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"Pap Ndiaye dans la droite ligne de Jean-Michel Blanquer" (Guislaine David, SNUIPP-FSU)

Paru dans Scolaire le jeudi 12 janvier 2023.

"On a eu un moment d'espoir, mais avec ces circulaires, on voit que Pap Ndiaye se situe dans la droite ligne de Jean-Michel Blanquer", estime Guislaine David après la publication, ce 12 janvier au bulletin officiel des quatre notes de service sur la maternelle, les mathématiques, les savoirs fondamentaux et les conseils académiques des savoirs fondamentaux.

Guislaine David : C'est la même équipe qui est au travail, avec le souci de contrôler les pratiques des enseignants. Je suis dépitée et en colère. Nous avons rencontré le ministre, à sa demande, avant Noël,il était très attentif, il a pris des notes, c'était beaucoup mieux qu'avec son prédécesseur avec qui les échanges étaient beaucoup plus tendus, mais à aucun moment il ne nous a parlé de notes de service, de l'intervention de professeurs des écoles en 6ème, Edouard Geffray (le DGESCO, ndlr) nous a fait passer les projets de texte début janvier, au retour des vacances de Noël, nous demandant de lui faire passer nos remarques, ce que nous avons fait, il n'en a absolument pas tenu compte. Si le dialogue social n’est que de façade, nous arrêterons de donner notre avis.

ToutEduc : Quel est le principal reproche que vous pouvez adresser à ces textes ?

Guislaine David : Le projet implicite qu'ils révèlent est de passer au-dessus des programmes de 2015. Ces textes n'évoquent à aucun moment les autres disciplines que français et mathématiques, et sur ces disciplines, des pans entiers disparaissent, par exemple en mathématiques, il est très peu question des grandeurs, des mesures, de géométrie, des repères dans l'espace. En lecture, seule compte la fluence...

ToutEduc : ... il y a malgré tout un développement sur la compréhension.

Guislaine David : Certes, mais le paragraphe qui lui est consacré est beaucoup moins important que celui sur le décodage et la lecture. Ces injonctions sont même anti-pédagogiques. J'ai eu des élèves qui lisaient 90 mots à la minute et qui ne comprenaient rien à ce qu'ils lisaient. Les élèves doivent lire chaque semaine deux textes de 1000 mots, mais un enseignant ne compte pas les mots quand il choisit un thème de travail.

ToutEduc : Ces injonctions sont-elles déraisonnables ?

Guislaine David : C'est un grand délire. La DGESCO semble oublier qu'avec 30 élèves par classe, même si elles étaient sensées, ces injonctions ne peuvent pas être suivies. On a l'impression de lire une ordonnance avec la posologie, ou d'une liste de tâches, il faut cocher les cases et quand on a coché toutes les cases, on a fait son travail et les élèves réussissent. On mesure là le poids du "Conseil scientifique" pour qui la compréhension vient après le décodage, alors que tout le monde sait qu'il faut comprendre pour lire.

ToutEduc : A votre avis, quelle vision les auteurs de ces circulaires ont-ils de l'école, et pour l'école ?

Guislaine David : Leur vision de l'école est totalement hors-sol. Aucun n'est passé par l'enseignement dans le 1er degré et leur projet est celui d'une école qui donne le minimum. Ils ne citent jamais le socle commun de connaissances, de compétences et de culture, ils ont une vision étriquée des savoirs, alors que les élèves les plus défavorisés sont justement ceux qui ne pensent pas que l'école soit là pour leur donner plus que les "fondamentaux", qu'ils ont le droit de lui demander davantage.

ToutEduc : Mais la question des fondamentaux n'est-elle pas essentielle ? Le niveau ne baisse-t-il pas ?

Guislaine David : On fait dire ce qu'on veut aux évaluations. En orthographe, les élèves réussissent moins bien la dictée faite à des années d’écart. Mais les élèves d'aujourd'hui en savent bien plus que leurs aînés, en langues vivantes notamment, ils ont une ouverture sur le monde qui n'existait pas auparavant. Quant au niveau des élèves de 6ème, c'est celui d'enfants qui ont fait toute leur scolarité ces cinq dernières années, Jean-Michel Blanquer étant ministre mais également ceux qui ont traversé la crise Covid.

ToutEduc : Que pensez-vous des "Conseils académiques des savoirs fondamentaux", l'une des vraies nouveautés de ce plan ?

Guislaine David : Autant d'usines à gaz. Ils sont installés au niveau académique alors que le 1er degré est géré au niveau départemental, il n'est pas prévu que les formateurs ni les organisations syndicales y participent, mais des directeurs/directrices et des enseignant.e., triés sur le volet je suppose. Ce seront des outils de pilotage par les tests des pratiques pédagogiques. Les "mauvaises" écoles seront montrées du doigt.

ToutEduc : Comment pensez-vous que vont réagir les personnels ?

Guislaine David : Le discours ambiant exacerbe le mécontentement, chacun sent bien que le projet est de resserrer le contrôle sur les pratiques.

Propos recueillis par P. Bouchard, relus par G. David

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