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Quelle est la valeur des diplômes de l'Education nationale en termes d'emploi ? (interview)

Paru dans Scolaire, Orientation le jeudi 19 décembre 2013.

Depuis 2005, nous assistons à une baisse de la reconnaissance de la valeur des diplômes dans les conventions collectives. C'est ce qui ressort d'une étude commandée par l'Education nationale (la DGESCO) qui voulait faire le point sur la valeur d'échange de ce qu'elle produit. Pascal Caillaud (CNRS) qui en est l'un des auteurs, avec Nathalie Quintero et Fred Séchaud du CEREQ, répond à nos questions.

ToutEduc : Votre étude porte sur la reconnaissance des diplômes, mais vous parlez aussi bien des niveaux de qualification. Est-ce à dire que les deux sont équivalents ?

Pascal Caillaud : En droit du travail, c'est l'emploi qui détermine la rémunération, pas le diplôme. Toutefois, ce que montre notre étude, c'est que la grande majorité des conventions collectives définit pour chaque emploi un niveau de connaissances requis, et le plus souvent par référence à un diplôme ou à un niveau de l'Education nationale : V pour le CAP, IV pour le bac... La qualification conventionnelle du travail n'est juridiquement pas liée au diplôme, mais 90 % des branches utilisent les diplômes ou les niveaux EN comme mètre-étalon. Cela ne signifie pas que tel emploi exige la possession d'un diplôme. Dans les classifications, les partenaire sociaux ne peuvent d'ailleurs conditionner l'exercice d'un emploi à cette possession : seul l'Etat peut réglementer une profession. Mais les diplômes ou les niveaux déterminent un niveau de connaissances "requises". Ainsi, un jeune qui, à l'issue de sa formation, échoue à l'examen du CAP peut être embauché sur un emploi de "niveau CAP" si l'employeur estime qu'il a les connaissances pour cela.

ToutEduc : Votre étude conclut à une recul des diplômes, qui "perdent du terrain au profit des niveaux de formation"...

Pascal Caillaud : Les partenaires sociaux perçoivent toujours le diplôme comme un élément déterminant dans le classement des emplois. Mais, parmi les branches qui ont renégocié leur convention collective entre 2005 et 2010, 18 % ne citent aucun diplôme ou niveau, contre 8% pour l'ensemble des conventions étudiées, et qui couvrent 80 % des salariés du secteur privé. Nous assistons donc à un recul du diplôme, notamment au profit des CQP (les certificats de qualification professionnelle des partenaires sociaux, présents dans 37% des classifications analysées), même si la référence aux niveaux de formation dans les conventions collectives reste, implicitement ou explicitement, importante.

ToutEduc : Iriez-vous jusqu'à dire que les recrutements se font sans référence aux diplômes ?

Pascal Caillaud : Dans le cas des "surqualifications", certaines conventions collectives accordent aux diplômés des garanties de classement minimal à l'embauche (que l'on trouve aussi sous le nom de "seuils d'accueils"). Par exemple, un titulaire d'un BTS embauché sur un emploi normalement destiné à un "bac pro", peut se voir accorder une rémunération intermédiaire entre celle normalement prévue pour l'emploi qu'il occupe et celle de l'emploi correspondant à son diplôme. Ces conventions prévoient ainsi des évolutions de salaire plus favorables, 6 mois puis 18 mois après son embauche. Mais, dans le cas de la formation continue, quand un salarié demande un congé individuel de formation, par exemple, et revient avec un diplôme, certaines conventions ne prévoient qu'une prime ponctuelle sans que son emploi ou son salaire lui-même en soit modifié. Sauf si cela était prévu avant le départ en formation avec son employeur : la reconnaissance des formations continues est aujourd'hui majoritairement renvoyée à la négociation individuelle au détriment de la négociation collective.

ToutEduc : L'Education nationale vous a commandé cette étude, l'a publiée, mais n'en a pas fait la publicité. Comment le comprenez-vous ?

Pascal Caillaud : Votre sollicitation montre que cette étude essaime quand même. Cela dit, c'est la première fois qu'une telle étude est financée par l'Education nationale. Les études antérieures sur le même thème avaient été demandées par le ministère du Travail. 

"Quelle reconnaissance conventionnelle des diplômes dans les relations formation emploi?", P. Caillaud, Nathalie Quintero, Fred Séchaud, CPC études 2013 n° 2, bureau des diplômes professionnels, septembre 2013

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