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Ecole : la confiance est-elle au rendez-vous ? (échos du colloque d'Education & Devenir)

Paru dans Scolaire, Périscolaire le samedi 25 janvier 2014.

Faire confiance, c'est "avoir foi ensemble" et la confiance est nécessaire "à l'égard des élèves", "entre les adultes", "entre l'école et son environnement", estime Vincent Peillon. Le ministre de l'Education nationale a ouvert hier 24 janvier "virtuellement", avec une vidéo, le colloque d'Education & Devenir, une association dont le travail lui est "indispensable", et qui avait choisi pour thème de son 30ème anniversaire : "faire confiance, une nécessité pour l'école et ses acteurs". Voici des échos de cette première journée, consacrée à "la fabrique de la défiance". Marie-Claude Cortial, la présidente de cette association qui réunit quelques enseignants et CPE, mais davantage de personnels de direction, constate en effet que notre école "n'est pas construite sur la confiance".

Pourtant, estime Philippe Joutard, historien et ancien recteur, les pères fondateurs de notre école républicaine la voulaient toute autre que ne le croient les nostalgiques d'un ordre ancien. Jules Ferry refusait une "froide succession de leçons" et il demandait que les élèves interviennent en classe. Les instructions de 1923 insistaient pour que les élèves expérimentent eux-mêmes, et qu'ils "collaborent à la préparation des leçons". Le Tour de France de deux enfants nous montre une école beaucoup plus diverse qu'on ne le croit.

Chercher les causes dans notre culture

Ce n'est donc pas dans l'histoire de notre système scolaire qu'il faut rechercher les causes de cette défiance, mais dans la culture nationale, marquée par le catholicisme, et par le concile de Trente pour qui "la confiance en soi est une forme d'orgueil", alors que les protestants font confiance aux individus capables d'accéder par eux-mêmes aux textes saints. Heureusement, nos systèmes de production évoluent, le numérique "nous oblige à mettre la confiance au coeur", et l'Ecole elle-même change. D'ailleurs, "nous n'avons pas d'autre choix que de faire le pari de l'éducabilité de notre système scolaire, comme nous faisons celui de l'éducabilité des élèves". Et Philippe Joutard se situe dans une "non désespérance".

Choukri Ben Ayed (université de Limoges), décrit pourtant une institution hantée par la défiance et, même s'il ne prononce pas le mot, les mensonges et faux-semblants, qu'il s'agisse des relations des familles et des établissements, des parents délégués qui acceptent de laisser leurs enfants dans un collège mal coté à la condition qu'ils soient dans une "classe ségrégative", ou des relations de l'administration avec les collectivités. Les inspections académiques refusent de transmettre aux collectivités les données sur les dérogations dont elles ont besoin pour établir la carte scolaire... Leurs rapports sont régis par "le droit coutumier" plutôt que par la loi.

La défiance à l'égard de la recherche

Le chercheur évoque aussi ses relations avec l'institution. Alors qu'il a une lettre de mission signée du ministre, un recteur peut lui refuser l'accès aux établissements ou à la documentation dont il a besoin pour remplir sa mission. Lorsqu'il faisait sa thèse sur l'enseignement privé, les statistiques étaient "secret défense". Quand un de ses collègues travaille sur les discriminations au sein de l'Education nationale, un inspecteur s'interpose et s'écrie : "il y a des mots qu'on ne prononce pas !". On soupçonne systématiquement les chercheurs "de jeter de l'huile sur le feu". Et lorsque l'Ecole met en place un dispositif spécifique dans un quartier populaire, avec un comité de pilotage, Choukri Ben Ayed s'aperçoit qu'il y a deux comités de pilotage, l'un présidé par un responsable "Education nationale" et un autre présidé par un élu, quand il n'y en a pas un troisième au rectorat...

Claude Azéma, auteure du rapport du Conseil économique, social et environnemental sur la réussite scolaire, évoque pour sa part la défiance que génèrent les politiques quand les lois ne sont pas suivies d'effet, quand les mesures annoncées, par exemple l'heure de concertation inscrite par François Bayrou dans son "nouveau contrat pour l'école", n'est pas budgétée. Et elle fait, après Denis Meuret, le constat que dans les années 60, alors que ni le Québec ni la France n'étaient contents de leur école, les Canadiens ont rédigé un réel projet de société dans lequel l'école avait toute sa part, tandis que notre école, après le fameux colloque d'Amiens de 1968, a cherché à réagir aux changements, se situant donc dans une position de réaction à l'égard de la société en mouvement.

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