La Cour des comptes prône une affectation des enseignants adaptée aux besoins des élèves
Paru dans Scolaire le mercredi 22 mai 2013.
Mots clés : Cour des comptes, rémunération, temps de services, formation des enseignants,
Le nombre d’enseignants, qui est une variable d’ajustement dans beaucoup de pays, semble en réalité très peu influer sur la performance des élèves, a expliqué ce matin 22 mai Didier Migaud, président de la Cour des comptes en présentant le rapport "Gérer les enseignants autrement". La hausse du nombre d’enseignants n’augmente pas les performances des élèves et leur quantité est rarement mise en cohérence avec le nombre des élèves. Cependant, Didier Migaud se défend de critiquer la politique actuelle du ministre de l’Education nationale et il souligne que les performances des élèves en France se dégradent et que le malaise des enseignants augmente. En rappelant ces éléments de contexte, la Cour des comptes appelle à une profonde évolution du système de gestion des enseignants et non pas à des modifications à la marge des dispositifs.
Le rapport propose une annualisation des temps de services des enseignants du secondaire. "Aux Pays-Bas, les enseignants ont 1 659 heures annuelles dont 750 heures maximum de cours." Cette organisation tient compte des activités hors classe des enseignants. Le recrutement doit davantage s’adapter aux postes et aux besoins différenciés des élèves. "Les élèves n’ont pas les mêmes besoins et les enseignants n’ont pas les mêmes compétences." Or, les règles d’affectation ne répondent pas aux nécessités. Par exemple, le 1er degré dans l’académie de Créteil reçoit moins d’enseignants qu’une académie rurale comme celle de Clermont-Ferrand. Actuellement, les enseignants expérimentés demandent des affectations dans le sud et à Paris. Ces règles ont aussi des conséquences sur l’instabilité des équipes pédagogiques dans le second degré. "Il faudrait organiser des concours régionalisés comme dans le 1er degré."
Formation continue
S’il considère positive la création des ESPE, le président de la Cour des comptes souhaite une amélioration de la formation continue. "Celle-ci ne répond pas aux attentes des enseignants. Elle porte trop sur les disciplines et pas assez sur la pédagogie. Ces modules doivent être reconnus par des qualifications qui permettraient aux enseignants d’exercer dans certains postes." D'ailleurs, ceux-ci n’ont pas de perspectives de carrière hormis la mobilité géographique. "Ils exercent la même fonction toute leur vie, ce qui n’est pas le cas en Allemagne, Canada, Pays-Bas." Le rapport suggère une gestion sur quelques établissements.
Il constate de plus que la rémunération des enseignants du primaire est d’environ 30% inférieure à la moyenne européenne et de 10% inférieure pour les enseignants du secondaire. Mais dans un contexte de redressement des finances publiques, seule une réduction des effectifs permettrait de prendre des mesures salariales, en fonction des postes et non des corps d’origine.
Le rapport propose 3 sources d’économies, à commencer par la rationalisation de la scolarité des lycées, dont le coût est de 31% supérieur à la moyenne européenne pour 3 raisons : un temps d’instruction plus long, un nombre d’élèves par classes plus faible, la multiplication des options. Il propose aussi la bivalence des enseignants, ce qui suppose une adaptation des cursus universitaires. Il ajoute : "Parfois les enseignants n’assurent pas un service complet dans les petits établissements" et il fait valoir des surnombres dans certaines disciplines." L’annualisation des temps de services permettrait notamment de résoudre le problème des remplacements et une gestion plus souple des plannings.
L'exemple de l'Ontario
Le président de la Cour des comptes signale que la province de l'Ontario au Canada a mené une réforme de cette ampleur et a obtenu des résultats, bien meilleurs que ceux de la France selon les enquêtes PISA. Il propose donc "une réforme d’ampleur sur une dizaine d’année" pour modifier en particulier les règles d’affectation des enseignants, augmenter leurs rémunérations, annualiser les temps de services.
L’enquête s’est concentrée sur 5 académies représentant un quart des effectifs nationaux dans des régions caractéristiques variées : Bordeaux, Lille, Limoges, Nantes et Versailles et concerne autant les établissements publics que les établissements privés sous contrat.
Télécharger le rapport sur le site de la Cour des comptes ici