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Egalité filles-garçons : B Hamon "très fier de porter, au nom du gouvernement" la généralisation de cet enseignement

Paru dans Scolaire le lundi 30 juin 2014.

Benoît Hamon est "très fier de porter, au nom du gouvernement", un plan d'action pour l'égalité des filles et des garçons à l'école, mais "en recherchant la sérénité" et en abandonnant "l'étiquette", la "marque" des ABCD, déclare-t-il devant la presse ce 30 juin. Il se fonde sur le rapport "globalement" positif qui lui a été remis par l'Inspection générale de l'Education nationale. Ses 12 auteurs "non seulement" ne proposent pas "de renoncer au projet", mais au contraire "de l’amplifier". Ils n'en soulignent pas moins que cette expérimentation, et le trouble qu'elle a parfois suscité, posent des problèmes de fond. "Les professeur(e)s n’auraient jamais imaginé que des parents puissent voir l’école comme source de danger, jamais pensé qu’on puisse suspecter l’école – et eux en même temps – d’avoir un projet organisé qui les autoriserait à attenter à la pudeur des enfants, à violer leur intimité, à intervenir sur leur sexualité, à manipuler leur conscience. Ces 'journées de retrait' ont pu provoquer une salutaire prise de conscience : rien n’est jamais gagné, l’école n’a pas ou n’a plus de légitimité intrinsèque, les valeurs 's’usent' si on ne les revivifie pas régulièrement."

Ils relèvent aussi des problèmes de gouvernance, au niveau interministériel d'abord, puisque le ministère des Droits des femmes est apparu en pointe sur le sujet, ce qui a pu donner à penser que l'action était portée par les mouvements féministes. Au niveau académique ensuite, puisque cette opération "n’a pas eu un soutien institutionnel très visible au-delà de la phase de lancement". Au niveau des circonscriptions aussi, la mission pointe de nombreuses difficultés. Elle semble s'étonner de la diversité des "modalités de choix des écoles et des classes impliquées", écoles désignées par les inspectrices ou inspecteurs parce qu'elles étaient déjà engagées dans ce type d'action, ou au contraire, "parce qu’il existait des problèmes localement"...

Une documentation qui fait problèmes

Autre difficulté, "les ressources mises à disposition des formateurs et des équipes pédagogiques par un site dédié du réseau CANOPE sont de qualité variable", même si elles "ne méritent certainement pas les critiques exacerbées que l’on a pu lire ou entendre". D'ailleurs, les documents mis à disposition des enseignants sont parfois "incomplets", "inégaux", "inorganisés" et "les objectifs de cette vaste mise à disposition ne sont pas évidents : vise-t-on à instrumenter une autoformation en vue de la conduite de la classe ou à susciter et alimenter une curiosité personnelle, une culture sur le sujet, indépendamment de tout usage pratique ?"

En revanche, les formations "ont donné satisfaction". Les objectifs "ont été bien compris" : aider les enseignant(e)s à "prendre conscience de leurs attitudes liées aux préjugés et stéréotypes sexistes ; savoir repérer et analyser des situations scolaires productrices d’inégalités sexuées ; prendre en compte dans leurs pratiques pédagogiques une meilleure égalité de traitement ; savoir comment les stéréotypes sexistes se construisent chez les enseignants et chez les élèves et contribuer à leur déconstruction". Beaucoup "ont découvert des thématiques qu’ils n’avaient jamais travaillées". Ils ont pris conscience "de leurs attitudes, comportements, réflexes langagiers... Incrédules, (...) elles / ils n’ont en effet pas d’emblée admis qu’elles / ils n’étaient pas moins concerné(e)s que d’autres par des représentations stéréotypées inconscientes." Ce qui amène les rapporteurs à souligner les risques de la généralisation : "Il n’est pas sûr que dans une généralisation systématique, les mêmes équipes de formateurs avec le même programme ne se heurtent pas à davantage de résistances."

Pas de différences entre les cerveaux des filles et des garçons

Les inspecteurs soulignent aussi l'importance de "l’approche scientifique" des inégalités. Ils évoquent notamment les neurosciences et dénoncent "les mythes qui persistent" sur les différences entre le cerveau des filles et celui des garçons : "une des découvertes majeures de ces dernières décennies est l’existence d’une très grande plasticité cérébrale, et ce tout au long de la vie."

Le rapport propose "une analyse du phénomène de contestation marqué par les journées de retrait des élèves" dont "on ne peut minimiser la violence symbolique", notamment pour les enseignants "qui étaient engagé(e)s sans réelle conviction dans l’expérimentation". La mission invite l'institution à la prudence en matière de communication, elle souligne "la nécessité d’informer les parents", et "de mieux outiller les enseignants" qui ont été parfois "démunis pour répondre aux craintes des parents, non pas sur ce qui était réellement fait en classe, mais en faisant valoir 'ce que les enfants avaient à y gagner' selon les propos d’un directeur".

Ne pas renoncer, ne pas continuer

Au total, "un renoncement du ministère au projet de promotion de l’égalité entre les filles et les garçons serait à la fois un signe de faiblesse et un abandon. Cependant il n’est pas possible de continuer (...) comme si rien ne s’était passé." La mission d'inspection relève notamment que la dénomination "ABCD de l’égalité" tend à faire croire "qu’il s’agit d’un projet d’instruction qui s’ajouterait au programme de l’école" alors qu'il s'inscrit dans le socle commun de 2008 pour l’école primaire. Elle "préconise donc de préciser la commande faite au conseil supérieur des programmes à propos de l’élaboration du programme de l’enseignement moral et civique et, plus largement, des programmes de l’école primaire". Elle estime de plus qu' "au niveau national comme au niveau local, on doit se soucier de l’information des parents en vue de gagner leur adhésion" et "de dire clairement le projet avec des mots qui soient les moins ambigus possibles". Il conviendrait de plus "de réfléchir à la manière dont pourrait être concrétisée la suggestion de la PEEP (fédération des parents d’élèves de l’école publique) de créer un 'comité d’éthique' pour que les problèmes éducatifs épineux soient discutés avant décision".

Dans un communiqué publié ce matin, le ministère annonce que "la formation à l’égalité filles-garçons pour les enseignants sera généralisée", dans le cadre du tronc commun des ESPE pour leur formation initiale et dans un module spécifique pour les futurs cadres. Ce sera de plus "une priorité du plan national de formation 2015 et des plans académiques et départementaux de formation" dans le cadre de leur formation continue. Par ailleurs, "une mallette pédagogique sera mise à disposition [sur internet, ndlr] des enseignants, regroupant des ressources et des nouveaux outils pour les aider à mettre en place" des "séquences pédagogiques enrichies" en histoire, géographie, éducation civique, éducation physique et sportive.... Un nouveau site Internet sera mis en place "pour rassembler de nouveaux documents et outils pédagogiques à destination des enseignants" tandis que "les établissements scolaires seront invités à inscrire l’égalité entre les filles et les garçons à l’école dans leurs projets d’établissements, adoptés en Conseil d’école ou d’établissement", ce qui constituera "une occasion d’impliquer les parents et de leur faire partager ce projet éducatif".

Le plan d'action et le rapport sont téléchargeables sur le site du ministère, ici et ici

 

 

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