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Quelle réponse à la violence des jeunes : punir ou éduquer ? (Véronique le Goaziou)

Paru dans Justice le mercredi 10 mai 2017.

"Alors que la violence des jeunes fait l’objet d’inquiétudes grandissantes (…), il convient de redire la force et l’efficacité de la pratique éducative et de la prévention" estime la sociologue Véronique le Goaziou dans un opuscule titré "La violence des jeunes : punir ou éduquer ?". Elle y dénonce la demande "souvent démagogique" de résultats en matière de travail éducatif et elle oppose le moment de la construction de l’Etat providence, quand chacun était "résolument convaincu que l’avenir ne pourrait être que meilleur" et "la montée de la précarité" avec les "systèmes de justice destinés aux mineurs délinquants (qui) vont atténuer la priorité donnée à l’éducatif". C'est ainsi que les termes de la question de la "responsabilité du jeune" ont changé  : la délinquance était jadis perçue comme l'illustration d’un équilibre rompu alors qu’elle serait plutôt aujourd’hui "le fruit d’un choix dont les auteurs doivent assumer les conséquences" : " Si chacun est responsable de sa trajectoire, alors la justice ne peut être qu’une mécanique punitive."

L’auteure répertorie trois types de violence juvénile. La délinquance d’exclusion et ses "agissements déviants (…) commis par des jeunes garçons (essentiellement) vivant dans des territoires où se concentrent des difficultés de tous ordres", "un illégalisme" qui leur permet "de trouver une place dans le monde social" ; la délinquance initiatique "intimement liée aux spécificités du passage adolescent" auparavant accompagné par la société à l’issue de la scolarité obligatoire ou encore du service militaire alors qu’aujourd’hui les actes "sont pratiqués en groupe, où le mimétisme est fort à l’occasion de pratiques d’expérimentations : prise de drogue ou d’alcools, vitesse automobile…". S’y ajoute une troisième délinquance, la délinquance pathologique, celle "d’adolescents qui ont mal grandi et ont subi des dysfonctionnements familiaux ou des atteintes psycho-affectives" : "les actes brutaux ou agressifs de ces jeunes sont compris comme la manifestation d’un profond mal être ou d’une détresse", actes parfois retournés contre eux-mêmes.

C’est cependant dans la troisième partie de l’ouvrage , celle consacrée aux réponses à apporter, que l’originalité du propos se montre avec  le plus d’évidence : "Nul ne peut ignorer - en réalité nul ne l’ignore y compris parmi les décideurs politiques et économiques -, qu’une des explications de la violence juvénile est le chômage d’une partie d’entre eux, leur manque d’utilité sociale et la perspective d’un avenir bouché" ; et plus loin au sujet du risque ainsi encouru par le travail éducatif  : "l’écoute, la rencontre, le regard bienveillant, l’insistance et la ténacité sont des conditions nécessaires à la socialisation des jeunes, mais ce ne sont pas des conditions suffisantes." La sociologue ajoute "lorsque l’éducatif se resserre sur le relationnel et se confine à l’affectif, il rate son objectif" et elle cite Fernand Deligny : "ce que nous pouvions vouloir pour les enfants et les jeunes en difficulté, c’était leur apprendre à vivre et non à se résigner ; les aider et pas seulement les aimer." Si face aux violences juvéniles, l’intervention policière et l’institution judiciaire "ont leur intérêt mais aussi leurs limites", elle estime nécessaire de "redonner confiance aux adultes et aux parents, ainsi qu’aux professionnels du social et de l’éducatif qui connaissent bien les jeunes, sont en lien avec eux et en place sur les territoires, et dont l’expertise pourrait ( de nouveau) venir éclairer et nourrir l’action publique".

"La violence des jeunes : punir ou éduquer ?", Virginie le Goaziou, 64 pages, coll. Temps d’arrêt/ Lectures, éditions Fabert, yapaka.be, 3,95 euros.

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