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Ecole A : le groupe Acadomia lance des écoles hors contrat et une pédagogie “repensée“

Paru dans Scolaire, Orientation le mercredi 22 juin 2022.

La visite a lieu dans un immeuble cossu du 16ème arrondissement de la capitale. Les salles de classe sont assez vastes, le décorum soigné, dans un style très contemporain, flex office, fauteuils designs et lignes épurées, assez loin de l'image d'épinal d'une école traditionnelle.

“C'est l'école d'aujourd'hui repensée pour tout ce qui va être demain." Marie-Dominique Delmas, directrice pédagogique des écoles A, fait office de guide pour nous permettre de découvrir d'étage en étage l'établissement parisien hors contrat (collège-lycée) qui verra se mettre en place dès septembre une pédagogie à la fois “active“ et participative“. Elle explique que “c'est Philippe Coléon, un des fondateurs d'Acadomia, qui a voulu avoir un établissement avec un pédagogie différente“, mais qu'elle la pratiquait déjà dans le privé sous contrat où elle évoluait auparavant et qu'elle désirait “aller encore plus loin“.

L'école de demain

Bien que les lieux ne soient pas encore complètement meublés en ce jour caniculaire de juin, 110 élèves sont d'ores et déjà inscrits pour la rentrée 2022. Cependant un manque de place se ressent. Pas de cantine, une salle de cours devient le midi “salle de lunch“. Le superbe rooftop, qui semblait pensé pour leur détente avec des sièges très accueillants, ne pourra pas les recevoir pour des raisons évidentes de sécurité. Là réside l'inconnue d'un tel bâtiment : l'effervescence d'une cour de récréation où le chahut et les jeux innocents et impromptus de l'enfance se mêlent semblent avoir été oubliés. Comme consolation, le potager présent sur les toits servira bien, en tant que matière première pour les professeurs de SVT.

Marie-Dominique Delmas affirme que la plupart du personnel de l'école vient de l'Education nationale (public ou privé sous contrat) et qu'ils “maîtrisent“ leurs métiers. Forte de son expérience d'une vingtaine d'années, notamment en tant que principale de collège, elle pense avoir “gardé ce qui fonctionnait“ dans le système scolaire classique, c'est à dire suivre scrupuleusement le programme académique, mais avec “une autre façon de faire“. Elle cite d'ailleurs l'enseignante Céline Alvarez qui “avait tout changé aussi dans sa classe“ (voir ToutEduc ici).

“Par contre, continue-t-elle, on a enlevé tout ce qui ne fonctionnait pas, les classes en autobus, les enseignants qui déversent leur savoir sur les élèves, être persuadé qu'on va dire à 30 élèves de rester assis sans se taire pendant 7 heures d'affilée, une cantine où tout le monde est speedé et pressé.“ Ici l'ambition consisterait plutôt à “ralentir les choses et essayer d'améliorer le système“ face à “la souffrance qui est rencontrée pour beaucoup d'élèves" ou au “manque de bienveillance“ qui fait qu' “on ne parle pas forcément d'humain mais surtout de vitesse, ça va tout le temps vite“.

Et selon elle, “si on interroge tous les chefs d'établissements et la majorité des enseignants, leur priorité après la base académique c'est vraiment être heureux à l'école, parce qu'on s'est aperçu que l'apprentissage sous stress ça ne fonctionne pas, et c'est pour ça qu'on a beaucoup trop d'enfants en échec.“

Pédagogie “active“

La pédagogie voulue passe donc par des petits groupes, 10 à 15 élèves par classe maximum, et suppose de travailler en groupe ou en équipes. Une expérience que la directrice pédagogique raconte avoir déjà eue au collège Saint-Joseph à Matzenheim, et qui aurait été suivie pendant 4 ans par l'université de Strasbourg.

Surtout, “ce que voulait Acadomia, c'est le système anglo-saxon, tout en gardant la partie basique française qui est un beau programme puissant dont on ne voulait pas s'extraire“, précise-t-elle. Elle souhaite par cette pédagogie “libérer l'intelligence émotionnelle au lieu de la contenir, ce qui donne de l'aggressivité, de la peur ou de l'effacement“. D'ailleurs, les futurs métiers des élèves d'aujourd'hui “n'existent pas“ donc il faut qu'ils aient ces compétences de flexibilité mentale et d'agilité. Ainsi l'intelligence aujourd'hui “n'est pas le logico-mathématique et l'auditif uniquement, c'est le passage entre le logico, le créatif et l'intuitif, c'est cette vitesse et cette rapidité de passage et d'analyse qu'on demande aux enfants.“

Dès lors, “on ne peut pas laisser les élèves simplement face au professeur qui déverserait son savoir parce que le non-mouvement n'implique pas ce mouvement intellectuel qu'on leur demande“. D'où l'idée de mobilier flexible, étudié pour créer ce changement de posture de l'enseignant (par exemple en travaillant en classe inversée) mais aussi amener les élèves à vivre différemment l'école. Ici un élève “a le droit de bouger, cela n'empêche pas la rigueur d'un règlement compris et entendu entre tous (je ne me balance pas, j'écoute)“. Les notions étudiées sont reprises régulièrement, après, en début de cours, sur plein d'endroits différents, avec une partie apprentissage et leur mise en application.

