Evaluation par contrat de confiance : un nouveau plaidoyer d'André Antibi
Paru dans Scolaire le mercredi 17 septembre 2014.
"L'évaluation par contrat de confiance" n'est pas une panacée. André Antibi est le premier à en convenir, elle "ne permet pas de résoudre tous les problèmes du système éducatif", mais elle "permet d'améliorer sensiblement la situation actuelle, de façon réaliste, sans demander un surcroît de travail à l'enseignant". C'est cette position que l'auteur de "La Constante macabre" défend dans son dernier livre, essentiellement consacré aux échanges qu'il a pu avoir avec ceux qui ont déjà mis en place l'EPCC, cette forme d'évaluation qui garantit aux élèves qu'aucun piège ne leur sera tendu le jour du contrôle, et qui témoignent de ses bienfaits, et avec ceux qui ne l'ont pas encore mise en place ou qui sont sceptiques, aux inquiétudes et aux objections desquels il répond.
Militant et pédagogue dans l'âme, ce mathématicien n'hésite pas à revenir par une voie et par une autre, aussi souvent qu'il le peut, sur les points essentiels : ce système ne supprime pas l'échec scolaire, mais il incite les élèves à travailler davantage, et il permet de restreindre l'absentéisme, ce qui, en quelque sorte mécaniquement, aboutit à une augmentation de leur niveau. L'évaluation par contrat de confiance concerne toutes les disciplines, y compris les disciplines artistiques, et tous les niveaux, jusqu'aux écoles d'ingénieur. Elle contribue à l'amélioration du climat scolaire, "les élèves sont plus sereins", mais elle permet aussi de déceler ceux "qui manquent de sérieux" et qui se sentent responsables de leur échec éventuel. En revanche, elle évite de rendre malheureux des élèves qui travaillent et dont les résultats seraient sinon faibles. Elle n'évite pas les hiérarchies, mais si le dernier de la classe a 10/20, il peut poursuivre sa scolarité, ce qui n'est pas le cas s'il a 2... Ce système enfin n'est pas "anti-notes" et André Antibi distingue les processus d'évaluation des signes. Des lettres peuvent avoir des effets aussi désastreux que des notes sur 20...
"La promesse du bonheur peut être bonheur en elle-même"
Autre enseignement de ce livre, l'EPCC est d'ores et déjà mise en pratique par "plusieurs dizaines de milliers de professeurs" et elle bénéficie du soutien de nombreux responsables du système éducatif, dont l'actuelle directrice générale de l'enseignement scolaire qui, lorsqu'elle était rectrice de Créteil, avait souligné deux autres avantages de la méthode : "beaucoup d'enseignants ont pris conscience de ce qu'ils véhiculent, à leur insu, comme attentes non dites (...) L'autre bénéfice est celui d'une amélioration réelle de la qualité de la relation école-parents." Mais André Antibi ne milite pas pour autant pour une révolution imposée "d'en haut" : "Toute réforme doit être proposée selon un processus évolutif."
Ce processus, s'il doit être accompagné de circulaires adressées aux enseignants, pourrait citer la préface que le journaliste et musicien Emmanuel Davidenkoff donne à l'opus : "Quelle plus belle métaphore que la musique pour convaincre qu'on peut être heureux en travaillant", car si tous les instrumentistes ont passé des "heures de gammes et d'arpèges, harassantes, répétitives", ils l'ont fait "avec la sensation anticipée du bonheur qui les attend", et "la promesse du bonheur peut être bonheur en elle-même".
"Pour des élèves heureux en travaillant, ou les bienfaits de l'évaluation par contrat de confiance", André Antibi, éditions Math'adore, 160 p., 15€