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Quand "l'école est finie" et que les enseignants "s'évaporent", un documentaire à voir sur Public Sénat

Paru dans Scolaire le dimanche 14 mai 2023.

"J'ai tenu parce que, quand on est instit', on tient." Cette formule d'une professeure des écoles qui a fait un burn out mais qui, le plus longtemps possible, a fait face est emblématique du documentaire, "L'école est finie". Celui-ci sera diffusé sur la chaîne Public Sénat le 10 juin à 21h. Il s'ouvre avec quelques lignes de la lettre que Christine Renon a laissée avant de se suicider dans l'école de Seine-Saint-Denis dont elle était directrice, et avec cette réflexion de l'une des cinq enseignant.es qui racontent à Julie Chauvin leur épuisement, "on dirait moi". Aucun des cinq n'a mis fin à ses jours, mais ils ne sont pas passés très loin.

Ces quatre femmes et cet homme, qui ont entre 9 et 39 ans d'ancienneté dans le métier, l'ont tous aimé passionnément, avec le devoir de "sauver" les enfants qui leur étaient confiés. "J'étais hypermotivée", dit l'une et une autre raconte qu'elle mettait 8 heures pour préparer une journée de six heures. Anthony n'était plus "Anthony papa" ni "Anthony conjoint", il n'était plus que "Anthony maître d'école", ses élèves étaient "des parties de sa vie". Emilie, directrice d'école liste toutes les responsabilités qui lui incombent, jusqu'à "détecter une fuite dans une gouttière" et l'épuisement que provoque l'obligation d'être toujours en alerte, responsable de tout. Mais quand la collègue avec qui elle s'entendait bien a été remplacée par une autre, violente et incompétente, quand elle a demandé de l'aide, l'inspection lui a promis de la rappeler... et ne l'a jamais fait. Et quand elle revient d'un long congé maladie, personne de lui demande comment elle va. Quand un enfant menace l'enseignante, "je vais te buter avec un fusil", quand les parents l'insultent, l'inspecteur lui explique qu'il n'est "pas là pour (la) soutenir affectivement". Quand une enfant est victime d'inceste mais que l' "information préoccupante" adressée à la Justice aboutit à un classement sans suite, elle se sent incapable de protéger les élèves qui lui sont confiés, et là encore, l'institution n'a rien à dire. Et quand un enfant meurt écrasé parce qu'il jouait dans la rue, aucune cellule psychologique n'est mise en place, ni pour l'enseignante, ni pour ses camarades : le décès ayant eu lieu "hors temps scolaire", l'Education nationale n'est pas concernée...

L'une est militante syndicale, elle est à l'écoute de ses homologues qui évoquent leurs difficultés, qui sont sous anxiolytiques. Elle dénonce une "omerta" de l'institution, elle est convaincue qu'il y a autant de suicides parmi les enseignants que chez les policiers. Trois ont démissionné, une a pris sa retraite, une a changé pour une "école pâquerette", avec le sentiment de déserter face à la difficulté sociale, il-elles ont connu une "descente aux enfers", avec le sentiment d'être "livrés à eux-mêmes". Anthony, qui a adressé sa démission à Pâques, mais n'a eu de réponse qu'à deux jours de la rentrée de septembre, n'a pas pu organiser son pot de départ et dire au revoir à ses collègues, il a le sentiment de s'être "évaporé".

"L'école est finie", documentaire de 52' de Julie Chauvin, production "Karen production" et Samuel Moutel

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