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Justice des mineurs : l'exposé des motifs de la réforme, les arguments de l'opposition

Paru dans Justice le jeudi 26 novembre 2020.

La Commission des lois de l'Assemblée nationale examinera mardi 1er décembre le projet de loi de ratification de l'ordonnance n° 2019‑950 du 11 septembre 2019 "portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs". Selon l'exposé des motifs (ici), il s'agit d'abord de "remédier au manque de lisibilité" des dispositions de l’ordonnance de 1945 qui a été modifiée "à de nombreuses reprises depuis son adoption, perdant progressivement sa cohérence".

Le projet de code fixe à 13 ans l'âge au-delà duquel est établie "une présomption de discernement", il "simplifie la procédure pénale : " Le juge des enfants ou le tribunal pour enfants saisi statuera sur la culpabilité du mineur et ouvrira une période de mise à l’épreuve éducative avant le prononcé de la sanction", mais "il sera possible par exception (...) de statuer lors d’une audience unique sur la culpabilité et sur la sanction". De plus, "l’encadrement de la révocation du contrôle judiciaire et le raccourcissement des délais de jugement permettront de lutter contre l’augmentation de la détention provisoire des mineurs constatée ces dernières années".

Toujours selon l'exposé des motifs, "la prise en compte des victimes est améliorée" et elle pourra donc voir sa demande d’indemnisation tranchée "dans un délai de trois mois suivant la saisine de la juridiction" tandis que "l’action civile reste ouverte à l’encontre des personnes civilement responsables, quel que soit l’âge du mineur auteur de l’infraction". "Enfin, la justice restaurative, qui permet un rapprochement entre victimes et auteurs de l’infraction (...) devient un principe général de la justice pénale des mineurs."

C'est peu dire que Jean-Pierre Rosenczveig, ancien président du tribunal pour enfants de Bobigny n'est pas convaincu. Il prépare, avec Claire Brisset (ancienne Defenseure des enfants), Frédéric Jésu (ESPOIR), Guy Lecalonnec (protection de l'enfance), Bernard Defrance (philosophe), Véronique Chauveau (avocate), Jean-Louis Auduc (ancien directeur d'IUFM), Marc Brzegowy et Bernard Bobillot (PJJ) ainsi que Jean-Luc Rongé (président de DEI-France), un argumentaire dont ToutEduc a eu connaissance des principaux éléments.

Ils soulignent que la délinquance des mineurs baisse depuis cinq ans, et ils ne pensent pas que la justice dysfonctionne en ce qui les concerne. Elle est loin d'être laxiste, deux fois moins de classements sans suite que pour les adultes.

Autre illusion d'optique, sa supposée lenteur. En réalité, le jeune est fréquemment déféré devant un juge le lendemain de sa garde à vue, et il peut être immédiatement placé en détention provisoire ou en centre éducatif fermé. La Justice n'est pas davantage laxiste, puisque près de la moitié des décisions judiciaires sont d'ordre répressif. Elle est efficace puisque huit fois sur dix, un mineur qui a commis un délit et qui a été jugé et confié à la PJJ (protection judiciaire de la Jeunesse) n'est plus délinquant une fois majeur.

Le code dont la ratification est proposée au Parlement aurait d'autres motivations que celles de l'exposé des motifs. Il s'agirait de mettre fin à la double fonction des juges des enfants qui instruisent et sanctionnent. Mais l'instruction sera-t-elle alors confiée au parquet ? En réalité, il s'agit de juger plus rapidement et plus durement, de mettre plus souvent en détention ou dans des centres éducatifs fermés, sans s'attaquer aux réels problèmes d'enfants abandonnés à eux-mêmes faute, notamment, de moyens pour le soutien des familles.

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