L'ex-chef d'établissement pense que “même à 35 élèves on peut y arriver mais c'est le mode de fonctionnement qui n'est pas adapté“, comme en technologie où la majorité des profs “parce qu'il n' y a pas le temps“ proposent uniquement en guise de cours des photocopies noir et blanc.

Pôles

La traduction de cette méthode au niveau des cours se situe dans la conception de l'emploi du temps. Alors que les études en chronobiologie d'inspiration du Québec et de Finlande montrent, par exemple, qu'à 8h-9h et 13h-15h l'attention est la plus faible, “au lieu de vouloir absolument caler la fameuse heure de maths de 8 à 9 qui n'est pas efficace“, seront mises en place “des langues, mais uniquement de l'oral“ et 30 minutes de relaxation ou de lecture.

Humanité, spécialités etc.. les cours seront ensuite regroupés par pôles : “Les élèves vont avoir une logique dans leur matinée, par exemple en sciences ils vont enchaîner maths, SVT et techno, et tous les enseignants vont faire du lien entre les matières pour que l'élève ait l'impression d'avoir fait un projet de trois heures, et non plus assister à trois cours différents.“

Un travail est également spécifié sur l'impact de l'alimentation sur les apprentissages, car “on sait à quel point un enfant qui peut être atteint d'un trouble de l'attention, rien qu'en améliorant la qualité alimentaire vous allez faire baisser de 20 % son trouble, donc on travaille avec des chefs pour du fait maison, autour de produits issus à 100 % d'agriculture raisonnée.“

De 14 à 16 heures, d'autres pôles seront à l'agenda comme “Art et Corps, avec par exemple l'EPS mais ce sera mixé avec une autre matière, Arts plastiques, SVT, maths.. “. Une autre après-midi “n'est consacrée qu'aux langues, avec de vraies mises en situation à l'oral“, et tous les élèves pourront passer une certification “incluse dans le tarif“.

Au lycée seront disponibles trois modes de scolarité (présentiel, distanciel et hors les murs) “pour que les enfants connaisent tous les modes de scolarité qui existent, mais surtout tous les modes de travail qui vont s'ouvrir à eux.“ Les cours se dérouleront de 9h à 17h, sauf le mercredi de 8h à 13h et uniquement en visio ce qui permet “d'éviter les transports et de leur faire gagner 1 heure à 1h30 pour beaucoup d'entre eux, donc ils sont en forme le matin“. Et l'avantage de la visio c'est que “plus on va les habituer au monde de demain, moins ils seront effrayés et plus ils seront heureux.“

En revanche, toutes les spécialités ne seront pas proposées, l'équipe de l'école A ayant rencentré son offre “sur les spécialités qui intéressent le plus les élèves et les parents, celles qu'ils recherchaient“, tandis que la “puissance d'Acadomia permet d'ouvrir des portes“ pour les cas spécifiques. Ainsi “dans le cas extrême où l'élève souhaite faire par exemple de l'italien, on crée un groupe spécifique italien en visio pour une personne, parce qu'on mutualise avec notre établissement de Nice.“

Pour délivrer ces enseignements, sont recrutés “des certifiés qui partent de l'EN pour venir rejoindre ce projet“, des personnes “qui au moins ont tenté le Capes même s'ils l'ont raté“. Une fois selectionnés, ces enseignants sont “reformés toutes les semaines“ au sein de l'école, avant d'être ensuite “validés auprès du rectorat". Pour Marie-Dominique Delmas, dans un établissement “sous contrat il ne serait pas possible de faire l'emploi du temps que l'on a créé ici, c'est pour cela ques des enseignants viennent, pour goûter à cette liberté pédagogique. On travaille ensemble, c'est un vrai labo de recherche et d'innovation.“

Le livret de présentation de l'école promet également “un accompagnement individuel ultra-personnalisé“ avec des personnels gestionnaires de l'orientation des élèves. L'accent est encore mis sur l'importance des “compétences de demain“, à savoir les soft skills et pratiques d'entreprise (leadership, etc..).

Positionnement

Il s'agit au final d'une “vraie volonté du groupe de se positionner en groupe éducatif, et donc de profiter de 22 ans d'expérience avec plus d'un million d'élèves suivis pour apporter notre contribution“, assure la directrice pédagogique, même si la scolarité n'est pas gratuite. Pas gratuite, mais “pas chère“, estime l'agrégée qui explique qu'une année de collège dans le privé sous contrat coûte 4000 euros, contre 5 800 à l'école A mais “avec les devoirs inclus“.

Elle considère que si Acadomia “avait eu la puissance d'un groupe comme Amazon“ pour rendre les cours gratuit, ils l'auraient fait, “mais il faut assumer les investissements, le mobilier, ce dont on a besoin pour les élèves donc qu'il y ait un revenu, on n'a pas le choix, il faut que les parents nous versent une contribution financière.“ Elle ajoute qu'Acadomia ne pense pas gagner de l'argent avec les écoles A, au contraire de sa filière “soutien“ qui serait lucrative.

Les scolarités de nombreux footballeurs ou joueurs de tennis professionnels sont également gérées par les "écoles A". A Paris, l'ambition serait d'atteindre jusqu'à 240 élèves, et de continuer à développer d'autres programmes, comme l'ouverture d'une filière à destination des artistes de haut niveau “quand ils sont dans le monde entier, et qu'ils ont une vraie problématique pour suivre les cours“.

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