Quand des élèves de 5ème prennent la mafia pour modèle
Paru dans Scolaire, Justice le mercredi 28 janvier 2009.
Stefan Gouzouguec, professeur dans un collège « ambition réussite » d'Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) nous raconte sur le site Mediapart comment une petite « mafia » a pu voir le jour dans une classe de 5ème de son établissement.
Le parrain: un délégué de classe, « colosse handicapé d'un bras, capitaine de son équipe de foot, qui menace de tuer tout le monde lorsqu'on le provoque ». Les hommes de main: « deux des plus fidèles clients du bureau de la CPE et recordmen du nombre de rapports dans la classe ». Leur première mission: « aller brasser une petite peste bien gentille, juste la bousculer sans lui faire mal ». Réaction de l'établissement: la mise en place d'une commission anti-mafia, qui est parvenue assez rapidement à « tuer dans l'œuf » la petite organisation naissante.
Pour l'auteur de l'article, si ces élèves n'ont finalement rien fait d'autre que de structurer leur groupe autour de personnalités déjà fortes, il n'en reste pas moins que la mafia est devenu un modèle pour un nombre croissant de collégiens, qui rêvent plus de devenir des Tony Montana que des Zinédine Zidane. Résultat: « il est très difficile 'd'enquêter' sur les bêtises qu'ils commettent, car même les bons élèves respectent la loi du silence ». Mais surtout, ce genre de fascination prépare le terrain de la petite délinquance, où les plus grands payent « très cher » l'influence que Scarface aura pu avoir sur l'élaboration de leur projet professionnel.
D'où la nécessité, pour les enseignants, de faire avec leurs élèves un travail visant à « démystifier » la mafia, à partir des outils pédagogiques existants. Et pour le pouvoir politique, de ne pas entretenir le mythe en confrontant les collégiens à des pratiques qui relèvent de la lutte contre le crime organisé, comme les descentes anti-drogue dans les établissements.