Métiers de l'éducation : comment l'ancienne DRH du ministère voit leur évolution (J. Théophile sur Aide aux profs)
Paru dans Scolaire le mercredi 27 novembre 2013.
Josette Théophile, ancienne DGRH de l'Education nationale, dénonce "notre conception théorique du service public prompte à habiller en 'égalité de traitement' la difficulté d’apporter des réponses adaptées à des problèmes différents". Elle le dit dans un entretien publié par le site "Aide aux profs". Chargée de réformer la gestion des ressources humaines par Luc Chatel en 2009, et "remerciée" par Vincent Peillon, elle estime pourtant que son départ "n’est pas lié à l’alternance politique, mais plutôt à la querelle entre les partisans de l’immobilisme et ceux de l’évolution, qui se répartissent agréablement de gauche et de droite…" Elle évoque aussi le plaisir qu'elle a eu à travailler avec "une équipe centrale compétente et dans sa grande majorité favorable à la mise en place d’une GRH personnalisée…"
Elle donne son point de vue sur ce que peut faire, et ce que devrait faire, le ministre actuel : "Il est possible de négocier avec les organisations syndicales un accord global" et non pas "corps par corps" sur l’évolution des métiers d’enseignant. Pour elle, le temps de travail des enseignants doit se gérer "autrement, par exemple avec des fourchettes par type de missions sur un calendrier qui peut être trimestriel ou annuel", la gestion des emplois du temps relevant "de chaque établissement (...) dans le respect des fourchettes fixées par l’accord national".
Des managers de terrain
Elle ajoute qu'il conviendrait de "responsabiliser l’encadrement sur la gestion de ses équipes" et de "régionaliser et diversifier le recrutement". En effet "traiter chaque personne à part entière, de manière globale et pour tout son parcours… cela n’est pas possible à distance. C’est le rôle du manager de terrain." Il faut donc, estime-t-elle, mettre fin à "l'émiettement" de la gestion des ressources humaines : "le 110 [le ministère] décide de l’avancement et de l’affectation, l’académie de la mobilité et des risques professionnels, les IPR et les services se disputent la formation, les établissements de l’emploi du temps..."
Cette gestion au plus près suppose aussi qu'on évite "de ne destiner l’accompagnement qu’aux seuls agents en difficulté", car "c’est la meilleure manière d’inciter ceux qui sont sans problème à se mettre dans la difficulté". Et la diversification des parcours professionnels implique de "supprimer les concours internes, sauts d’obstacle successifs et les remplacer par un accès souple, par VAE ou mise en fonction, pour accéder aux emplois d’encadrement, d’inspection ou de gestion. Même fluidité avec le Supérieur, notamment pour les agrégés." Pour plus de souplesse, elle évoque aussi, mais très rapidement, la bi ou la polyvalence des enseignants du second degré.
Sans qu'elle le rappelle dans cet entretien, Josette Théophile est venue de la RATP et elle a connu un choc culturel en arrivant à l'Education nationale qu'elle voit comme "un monde clos, légèrement xénophobe, et collectivement autiste", et qui fonctionne de manière autarcique. Elle le décrit comme un "système de plaques tectoniques", d'où "l'ampleur que revêt maintenant tout changement". Mais elle donne aussi un coup de griffe à "ceux qui ont attendu le lendemain de leur défaite pour parapher le projet de décret sur l’évaluation des enseignants [et qui] n’ont guère manifesté l’envie de soutenir les actions de changement".
L'entretien sur le site d'Aide aux profs, ici