Accompagner les éditeurs pour lutter contre les stéréotypes sexistes dans les manuels scolaires (rapport sénatorial)
Paru dans Scolaire le jeudi 03 juillet 2014.
Accompagner les éditeurs scolaires dans leur volonté de renouveler les manuels existants à la lumière de l’exigence d’égalité est un impératif, affirme le rapport sénatorial "Lutter contre les stéréotypes sexistes dans les manuels scolaires : faire de l'école un creuset d'égalité", présenté par Roland Courteau (PS) hier 2 juillet. Le rapport, réalisé par la délégation aux droits des femmes, préconise cette mesure en ce "moment clé" : les programmes scolaires doivent être renouvelés dès la rentrée 2014 en maternelle, puis entre 2015 et 2017 à l’école élémentaire et au collège. Il faudra mettre en place une banque de ressources iconographiques publique, dans laquelle les maisons d’édition pourraient trouver des illustrations non stéréotypées, dont le ministère pourrait confier la charge au CNDP-CANOPÉ, Centre national de documentation pédagogique. "L’éditeur public doit donner l’exemple". Car les manuels sont "encore loin d'être exemplaires en terme de stéréotypes et de préjugés".
Dans les manuels d’histoire, de mathématiques et de français, analysés en 2010, 2011 et 2012, le rapport met en exergue "une sous -représentation très importante des femmes, qui résulte à la fois d'un déséquilibre numérique et de procédés d’invisibilisation" et "la persistance des stéréotypes sexués". Les domaines scientifiques, des arts et des sciences "demeurent aussi très masculins dans l'ensemble des manuels étudiés, les œuvres des femmes sont 25 fois moins nombreuses que celles des hommes".
Label de reconnaissance pour les maisons d’édition
Le rapport souhaite que soit élaboré un palmarès des manuels scolaires, sur des critères d’égalité. Il propose aussi que des experts sensibilisés à la question de l’égalité soient intégrés au sein des groupes de travail pilotés par le CSP, Conseil supérieur des programmes. La délégation demande au ministère de l’Éducation nationale d’attribuer "un label reconnaissant la démarche des maisons d’édition exemplaires, qui valoriserait les éléments de méthode et d’organisation mis en place par les éditeurs – par exemple, des comités de relecture".
Dans les ESPE, écoles supérieures du professorat et de l’éducation, il faudra "rendre les enseignements relatifs à l’égalité entre les sexes obligatoires dans toutes les disciplines mais aussi pour elles-mêmes, en créant des Unités d’enseignement spécifiques portées par des spécialistes de ces questions, avec un nombre d’heures et de crédits obligatoires dans le parcours des futur-e-s enseignant-e-s". Il faudra également faire en sorte que tous les concours de recrutement (agrégation, CAPES, CAPET, concours d’entrée aux Écoles normales supérieures…) intègrent la question de l’égalité entre les filles et les garçons. De même, les formateurs du second degré devraient être obligatoirement formés à ces questions.
Le rapport juge "essentielle" la formation des cadres de l’Éducation nationale (rectorats, inspecteurs et conseillers pédagogiques) aux questions de genre, qui pourrait être systématisée par le ministère au travers du comité de pilotage de la Convention interministérielle pour l'égalité entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes dans le système éducatif.
Généraliser les ABCD de l’égalité
Par ailleurs, la délégation souhaite "la poursuite de la mobilisation générale de la communauté éducative au service d’une école de l’égalité sur la base des ABCD de l’égalité, et demande donc leur généralisation à compter de la rentrée 2014, en vue de leur pérennisation". Benoît Hamon, le ministre de l’Education nationale, a annoncé en début de semaine l’abandon de ce dispositif et son remplacement par un plan d’action pour l’égalité (voir l’article de ToutEduc ici). "Si les outils et les objectifs affichés restent apparemment les mêmes, nous savons bien que le programme ne sera efficace que s'il est énergiquement piloté au plan national, si les séquences pédagogiques visant à la transmission aux élèves et la formation des professeurs bénéficient d'horaires dédiés obligatoires", a commenté Roland Courteau, lors de la présentation de ce rapport. Le Figaro relève que parmi les 36 membres de cette délégation des droits des femmes qui publie ce rapport, on dénombre 10 sénateurs de l’UMP : "c’est un soutien post-mortem (au dispositif ABCD de l’égalité) pour le moins surprenant" (ici).
L’intégralité du rapport sénatorial "Lutter contre les stéréotypes sexistes dans les manuels scolaires : faire de l'école un creuset d'égalité" (ici).