E. Gentaz propose de supprimer le Conseil scientifique de l'Education nationale et de le remplacer par des conseils académiques (ANAE)
Paru dans Petite enfance, Scolaire, Périscolaire, Orientation le mardi 05 avril 2022.
"Un fonctionnement décentralisé et horizontal" favoriserait des "interactions vertueuses" entre les mondes de la recherche et de l’éducation. Il faudrait donc "remplacer le CSEN par la création dans chacune des 30 académies d’un conseil scientifique de l’éducation", estime Edouard Gentaz (U. de Genève, CNRS). Celui-ci signe l'éditorial du dernier numéro de la revue ANAE (approches neuropsychologiques des apprentissages chez l'enfant).
Ces conseils académiques envisageraient l'éducation "au sens large", ils seraient indépendants "structurellement et financièrement", ils réuniraient "enseignants, chercheurs, cadres, éducateurs, parents, etc., avec des mandats explicites, publics et limités dans le temps".
Le psychologue dénonce donc, implicitement, le fonctionnement du Conseil scientifique de l'Education nationale, créé par JM Blanquer et présidé par S. Dehaene. "Un fonctionnement hypercentralisé et vertical peut avoir des effets positifs pour répondre à des situations de crise, il a souvent des effets négatifs (...)." Il ajoute que "l’accessibilité aux débats et aux échanges de ces 30 conseils permettrait à tous les acteurs de mieux comprendre comment se discutent et s’effectuent les échanges entre les données issues de la recherche et celles issues de la pratique et partager ainsi les bonnes pratiques au niveau national".
Co-construction
Pour favoriser "des interactions vertueuses entre le monde de la recherche et le monde de l’éducation", le chercheur fait deux autres propositions. Il s'agit d'abord de "développer massivement" la formation des personnels via l'élaboration de "projets de recherche en sciences cognitives interventionnelles, associant les praticiens et les chercheurs". Leur co-construction permettrait "de créer un cercle vertueux entre les praticiens qui élaborent et testent sans cesse un grand nombre de techniques pédagogiques" et "les chercheurs qui s’efforcent (...) d’évaluer leurs effets".
Il faut aussi "aider les parents" de façon qu'ils aient "un regard éclairé sur le développement psychologique" de leur enfant et il est important de mettre à leur disposition "l’état des savoirs à travers tous les médias possibles (...). La création et l’instauration d’une préparation à la petite enfance et à la parentalité s’inscriraient dans la continuité des recommandations de l’OMS (2002) qui préconise d’aller au-delà des séances de préparation anténatales en proposant un accompagnement postnatal."
Le psychologue est bien conscient des freins à ces "interactions fructueuses" entre "les mondes de la recherche et de l’éducation" : Pour les uns, "il s’agit par exemple de produire des connaissances et de les diffuser via des revues scientifiques internationales, alors que pour les autres, il est question d’enseigner, d’éduquer et d’intégrer les connaissances nouvelles aux pratiques des professionnels de l’éducation (enseignants, éducateurs, animateurs, etc.)." Leurs objectifs et leurs contraintes spécifiques "peuvent faire obstacle" à ces interactions. Ils sont néanmoins "par essence complémentaires".
L'éditorial du n° 177 de l'ANAE ici