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La décision du Conseil d'Etat sur les sanctions : le décryptage d'André Legrand

Paru dans Scolaire, Justice le mardi 10 juin 2014.

André Legrand analyse pour ToutEduc la décision du Conseil d'Etat qui a rejeté le recours émanant de la FCPE (Fédération des conseils de parents d’élèves des écoles publiques) et de l’UNL (Union nationale lycéenne) contre le décret relatif à la discipline dans les établissements d’enseignement du second degré. Celle-ci intervient juste après la publication d'une circulaire sur les punitions et sanctions et apporte des précisions importantes. Pour l'ancien recteur, professeur de droit public, la Haute assemblée répond à deux questions précises.

Est-ce que le principe d'opportunité des poursuites, c'est-à-dire le droit pour une autorité de ne pas poursuivre un acte répréhensible, s'applique en matière disciplinaire ? La réponse est en principe OUI, mais, dit le Conseil, ce principe n'interdit pas à un texte réglementaire de décider que, dans certains cas, l'autorité DEVRA poursuivre : c'est ce que fait le décret de 2011, en prévoyant deux cas où les chefs d'établissements ont une obligation d'engager des poursuites disciplinaires. Le Conseil précise que cette obligation doit se concilier avec les autres intérêts généraux dont les chefs d'établissement ont la charge, notamment dans les nécessités de l'ordre public. Si, par exemple, le fait d'engager les poursuites risque de déclencher une émeute dans l'établissement, le chef d'établissement, malgré le décret qui l'y oblige,  aura quand même le droit de se poser la question et, le cas échéant, de reculer.

Deuxième question, est-ce que le principe de légalité des délits, qui s'applique en matière pénale, s'applique aussi en matière disciplinaire ? Dans cette matière, le juge a toujours distingué entre le principe de légalité des peines (l'impossibilité de prononcer une sanction non prévue par un texte préalable), qui s'applique, et le principe de légalité des délits qui ne s'applique pas. Autrement dit, il n'est pas nécessaire qu'existe une liste, préalablement établie, d'infractions punissables; en matière disciplinaire, tout acte portant atteinte à l'institution est susceptible d'être sanctionné. Dans la décision du 6 juin, le Conseil d'Etat ne dit pas explicitement s'il maintient cette position; il a l'habitude de ne pas répondre à des questions auxquelles il peut éviter de répondre. Mais il dit simplement que les dispositions de la CEDH (Concention européenne des droits de l'Homme) invoquées par les requérants ne valent que pour la matière pénale et ne s'appliquent pas à la matière disciplinaire. Il confirme donc une position traditionnelle qui fait de la matière disciplinaire un domaine qui n'est pas entièrement assimilable à la matière pénale et qui garde une certaine spécificité. On peut donc penser que la jurisprudence traditionnelle est maintenue et que le principe de légalité des délits ne s'applique toujours pas en matière disciplinaire.

Cela n'interdit pas que s'y appliquent quand même nombre de principes identiques à ceux que l'on rencontre en matière pénale, comme le principe de légalité des peines, le principe de proportionnalité ou les droits de la défense.

 

avec André Legrand

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