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Pédopsychiatrie : de l'Education nationale à la médecine de ville, une offre de soins “saturée“ (Cour des comptes)

Paru dans Scolaire le mercredi 22 mars 2023.

“Les psychologues de l’Éducation nationale, tout particulièrement du second degré, sont encore trop orientés vers des missions d’orientation scolaire qui les éloignent de la détection et de l’orientation des jeunes souffrant de troubles psychiques“, estime la Cour des comptes dans son rapport traitant de la pédopsychiatrie en France publié mardi 21 mars.

Alors qu'environ 1,6 million d’enfants et adolescents souffriraient d’un trouble psychique dans l'hexagone, les sages de la rue Cambon constatent que le rôle des différents professionnels dans l’organisation graduée des soins (prévention, accueil et orientation, prise en charge des troubles, coordination entre les différents acteurs du soin..), organisés en secteurs de premier niveau (soins de proximité) mais également de second niveau (prise en charge de troubles plus sévères), “n’est plus clair“.

Outre les Psy-En, il y a en effet les professionnels libéraux de ville (généralistes ou spécialistes) qui “méconnaissent encore trop les caractéristiques des troubles psychiques des enfants et des adolescents et ne jouent donc pas encore suffisamment leur rôle de porte d’entrée dans le parcours de soins.“ Il y a encore les pédopsychiatres, dont la démographie “est défavorable à court terme et ne leur permettra pas d’assurer leur rôle de recours de spécialité".

De cette situation découle une offre “saturée“, comme c'est le cas avec les 1 329 centres médico-psychologiques infanto-juvéniles (CMP-IJ). Pourtant considérés comme “pivots“ du secteur et porte d’entrée dans le parcours de soins, ils ont été “progressivement submergés par les demandes d’information, de conseil, d’évaluation et de suivi, allant des troubles légers à sévères“. Mais ceux-ci “ne parviennent pas à assurer en totalité leur mission de suivi des troubles psychiques les plus sévères“. C'est ainsi que près de 50 % de leur travail consiste “à recevoir, pour des séances d’évaluation et d’orientation, des patients qui ne bénéficient pas ensuite d’un suivi au long cours“, une mission d’accueil et d’évaluation qui “limite leur capacité à assurer le suivi dans le temps des enfants qui en ont le plus besoin.“

D'autant que l'offre de soins psychiques serait pour la Cour des comptes “inadaptée aux besoins de la jeunesse“, qui compte entre 750 000 et 850 000 enfants et adolescents bénéficiant annuellement de soins prodigués en pédopsychiatrie (sur les 14 millions d'enfants de moins de 18 ans comptabilisés en 2023, soit 21 % de la population, ndlr).

En cause, l’organisation des soins, en particulier dans les centres médico-psychologiques infanto-juvéniles, où “une partie des patients suivis ne souffrent que de troubles légers, au détriment de la prise en charge d’enfants souffrant de troubles plus sévères“. Faute de pouvoir estimer la sévérité des troubles, l'adéquation de l'offre de soins aux besoins dans les territoires “reste difficile à apprécier“.

Bien qu'elle se situe dans la moyenne des pays européens, la France se trouve marquée par de fortes inégalités territoriales en matière d’offre d’équipements (ambulatoires comme hospitaliers), tandis que “la crise de la démographie médicale, avec la diminution du nombre de pédopsychiatres de 34 % entre 2010 et 2022 rend encore plus difficile l’accès aux soins psychiques infanto-juvéniles.“

La Cour des comptes juge justement nécessaire de “revitaliser“ le secteur, “en améliorant l’efficacité du pilotage de la politique de l’offre de soins, tant en administration centrale que régionale“. Pour cela, il convient de renforcer l’attractivité des métiers de soins infanto-juvéniles, alors que “des carences perdurent dans l’offre de soins de pédopsychiatrie, sur les plans quantitatif et qualitatif“.

Concernant les médecins traitants de l’enfant, généralistes et pédiatres, il faudrait renforcer leur “formation initiale et continue en psychologie et psychiatrie infanto-juvénile, en particulier sur le plan du dépistage et de l’orientation". Les psychologues “doivent être mieux intégrés dans le parcours de santé“ et il conviendrait “de clarifier la fonction d’infirmiers de pratique avancée, en libéral comme en établissement".

Malgré une “volonté claire d’améliorer l’organisation de l’offre de soins psychiques infanto-juvéniles“, la gouvernance est qualifiée de “peu opérationnelle“, comme le montre le “manque de vision“ de l'administration régionale. La cour développe : “Si les ARS se sont dotées d’outils de concertation utiles concernant le partage de vues et d’expériences entre les acteurs locaux avec l’adoption des projets territoriaux de santé mentale (PTSM), leur mise en œuvre n’est pas objectivable. En effet, les leviers de pilotage des politiques d’accès aux soins de pédopsychiatrie sont encore trop récents et trop timides, comme le montre l’analyse des contrats territoriaux de santé mentale (CTSM).“

Les magistrats soulignent toutefois l’adoption de la feuille de route sur la santé mentale qui témoigne d'une “volonté de renforcer l’accès à l’offre de soins psychiques infanto-juvéniles depuis 2018“. Cependant, ajoutent-ils, celle-ci “ne se fixe pas d’objectifs clairs, tant en termes quantitatifs que qualitatifs, et ne prévoit pas de programmation calendaire pour sa mise en œuvre.“ Ils ajoutent que “son rôle et sa place doivent être plus affirmés“, son champ d’intervention, s’agissant de la pédopsychiatrie, “mieux identifié“. En outre, “dans les secteurs éducatifs, sanitaires et sociaux, il se doit d’être transversal. Son positionnement devrait être interministériel, afin de le doter d’une fonction de pilotage mieux identifiée, et d’améliorer ainsi l’efficacité du suivi de la politique de l’offre de soins de pédopsychiatrie.“

Le rapport ici

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