La morale laïque peut-elle changer notre conception de l'école ? (Journée E & D - Ligue de l'enseignement)
Paru dans Scolaire le lundi 27 mai 2013.
Comment l'école peut-elle amener les élèves à une demande d'autorité légitime ? C'est la question, sans réponse, que pose Joël Roman lors de l'ouverture de la journée organisée par Education & Devenir et la Ligue de l'enseignement ce 24 mai sur le thème "morale, laïcité, éthique à l'école". Le philosophe a ouvert la réflexion en revenant sur la notion même de laïcité, qui désigne à la fois un cadre juridique pour la coexistence de personnes ayant des convictions différentes, et une conception du monde sans référence religieuse, au risque d'apparaître, du fait d'une certaine confusion intellectuelle, comme "anti-religieuse". Il rappelle que la loi de 1905 permet la liberté de conscience, donc ouvre la voie au "pluralisme moral", et qu'elle garantit la liberté des cultes qui n'ont donc pas d'influence sur le droit public, mais ont un droit d'existence dans l'espace public.
Pour Joël Roman, il faut passer de cet espace public, qui, à la limite, est peuplé d'individus conçus comme des entités interchangeables, comme Jürgen Habermas le conçoit, à un espace commun, dans une perspective davantage inspirée d'Hannah Arendt. Les individus y coexistent tels qu'ils sont, ce qui suppose la réciprocité dans l'acceptation de l'autre. Mais l'Ecole est-elle un espace commun ? Cet enseignement laïque de la morale ne pourrait-il constituer un levier pour passer d'une école de la transmission des connaissances, ce qu'elle fait assez bien actuellement, à une école qui valorise les compétences, qui institue les individus. Mais comment faire pour que ces individus soient demandeurs de l'autorité nécessaire à la transmission des connaissances ?