Les assouplissements de la carte scolaire ont favorisé le privé, certains collèges RAR ont été déstabilisés (DEPP)
Paru dans Scolaire, Orientation le mercredi 05 juin 2013.
Les assouplissements de la carte scolaire n'ont pas permis d'améliorer la mixité sociale dans les collèges, un des objectifs avancés à l'époque pour la justifier. Les effets seraient en réalité "diamétralement opposés". C'est ce qui ressort des études publiées ce 5 juin par la revue "Éducation & formations" de la DEPP (service statistique de l'Education nationale), consacré à l’évaluation de cette politique mise en œuvre depuis la rentrée scolaire 2007. Globalement, les évolutions constatées sur les effectifs d’élèves et le profil social des collèges "sont assez faibles", même si "le secteur privé a vu sa part augmenter, avec un accroissement plus net dans les familles les plus favorisées" et si les établissements RAR (réseaux ambition réussite) "ont connu une nette baisse de leurs effectifs".
D'ailleurs, "les familles qui résident dans le secteur des collèges de l’éducation prioritaire, en particulier les familles des élèves non boursiers, ont plus souvent recours aux dérogations que la moyenne" et les diminutions d'effectifs frappent surtout certains collèges. Entre 2006 et 2007, les collèges en RAR dont il était déjà notable qu'ils étaient "très évités" ont perdu 18 % de leurs effectifs, contre 2 % pour les collèges réputés "attractifs". Il apparaît donc que "l’amplification durable des scolarisations hors secteur alimente des processus cumulatifs de hiérarchisation et de stigmatisation de collèges aux effets délétères".
Elan brisé
C'est ainsi qu'à Lille, les mesures d’assouplissement de 2007 ont brisé "dans son élan une dynamique inter-institutionnelle dont le projet était de rétablir la mixité sociale au sein des collèges publics". Au point que "tout incite à penser qu’elle a, au contraire, aggravé ces disparités en favorisant de gros flux d’élèves à partir de 2008". Au niveau national d'ailleurs, les auteurs constatent des "ségrégations accrues aux deux extrémités de la hiérarchie des collèges" et "une fuite accélérée des collèges du bas de la hiérarchie sociale des recrutements qui a contribué à les stigmatiser et à les déstabiliser encore davantage".
Cette réforme a aussi "été l’occasion d’une redistribution des rôles des responsables intermédiaires de l’Education nationale" avec "une recentralisation du processus de décision au niveau de l’inspection d’académie et à une marginalisation des principaux de collège", certains étant conduits "à développer des stratégies de marketing pour faire connaître [leurs] projets auprès des différentes parties prenantes, dont les parents".
Le numéro 83 de la revue Education et formations, "Les effets de l'assouplissement de la carte scolaire", est téléchargeable ici.