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La rentrée se fait dans "un climat de désillusion", estime le SNPDEN

Paru dans Scolaire le lundi 08 septembre 2014.

"Même cette toute petite chose de rien du tout", changer les noms des classes pour que tout le second degré n'apparaisse pas comme ayant pour seule fin la classe de terminale, "n'a pas été faite". Le SNPDEN porte un regard très sévère sur la gestion du changement par l'Education nationale. Pour le syndicat UNSA des personnels de direction, celle-ci n'a pas pris la mesure des contradictions dans lesquelles se trouve pris notre système scolaire. Une enquête menée auprès de ses adhérents, et à laquelle près de 3 000 établissements ont répondu, montre une rentrée qui n'est pas pire que d'habitude (les deux tiers des réponses), et certains (18 %) disent même qu'elle se présente "mieux que d'habitude". Cela n'empêche pas le syndicat d'être inquiet. "Il se passe des choses graves aujourd'hui", notamment en termes d'ethnicisation; les politiques évitent de regarder en face les questions communautaires alors qu'un millier de jeunes qui ont passé au moins 10 ans sur les bancs de l'Ecole de la République partent "faire le Djihad". Et Philippe Tournier, le secrétaire général du syndicat ajoute : "le projet scolaire est aujourd'hui en difficulté", comme en témoigne par ailleurs le mouvement des "journées de retrait de l'école"*, même s'il est marginal.

L'instabilité ministérielle, 183 ministres en 186 ans d'existence de ce ministère, n'est pas nouvelle, mais, même si la loi d'orientation reste, elle s'accompagne d'un changement de discours et de modification des priorités. Et pendant ce temps-là, à chaque fois que se pose un problème, les politiques renvoient au niveau local le soin de le régler. Ainsi des accompagnateurs de sorties scolaires, pour lesquels il revient aux chefs d'établissement de "se débrouiller". D'ailleurs les mécanismes mis en place avant 2012 continuent de jouer sur l'absence de mixité sociale et scolaire. "Le dossier n'est pas traité."

Une responsabilité transférée

N'est pas traitée non plus la question des stages des élèves de la voie professionnelle. Dans l'urgence a été pris l'année dernière un décret, doublé d'une circulaire, de façon à transposer une directive européenne qui datait d'une vingtaine d'années sans que rien n'ait été fait. Résultat, il appartient aux chefs d'établissement de s'assurer que les entreprises respectent la réglementation. La médecine scolaire doit examiner dans les huit jours qui suivent la rentrée tous les élèves mineurs qui doivent avoir une dérogation pour travailler avec des outils dangereux. L'un et l'autre sont impossibles à réaliser. Mais la responsabilité est de facto transférée aux personnels de direction qui ne veulent pas mettre les élèves en situation de ne pas pouvoir passer le bac faute de stages. La réforme de l'examen prévoit 22 semaines de formation en entreprise sur trois ans, mais n'ont pas prévues les difficultés qu'elle génère, par exemple lorsque la carte des formations ne correspond pas à la carte des entreprises, insuffisamment nombreuses pour répondre à la demande.

La "masterisation" a bouleversé le rapport aux métiers de l'enseignement, puisque le recrutement se fait "au niveau ingénieur", et donc sur un marché du travail beaucoup plus ouvert. De plus, la pénurie modifie les comportements. Tel contractuel, admissible au CAPES, ne se présente pas à l'oral : être reçu l'obligerait à accepter un poste dans une académie lointaine, pour un salaire médiocre, alors qu'il est assuré de retrouver un poste près de chez lui. On voit aussi des jeunes choisir l'enseignement "en attendant de trouver un emploi". Le rapport au métier a changé, note le SNPDEN qui relève que, le jour de la rentrée, "près d'un poste vacant sur cinq est dû à un stagiaire qui ne s'est pas présenté", sans qu'on sache pourquoi. Le syndicat fustige d'ailleurs l'attitude des jurys qui refusent de pourvoir tous les postes alors que les candidats, avec un master, ont fait la preuve de leur niveau académique. Les concours devraient davantage s'inquiéter de la capacité à enseigner, et Philippe Tournier considère que la crise "de" recrutement est en réalité une crise "du" recrutement, de "l'idéologie du recrutement".

Un système qui oblige à noter sur 20

Autre sujet d'inquiétude, le débat annoncé sur l'évaluation. Le syndicat constate que les enseignants utilisent un système de notation dans lequel "ils sont ligotés" puisque les systèmes d'affectation des élèves, Affelnet et APB demandent des classements, donc des notes sur 20. Le changement ne sera crédible "que si le ministère s'engage" et s'inscrit dans une réflexion plus globale sur la certification, sur le DNB (diplôme national du brevet, dont le SNPDEN demande la suppression) et sur le bac, qui ne remplit pas sa fonction de diplôme d'entrée dans l'enseignement supérieur.

Se pose aussi la question du socle commun, qui lie école élémentaire et collège, tandis que la réforme territoriale pourrait confier la gestion des collèges aux régions, et donc lier collèges et lycées. Faut-il d'ailleurs imaginer que de 130 interlocuteurs départementaux et régionaux, le second degré n'en ait plus que 13, dix fois moins nombreux, donc 10 fois plus puissants ? Le syndicat est attaché aux conventions tripartites, établissement - Etat - collectivité, mais constate que trop souvent, les recteurs cherchent à s'entendre avec les établissements pour un accord que la collectivité n'a plus qu'à parapher ... avant de payer ! Mais il dénonce aussi le caractère "jacobin" de quatre recteurs, qui "n'ont pas intégré" les nécessités du dialogue social, et n'ont pas respecté la dotation en moyens sans prévenir au préalable l'établissement. 

Cette absence de culture de gestion du changement n'empêche pas les changements. La procédure APB amène une évolution profonde des mentalités, puisque la question de l'orientation post-bac se pose très tôt, dès la classe de première, alors que, "il y a 15 ans, on pensait 'passe ton bac d'abord'. Mais APB est un produit collaboratif et non pas une création ministérielle", ajoute le syndicat. 

* Le mouvement déclenché pour protester contre les "ABCD de l'égalité" et la lutte contre les stéréotypes filles-garçons.

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