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Permettre aux jeunes d'inventer leur monde, l'ambition de Denis Meuret ("Pour une école qui aime le monde")

Paru dans Scolaire, Culture, Orientation le jeudi 06 février 2014.
Mots clés : France, Québec, colloque d'Amiens, rapport Parent

Dans un ouvrage sous-titré "les leçons d'une comparaison France-Québec (1960-2012)", Denis Meuret, professeur des sciences de l'éducation à l'université de Bourgogne, invite à considérer les deux "Modèles politiques d'éducation (MPE)" avec côté Québec un récit global et positif sur l'école et son rôle dans la société moderne, initié par le rapport Parent de 1963 et côté France, avec le volloque d'Amiens de 1968 "un récit moins ample et beaucoup plus ambivalent, même si dans les deux cas, on réclamait une école moins rigide et plus ouverte".

Pour l'auteur, le gouvernement de l'école prend appui sur un MPE car "malgré les apparences l'école doit être justifiée, vis a vis de l'Etat, des élèves et de ses personnels". Cette justification suppose "une conception de l'enfant, de son développement, des modalités de son insertion dans la société, du rôle social et politique de l'éducation, cohérentes entre elles...", ce qui renverrait "en France à l'idée rousseauiste de fonder la nation pour le gouvernement, aux Etats-Unis [entendre ici aussi Canada-Québec, ndlr] à la démocratie et l'idée lockéenne d'un gouvernement au service d'un ordre social qui lui préexiste".

Un récit québécois

Il s'en suit au cours des chapitres qui décrivent les évolutions opérées au cours des cinquante dernières années par les deux écoles, une période "qui est au modernisme" : "le progrès implique une nouvelle forme d'école et d'éducation plus ouverte moins rigide". Le "récit" québécois a plutôt réussi, les enjeux ont été pris en compte à la fois par les gouvernements et l'opinion publique. Ce qui fait bifurquer et diverger les deux modèles aux objectifs pourtant voisins? Un pragmatisme qui répond à chaque fois par des solutions (les programmes d'études, les services éducatifs,...) à des effervescences sociales alors que la France s'en serait tenue à des rapports et des commissions (de qualité) sans relais dans l'opinion.

Après une comparaison très détaillée des deux systèmes éducatifs contenant des témoignages et des appréciations subjectives explicites, l'auteur livre en fin d'ouvrage une sorte de bilan des deux MPE. "La comparaison avec le rapport Parent nous a aidés à comprendre les raisons de cet échec [du colloque d'Amiens, ndlr]: une conception moins unifiée du monde, moins optimiste et moins ample de ses évolutions" et subséquemment une "ambivalence vis-à-vis de l'économie", "de l'ouverture de l'école au plus grand nombre certes nécessaire mais également menaçante" et un retour sur "une argumentation qui semble s'adresser à un pouvoir politique réticent et ignorer un public plus prêt que jamais à entendre ces thèses".

Aux élèves d'inventer le monde de demain

Les interrogations sur les possibilités de réforme sont donc au coeur de ce livre. Elles portent aussi sur la possibilité d'écriture d'un récit nouveau, un nouveau MPE car l'image de la société telle qu'elle s'est construite depuis un siècle se défaisant, l'école en France conçue comme le lieu "de production de l'identité nationale (...) s'éloignerait de plus en plus du modèle, y compris d'ailleurs dans les modes d'apprentissage (...) au risque d'une catastrophe [qui] générerait un recours plus massif encore qu'aujourd'hui à l'enseignement catholique ou au soutien scolaire privé".

En conclusion, Denis Meuret pense qu'il revient désormais aux élèves de ne pas laisser à l'administration ou au politique la construction d'un nouveau MPE en droite ligne du modèle durkheimien qui sépare ceux qui font évoluer le monde et ceux à qui on demandera de ne rien faire qui puisse le détruire, avec son corollaire, "une autorité des maîtres fondée sur leur position d'intermédiaires entre la société et l'élève (...) Il y a plusieurs façons de présenter le monde aux nouveaux venus et certaines sont plus susceptibles que d'autres de leur permettre d'inventer leur propre monde. Il faut les trouver", ajoute t-il en guise de conclusion.

Pour une école qui aime le monde, Denis Meuret, Presses universitaires de Rennes ( avec le soutien de l'IREDU de l'université de Bourgogne ), prix 16 euros.

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