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L'accueil collectif des jeunes enfants, “un secteur qui tend à être idéalisé, et dont on ne reconnaît ni la pénibilité ni les risques“ (IGAS)

Paru dans Petite enfance le mardi 11 avril 2023.

Dans les crèches, “les taux d’encadrement actuels ne permettent pas de travailler dans de bonnes conditions. Cette situation entraine une charge de travail très importante, génératrice de fatigue, de surmenage, parfois de maltraitance envers les enfants“, estime l'IGAS dans un rapport du mardi 11 avril faisant état de la qualité de l'accueil au sein des structures de petite enfance.

Avec pour conséquence, chez les professionnels, “une perte de sens face à l’impossibilité de prendre en charge les enfants dans de bonnes conditions et le souhait de ne pas poursuivre dans cette voie professionnelle“, tandis que, “in fine, les responsables de crèches sont confrontés à des difficultés de recrutement et à un turn-over important“.

Durant quatre mois, la mission a visité 36 établissements au sein de huit départements et a diffusé trois questionnaires au niveau national, afin notamment de “dresser des typologies du type de dysfonctionnements“ qui peuvent y survenir.

Elle indique ainsi que la qualité structurelle de l'accueil “n’est pas garantie“ alors que la qualité des processus et la prévention de la maltraitance en dépendent en grande partie. Par exemple, la taille des groupes d’enfants “n’est pas suffisamment prise en compte“ et des unités de vie visités peuvent accueillir “jusqu’à 25 enfants“, alors que “dans certains établissements, le groupe des nourrissons n’est en réalité séparé des autres enfants que par une barrière, ce qui conduit au fait que le nombre d’enfants présents dans une même pièce peut atteindre des chiffres encore supérieurs.“ Il y a encore l’adaptation du rythme de l’accueil au rythme et à l’âge de l’enfant qui “n’est pas interrogée“. A la différence de ce qui est constaté dans les politiques scolaires, peut-on lire, “l’amplitude horaire de l’accueil au niveau quotidien, hebdomadaire et annuel ne semble pas faire l’objet d’une réflexion spécifique dans la construction de la politique publique“.

La question des difficultés concernant les professionnels est une fois de plus soulignée, notamment à travers des exigences de qualification et de formation qui “tendent à s’assouplir“, ce qui est accentué par la pénurie de personnels, au regard des “plus de 10 000 ETP manquants au bon fonctionnement des EAJE actuels“.

De plus, les inspecteurs de l'IGAS constatent que les modalités actuelles de financement ne garantissent pas que les financements soient orientés vers la qualité de l’accueil. Ils estiment que le financement à l’activité “a mis sous tension les établissements“, que le désengagement des collectivités “fragilise le secteur et met sous tension le modèle des établissements associatifs“, ou que, “comme dans le secteur des personnes âgées, la régulation insuffisante du secteur marchand peut laisser prospérer des stratégies économiques préjudiciables à la qualité d’accueil“.

C'est pourquoi “la qualité des processus, constitutive de la bientraitance, dans les établissements d’accueil du jeune enfant est particulièrement hétérogène“, et le secteur présente des structures “de qualité très dégradée“. Et malgré des “avancées déterminantes dans la connaissance scientifique des besoins du jeune enfant“, ayant permis de faire “émerger un modèle d’éveil et d’éducation centré sur la singularité de l’enfant, et sur ses besoins affectifs, linguistiques, moteurs, etc..“, pour les inspecteurs généraux “la qualité d’accueil est restée un aspect secondaire de la politique d’accueil du jeune enfant“, la mise en œuvre effective de ce modèle connaissant “des variations très importantes selon les établissements“ en termes de qualité du bâti et de l’aménagement intérieur, de formation des professionnels, de leur capacité à répondre aux besoins des enfants, et conduisant “à de graves inégalités entre les territoires“.

C'est pourquoi, ajoutent-ils, “le risque de dérives et de maltraitance est insuffisamment considéré et maîtrisé“. En effet, ils estiment que “la dégradation de la qualité peut entraîner des carences dans la sécurisation affective et dans l’éveil des enfants, autant qu’un épuisement des professionnels, qui ne parviennent plus à accueillir les enfants dans les conditions requises.“

D'ailleurs, l'IGAS considère plus globalement que la question de la maltraitance au sein des établissements reste “trop peu interrogée, alors même que les zones de risque et les faits remontés sont identiques à ceux que l’on constate dans tout accueil de personnes vulnérables et dépendantes“. A été dressée une typologie de faits, classés majoritairement dans les catégories de “négligence“, “violence physique et psychologique“, ainsi que “forçage alimentaire“. Une catégorie spécifique distincte de la violence physique a été créée, en raison “d’un nombre important de témoignages“.

Y figurent par exemple, “des bains donnés en 2 min car plus le temps, des enfants oubliés sur les toilettes“, “parquer les enfants pour pouvoir faire le ménage“. "Il y a quelques mois un bébé a vomi à force de pleurer parce que personne n’était disponible pour répondre à ses pleurs“. Ainsi, l’accueil collectif des jeunes enfants, poursuit la mission, “est un secteur qui tend à être idéalisé, et dont on ne reconnaît ni la pénibilité ni les risques, au détriment des enfants comme des professionnels.“

Le rapport ici

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