeurs et même des religions" et de ...  la laïcité elle-même. Celle-ci "ne peut pas devenir, sans être dénaturée, un objet tabou qu’il serait interdit de critiquer même outrancièrement. Ce serait totalement contre-productif."

L'auteur ne précise pas explicitement s'il vise ici les enseignants qui dénoncent des "atteintes à la laïcité" dès lors qu'un élève critique la loi sur le port de signes religieux par exemple. En revanche, il est dénonce sévèrement la Région Île-de-France qui a supprimé des subventions à la ligue de l’enseignement "au prétexte que dans un concours d’éloquence", une jeune fille "avait gravement critiqué la laïcité".

Sur les tenues que portent les élèves, il estime qu' "il faut éviter de surinterpréter la posture des jeunes (...) Distinguer l’originalité qui valorise de la provocation qui isole est un enjeu social de la formation des élèves." Il rappelle que l’École "reconnaît la liberté d’expression des élèves" mais aussi qu' "aucune règle ne reconnaît aux élèves un droit absolu à s’habiller à leur guise".

L'auteur se souvient aussi de l'indignation d'intellectuels médiatiques pour qui les absences d'élèves musulmans le jour de l'Aïd El Fitr seraient une manifestation de séparatisme. Ils ignorent qu'un décret de 1907 et une circulaire de 2004 prévoient que "des autorisations d’absence doivent pouvoir être accordées aux élèves pour les grandes fêtes religieuses qui ne coïncident pas avec un jour de congé", trois pour le judaïsme, autant pour l'islam, le culte arménien, l’Église orthodoxe et un pour le bouddhisme. "il est donc scandaleux de lire que quelques enseignants, des politiques, des journalistes, qualifient d’atteintes à la laïcité" l'absence d’élèves dans ce cadre.

Sans-doute ignorent-ils également les règles qui prévalent "pour les aumôneries dans les collèges et lycées avec internat, les hôpitaux, à l’armée et dans les prisons". Le ministère lui-même "semble ignorer" que des messes sont célébrées dans les enceintes des lycées Henri IV et Louis Le Grand à Paris ou du lycée François Ier au Havre.

Jean-Louis Auduc s'étonne encore de voir le site "Riposte laïque" refuser "qu’on évoque en cours d’histoire l’islam, ce qui depuis plus de deux siècles fait partie des programmes scolaires français", et il ajoute : "se rendent-ils compte du mal qu’ils font à la laïcité ? (...) L’emploi permanent du terme 'wokisme', paré de tous les dangers, est aussi une caractéristique de ces personnages."

Sur le versant positif de l'ouvrage, l'auteur évoque les cinq principes qui permettent "une approche laïque" de l'enseignement du fait religieux, lequel "ne doit en rien signifier mépriser le sacré, mais plutôt l’approcher comme un élément culturel important permettant la compréhension de la religion". Il conseille à ses anciens collègues de "choisir des approches transversales travaillées à partir des religions d’hier et d’aujourd’hui, d’ici et d’ailleurs". Il en appelle à "une vision dynamique et non figée dans le marbre des valeurs de la République afin de leur donner du sens".

"Laïcité, que de trahisons on commet en ton nom", J-L Auduc, éditions "Rue de Seine", 150 p., 14,90€

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