Jurisprudence

Rendez-vous de carrière : en cas de contestation, la CAP doit être saisie (CAA de Nantes, une analyse d'A. Legrand)

Paru dans Scolaire le dimanche 06 novembre 2022.

La notation administrative des fonctionnaires a longtemps occupé une place importante dans la gestion de la fonction publique. De plus en plus critiquée pour sa lourdeur et sa relative inefficacité, elle a progressivement cédé la place à de nouvelles pratiques inspirées de la gestion des entreprises privées. Elle a donc disparu à titre expérimental en 2007, puis définitivement à partir de 2016, cette disparition étant finalement consacrée par l’article 27 de la Loi n° 2019-828 de modernisation de la fonction publique, qui modifie les deux lois du 13 juillet 1983 et du 11 janvier 1984en remplaçant l’expression "l’évaluation, la notation" par les mots "l’appréciation de la valeur professionnelle". Désormais, selon la nouvelle formulation de l’article 17 de la loi de 1983, "la valeur professionnelle des fonctionnaires fait l'objet d'une appréciation qui se fonde sur une évaluation individuelle donnant lieu à un compte rendu qui leur est communiqué" et qui se fonde sur un entretien annuel conduit par le supérieur hiérarchique. L'agent peut apporter des observations au compte-rendu et il peut en demander la révision.

Trois des entretiens annuels présentent une importance particulière : ils sont réglementés par deux décrets des 1er février et 5 mai 2017 et ont lieu lorsque l’agent a atteint les 6ème, 8ème et 9ème échelons. A la suite des deux premiers, les agents peuvent, à la suite d’une inspection et de deux entretiens avec l’inspecteur et le chef d’établissement et sur la base d’une appréciation détaillée de leurs qualités et de leurs défauts professionnels, gagner un an sur la durée de l’échelon. S’agissant du troisième, il permet en outre de passer plus ou moins rapidement à la hors-classe. Le compte-rendu établi à la suite des entretiens se conclut par quatre avis possibles : "à consolider", "satisfaisant", "très satisfaisant" et "excellent".

C’est cette procédure qui était en cause dans un arrêt de la CAA de Nantes du 25 octobre 2022 ; un professeur agrégé classé au 9ème échelon avait obtenu une appréciation "très satisfaisant" à l’issue de son troisième rendez-vous de carrière. Estimant sans doute que cela ne lui garantissait pas un passage suffisamment rapide à la hors-classe, il avait utilisé la procédure prévue par les deux décrets de 2017 précités : demande gracieuse de révision de l’appréciation invoquant une ou plusieurs erreurs manifestes d’appréciation, puis, en cas de refus, saisine de la CAP qui peut demander ou non à l’autorité compétente de réviser son appréciation. Le TA peut être saisi en cas d’échec. En l’espèce, le ministre avait maintenu l’appréciation et le TA avait rejeté le recours présenté contre cette décision de maintien.

La séance de la CAP s’est apparemment mal passée et les représentants des personnels ont quitté la séance sans prendre position sur les demandes de révision. La Cour constate donc que le ministre a finalement maintenu l’appréciation sans que la CAP se soit prononcée sur la demande du professeur agrégé. Il y avait là une irrégularité à laquelle le ministre n’a apporté aucune explication dans la mesure où il n’a même pas invoqué le fait que c’était le départ des représentants du personnel qui avait empêché l’examen de la demande du requérant. La Cour, constatant que cette irrégularité a privé celui-ci d’une garantie, annule donc le jugement du TA et l’appréciation portée par le ministre et enjoint à celui-ci de reprendre l’examen de l’affaire après examen effectif de la demande par la CAP nationale.

André Legrand

 

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