Sévère rappel à l'ordre du Défenseur des droits pour le traitement des mineurs isolés étrangers (MIE) à Paris... et ailleurs
Paru dans Justice le lundi 29 septembre 2014.
Le Défenseur des droits a adressé un sévère rappel à l’ordre à l’Aide sociale à l’enfance de la capitale en ce qui concerne le traitement des MIE, les mineurs isolés étrangers. Daté du 29 août, il a été rendu public par les organisations qui l’avaient saisi le 13 avril 2012. Il évoque "la situation dramatique des mineurs étrangers en danger en région parisienne. Jacques Toubon, s’il se dit "conscient du nouvel enjeu qui entoure l’application de la circulaire du 31 mai 2013 de la garde des sceaux" - qui a pour objet d’organiser une meilleure répartition des mineurs isolés étrangers sur l’ensemble du territoire -, multiplie ses critiques s’agissant de leur prise en charge à Paris. "Force est de constater que les mineurs isolés étrangers en errance sur le territoire parisien peinent à être pris en charge et ne bénéficient pas des mesures de protection et d’accompagnement prévues par la Convention internationale des droits de l’enfant." Il vise tout particulièrement la convention du département et de la PAOMIE (permanence d’accueil et d’orientation des mineurs isolés étrangers), un acteur associatif qui va au-delà de sa mission et écarte de son propre chef du bénéfice de la protection de l’enfance près de 50% des jeunes sur des bases souvent arbitraires.
Il a outrepassé ses attributions en portant des appréciations sur la validité des actes d’état civil présentés par les jeunes; fait une mauvaise appréciation du critère de l’isolement en écartant "du dispositif de protection de l’enfance des jeunes effectivement isolés […], indépendamment de leur situation de danger effectif"; laissé à la rue, sans aucune prise en charge, "pendant des mois, de nombreux jeunes de plus de 17 ans, dont la minorité n’était pas contestée"; porté "des jugements empreints de stéréotypes non pertinents pour la qualité de l’évaluation", et donc rejeté beaucoup de jeunes "à la tête du client"; placé des mineurs dans des conditions d’hébergement "parfois indignes et ne répondant pas aux critères exigibles pour des lieux accueillant des mineurs"; et négligé de fournir aux jeunes déclarés majeurs et donc ne bénéficiant pas d’une prise en charge, les informations nécessaires au respect de leurs droits.
Dans sa dernière livraison, le Journal du droit des jeunes (JDJ) qui publie un dossier "Mineurs étrangers, une discrimination notoire" évoque un conflit récurrent entre l’Etat et les départements, ces derniers renvoyant à l’Etat "la responsabilité du soutien à ces enfants étrangers considérant qu’il s’agit tout d’abord d’une question liée à l’immigration, avant d’admettre qu’il leur revient de prendre en charge leur protection que la décentralisation leur a confiée depuis près de trente ans". Au passage, il rappelle que "grâce à l’intervention du Défenseur des droits (à l’époque il s’agissait de Dominique Baudis, NDLR) des jeunes de 15 et 16 ans ont pu convaincre les juridictions administratives de l’authenticité de leurs documents d’état civil". Par ailleurs, le JDJ rappelle une recommandation de la Commission nationale de défense des droits de l’Homme selon laquelle "un mineur victime de traite et d’exploitation, en particulier lorsqu’il s’agit d’exploitation et de recours à la prostitution, doit être systématiquement considéré comme une victime" et a droit à être accompagné au cours de la procédure, ce qui ne paraît pas être toujours le cas du fait de nombre de "comportements déloyaux" à leur égard.
Le site du JDJ ici