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Les défaillances de la politique de santé scolaire (rapport, Assemblée nationale)

Paru dans Scolaire le mercredi 17 mai 2023.

“Si des moyens conséquents sont alloués chaque année à la politique de santé scolaire, celle-ci ne parvient pas à atteindre ses objectifs et à remplir ses missions. Cette sous-performance résulte à la fois d’un manque de personnels et d’un pilotage défaillant“, peut-on lire dans un récent rapport d'information de la commission des finances de l'assemblée nationale.

En effet, es moyens alloués à la politique de santé scolaire se sont élevés à 1,31 milliard d’euros en 2022, en progression de 5 % depuis 2018, mais sans que celle-ci parvienne "pour autant à atteindre ses objectifs“, constate leur rapporteur spécial de la mission Robin Reda (Les Républicains).

Sous-performance

Par exemple, les dépistages obligatoires “ne sont pas systématiquement réalisés“. Déjà, “il est difficile d’obtenir des données fiables sur le taux de réalisation de ces différents dépistages, dans la mesure où le ministère de l’éducation nationale n’organise pas la remontée statistique systématique de ces informations.“ Et d'ailleurs “dans la pratique, il est fréquent que les examens de santé des enfants aient ainsi déjà été réalisés par un pédiatre, un médecin de famille ou leur médecin traitant.“ Selon la Cour des comptes en 2018, “le taux de réalisation de la visite médicale de la sixième année a chuté de 8 points entre 2013 et 2018“, tandis que “la part des enfants dans leur sixième année qui ne bénéficient d’aucun examen par un professionnel de santé de l’éducation nationale, médecin ou infirmier, a plus que doublé en l’espace de cinq ans (58 % d’enfants non vus).“

De la même manière, “peu de données existent sur les actions d’éducation à la santé conduites dans les établissements scolaires“. Le rapporteur spécial regrette dès lors “l’absence de pilotage national“ de ces actions, “surtout lorsqu’elles impliquent de faire appel à des prestataires extérieurs à l'éducation nationale“. De plus, “l’intervention des personnels de santé scolaire, pourtant parfaitement compétents pour mener ce type d’actions“, n'est “pas un réflexe systématique dans tous les établissements.“

Manque de personnels

La cause de la “sous-performance de la politique de santé scolaire“ résulterait d’un manque de personnels. Une pénurie qui “n’est pas liée à un manque de moyens, mais à la difficulté du ministère de l’éducation nationale à pourvoir les postes ouverts. Ces difficultés de recrutement découlent notamment d’un manque d’attractivité des métiers de la santé scolaire, en raison d’une rémunération insuffisante et de conditions de travail dégradées.“

En ce qui concerne les médecins, les effectifs sont en diminution depuis plus de dix ans, et le corps des médecins de l’éducation nationale “est un corps vieillissant et la pyramide des âges est très défavorable au maintien des effectifs“. Quant au concours de recrutement, il permet au ministère de pourvoir environ la moitié du contingent de postes offerts chaque année. Par exemple, au concours 2021, 52 postes étaient ouverts et 28 candidats ont été admis, soit un taux de couverture de 53,8 %. Il est donc “certain que l’effectif des médecins scolaires va continuer à décroître dans les années à venir, en lien avec la démographie médicale nationale, défavorable pour les dix prochaines années.“ L’effectif des infirmiers de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur en activité s’est de même réduit entre 2017 et 2022. Aujourd’hui, l’augmentation des entrées dans le corps ne permet pas de compenser celle des détachements sortants et des départs en retraite. Le taux de rendement des concours, qui s’élevait à 100 % jusqu’en 2018, se dégrade tendanciellement. En 2022, il a manqué 58 candidats admis au concours pour 395 postes offerts. Enfin, l’effectif des psychologues de l’éducation nationale est en diminution depuis 2017 et le ministère “anticipe que le rendement du concours 2023 ne sera pas de 100 % en raison d’un nombre de candidats admissibles inférieur au nombre de postes offert.“

Au final, “la diminution progressive des effectifs des personnels de santé scolaire, et en particulier des médecins, conduit à des postes non pourvus dans certaines académies, à un taux d’encadrement qui se dégrade, et à une charge de travail de plus en plus importante pour les personnels. Dans ces conditions, il devient de plus en plus difficile de répondre aux besoins de tous les élèves.“

Rémunérations et conditions de travail

La question des rémunérations est également posée, celles-ci étant qualifiées d' “insatisfaisantes malgré les efforts réalisés par le ministère“. Le rapport indique que “les personnels de santé scolaire dont les grilles indiciaires sont propres au ministère de l’éducation nationale, sont moins bien rémunérés que d’autres personnels exerçant des missions similaires dans d’autres corps de la fonction publique.“

On notera que les infirmiers de l’éducation nationale, “qui ont pourtant largement participé à la gestion de la crise sanitaire dans les établissements scolaires, ressentent leur exclusion du champ des bénéficiaires du complément de traitement indiciaire (CTI, décidé en 2020 dans le cadre du Ségur de la santé) comme une véritable injustice." Par ailleurs, les modalités d’attribution d’une rémunération complémentaire aux infirmiers qui s’engagent dans l’accueil d’élèves en situation de handicap “ne permettent pas d’accompagner pleinement le développement de l’école inclusive, qui exige pourtant l’implication de l’ensemble des personnels des établissements scolaires.“

Locaux, tâches de secrétariat, remboursement des frais de déplacement... Au-delà des rémunérations, les conditions de travail sont pointées du doigt : “les personnels déplorent une charge de travail en constante augmentation, en lien avec la diminution subie des effectifs“. En parallèle, l’ampleur de leurs missions a également progressé, sans priorisation, de même que le nombre d’instances institutionnelles de coordination auxquelles ils doivent participer. Il en ressort une grande frustration, accompagnée du sentiment de ne pas être en capacité de bien faire son travail.

Pilotage

Est enfin critiqué le pilotage de la politique de santé scolaire, qualifié de “défaillant“ avec entre autre de grandes inégalités de fonctionnement sur le territoire, ou encore une “gestion en silo des différentes professions de santé scolaire“ (les psyEn sont rattachés au service de l’instruction publique et de l’action pédagogique, les médecins, infirmiers assistants sociaux relèvent du service de l’accompagnement des politiques éducatives au sein de la DGESCO). Sur ce point, si le travail en équipe existe dans la pratique, il reste “dépendant des relations interpersonnelles que peuvent entretenir les différents professionnels intervenant au sein d’un même établissement.“ Pour le rapporteur spécial, cela “traduit une organisation des services de santé scolaire basée sur les missions et compétences respectives des personnels, et non sur les besoins globaux des élèves en matière de santé“, conduisant “à une moindre sensibilisation des autorités départementales, académiques et centrales à la question de la santé scolaire.“

Le rapport ici

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