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Internats d'excellence : le plaidoyer pour Montpellier d'A. Giordan et J. Saltet (tribune)

Paru dans Scolaire le jeudi 18 avril 2013.
Mots clés : Giordan, Saltet, excellence, internat, Montpellier

André Giordan (U. de Genève) et Jérôme Saltet, co-fondateur des éditions Play Bac, proposent aux lecteurs de ToutEduc une tribune sur l'internat d'excellence de Montpellier, au moment où la notion même d'internat d'excellence est mise en cause.

Nous sommes depuis trois ans les évaluateurs de l'Internat d'excellence de Montpellier. Notre mission, qui arrive à son terme, était une mission d'évaluation qualitative et surtout formative, devant permettre d'identifier les forces et les faiblesses du projet et de proposer des pistes de remédiation aux problèmes rencontrés. Elle n'est donc pas centrée sur une analyse statistique des résultats des élèves.

Nos observations principales sont les suivantes :

Tout d'abord, il faut tordre le coup à une idée fausse et largement répandue : non, les Internats d'excellence ne dépouillent pas de leurs meilleurs élèves les établissements environnants. A Montpellier, c'est même tout l'inverse qui s'est produit et l'équipe éducative a mis un point d'honneur à recruter les élèves les plus en difficulté parmi les candidats, sous réserve que les familles expriment une motivation suffisante.

D'une manière générale, le terme d' "excellence" mérite d'ailleurs d'être abandonné car il véhicule toutes sortes de fausses représentations qui deviennent vite un handicap. Certains, on vient de le voir, veulent croire qu'il s'agit de l'excellence des jeunes recrutés. Les élèves admis s'imaginent volontiers que l'établissement leur doit l'excellence presque automatique des résultats. D'autres encore pensent que l'excellence académique est l'unique objectif des projets.

Au-delà de cette question sémantique, le bilan de Montpellier est largement positif, même si quelques points méritent d'être repensés ou améliorés. Citons les deux principales difficultés rencontrées : la première rentrée et le personnel "Vie scolaire" :

Le démarrage d'un établissement innovant est un moment clé. A Montpellier, ce démarrage s'est fait dans l'urgence, ne permettant pas un recrutement fin des élèves, obligeant à commencer l'année au milieu des travaux, ne laissant pas le temps d'une formation spécifique des équipes. Pour compenser ce démarrage laborieux, il a fallu que les équipes enseignantes et surtout de direction déploient une énergie formidable, qui n'est ni tenable sur le long terme ni transposable. 

Dans un internat accueillant des élèves difficiles, le rôle des CPE et des assistants d'éducation est très important, et doit sans doute faire l'objet d'un recrutement particulièrement soigné et d'une formation spécifique, notamment en termes d’apports de l’internat lui-même (travail sur la personne, désir d’apprendre, confiance en soi, organisation du travail,..).

Le projet pédagogique

La grande réussite de Montpellier, c'est le projet pédagogique, préalablement pensé, mis en place et évalué pour l’enrichir. Tout d'abord, le seul fait qu'il existe un solide projet est en soi un atout. Ce projet est construit autour de l'idée de l'évaluation positive. Les élèves, lorsqu'ils se sentent prêts, demandent à être évalués. Ils ne reçoivent pas de note, mais une appréciation indiquant si la notion évaluée est acquise ou en cours d'acquisition. Si elle n'est pas acquise, pas de drame, le travail continue et on réévaluera plus tard en travaillant les erreurs ou les obstacles. Ce qui change du tout au tout la relation éducative et évite la stigmatisation. Les résultats sont manifestes, notamment sur le terrain essentiel pour ces jeunes de l'estime de soi et de la confiance en soi. Notons d'ailleurs que ce système, loin d'être laxiste, est en réalité plus exigeant que la notation classique puisqu'un 12/20, qui suffit à avancer dans le système classique, révèle à Montpellier qu'un tiers de la notion reste à acquérir. Cette exigence se retrouve dans l'équipe enseignante, qui ne peut se contenter de transmettre un savoir, mais doit s'assurer à chaque instant que tous les élèves l'acquièrent. Cette évaluation positive s'accompagne d'un raccourcissement des temps de cours traditionnels, au profit des ateliers, destinés à préparer les évaluations, et qui deviennent des temps efficaces d'acquisition autonome accompagnée.

Un autre effet très positif du projet innovant est de faire travailler les enseignants en équipe, notamment autour de projets ou de productions communes. Ceux-ci semblent spécialement motivés, partagent leurs informations, leurs doutes et leurs réussites. Ils ne "mégotent" plus sur le temps passé dans l’établissement, le turn-over habituel a disparu. Une belle dynamique de travail mais également d’autoformation s’est mise en place qui renouvelle les pratiques éducatives : semaine d’intégration, travail sur apprendre à apprendre, bilan hebdomadaire avec deux profs référents, activités "commando" pour préparer les examens, etc..

Au moment où le Ministère souhaite favoriser l’innovation, l’IE de Montpellier peut être un "incubateur" pour innover, évaluer et mutualiser. Il serait dommageable de freiner d’entrée un tel mouvement porteur.

 

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