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"Le statut de mère doit l’emporter sur celui de personne détenue" (contrôleur général des prisons)

Paru dans Petite enfance, Périscolaire, Justice le mercredi 04 septembre 2013.
Mots clés : justice, parentalité, prison, droits de l'enfant

"Rien n'a été fait depuis deux ans" alors que le respect des droits de l'enfant s'impose aussi à l'administration pénitentiaire. Dans un avis consacré aux jeunes enfants en prison et à leurs mères détenues, paru le 3 septembre au Journal officiel, le contrôleur général des lieux de privation de liberté, Jean-Marie Delarue, rappelle que "tout doit être fait pour éviter l’incarcération des femmes avec enfants". Selon lui, les situations inacceptables qui dérogent à la Convention relative aux droits de l'enfant "sont plus nombreuses qu’on ne pense", malgré le recommandations qu'il avait formulées dans son rapport annuel pour l’année 2010. "Aucune évolution en la matière n’est intervenue depuis plus de deux ans", regrette-t-il arès avoir visité 26 des 29 établissements pénitentiaires comportant un "quartier" de femmes. "Les magistrats doivent être sensibilisés à l’application de l’article 3 de la Convention, selon lequel 'l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale'."

En 2010, J.-M. Delarue demandait aux pouvoirs publics de reconnaître "l'impossibilité" d'incarcérer les mères "accompagnées de très jeunes enfants". Il plaidait pour "un aménagement de peine" ou, "à tout le moins, une suspension de peine pour motif de maternité". Dans son avis du 3 septembre, le contrôleur général ajoute une solution supplémentaire, "l'accès à une liberté conditionnelle".

Actuellement, la loi française autorise seulement les mères placées en détention à être emprisonnées avec leurs enfants, à condition qu'ils n'aient pas plus de 18 mois. Pour le contrôleur des privations de liberté, cette solution n'est pas satisfaisante : elle revient à "associer les enfants à la privation de liberté. Or, comme le stipulent les droits de l'enfant, le recours à l’emprisonnement d’un enfant doit n’être qu’une "mesure de dernier ressort".

Liberté de mouvement

Lorsque l’incarcération n’a pu être évitée, J.-M. Delarue demande aux pouvoirs publics de "veiller au respect de leurs propres prescriptions". Les 26 établissements pénitentiaires comportant un "quartier" de femmes qu'il a visités comportent 1 794 places, dont 76 (4,3%) sont réservées aux femmes accompagnées d’un enfant. Dans de nombeux cas, l'aménagement de ces cellules n'est pas réglementaire. Leur superficie est souvent inférieure aux 15 m² fixés comme minimum légal, ce qui empêche la mère et l'enfant de bénéficier de deux espaces distincts.

Dans les espaces "mère-enfant" des prisons, l'intérêt de l'enfant doit passer avant certaines précautions de sécurité. "Les obligations qui s’imposent aux pouvoirs publics peuvent être antagoniques des règles de la détention, mais en cas de conflit entre les normes de sécurité et celles requises par la mère et l’enfant, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale et le statut de mère doit l’emporter sur celui de personne détenue", estime J.-M. Delarue.

La mère doit ainsi bénéficier "d'une relative liberté de mouvement (avec mise à disposition d’une clé de cellule)" au sein des quartiers mère-enfant, afin qu'elle puisse "effectuer de manière autonome ses responsabilités" parentales et donner à son enfant "les principes d'éducation qu'elle souhaite". Afin de l'assister dans cette tâche, "la signature de conventions avec certains intervenants extérieurs (éducateurs de jeunes enfants, des bénévoles d’associations spécialisées dans les liens parents-enfants, des visiteurs) doit représenter une priorité pour le service pénitentiaire d’insertion et de probation". J.-M. Delarue rappelle que lorsque le père est également incarcéré, "les deux parents doivent être affectés, sauf volonté contraire, dans le même établissement". 

Promiscuité

Le contrôleur des privations de liberté recommande aussi d'éviter la promiscuité entre les femmes avec enfant et les autres détenues, ce qui implique la création de cours de promenade particulières où "l'on doit limiter la possibilité de surveillance trop intrusive". Ces cours doivent être aménagées "pour les besoins de jeunes enfants (espaces et équipements destinés aux jeux), en limitant la sensation d’enfermement et en favorisant leur appréhension du monde extérieur (espaces verts, vue dégagée, absence de grillage…), et séparées visuellement des autres espaces de promenade".

Par ailleurs, "beaucoup de mères n’ont pas accès au travail en détention" et manquent ainsi de ressources pour acheter à leur enfant "ce qui lui est nécessaire". Le contrôleur des privations de liberté demande que "les critères applicables aux personnes sans ressources soient définis de manière particulière et plus souple et que les aides versées dans l’hypothèse de ressources insuffisantes soient, elles aussi, revues substantiellement à la hausse".

Il recommande enfin la généralisation des unités de vie familiale, dont "l'accès est une priorité pour les mères avec enfants", et la transposition de l’unité mobile qui intervient à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis dans d'autres prisons, "avec le concours des collectivités territoriales concernées". 

par R.G.

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