Archives » Actualité

ToutEduc met à la disposition de tous les internautes certains articles récents, les tribunes, et tous les articles publiés depuis plus d'un an...

Repérer et soigner les dépressions des adolescents, harmoniser les relations entre le scolaire et le médical

Paru dans Scolaire, Périscolaire, Justice le mardi 22 janvier 2013.

"Les jeunes ayant un potentiel dépressif ne se soignent pas." Le diagnostic du docteur Alain Brunot est sévère : les élèves qui présentent des symptômes de dépression clinique seraient trop rarement repérés et souvent mal soignés. C'est ainsi que ce cadre de l'Agence régionale de santé d'Ile-de-France interprète les résultats d'une étude portant sur le bien-être des lycéens, publiée ce lundi 21 janvier, à l'occasion du bilan du dispositif de prévention "Fil'Harmonie", lancé à titre expérimental dans 38 établissements de l'académie de Paris au cours de l'année 2011-2012.

Selon cette étude, près d'un jeune dépressif sur cinq ne reçoit "aucun traitement" et 70% des cas cliniques sont soignés avec "des vitamines et des traitements homéopathiques". Du fait de l'automédication, 60% n'ont recours à aucun professionel de santé, quelle que soit la gravité de leurs symptômes. "Les élèves reconnaissent rarement leurs difficultés de peur d'être stigmatisés", explique Alain Brunot.

Dynamique collective

L'école est un milieu favorable au développement de la dépression juvénile. 7 élèves interrogés sur 10 expriment des préoccupations scolaires et 1 élève sur 2 des difficultés d'ordre psychologique. 7 % peuvent être considérés cliniquement dépressifs. La situation ne devrait pas s'améliorer. Dans un contexte de difficultés économiques où les débouchés se réduisent, "le stress et la crainte de ne pas réussir vont devenir de plus en plus forts", alerte le professeur Jean-Claude Colliard, président de la Fondation santé des étudiants de France (FSEF). Un véritable cercle vicieux risque de s'enclencher, les difficultés scolaires redoublant les souffrances psychologiques. "Dans un système scolaire aussi concurrentiel, il est essentiel de mettre en place des outils pour repérer les difficultés psychologiques des élèves", ajoute-t-il.

C'est dans cette optique que le dispositif "Fil Harmonie" a été mis en place. Afin de remédier aux difficultés ressenties par les enseignants du second degré face au "désengagement scolaire" de certains élèves , ce dispositif invite les personnels éducatifs et médicaux à mettre en commun les informations dont ils disposent.

Pour chaque cas identifié, un référent de l'établissement (proviseur, CPE, enseignant ou médecin scolaire) est mis en relation avec une psychologue et un psychiatre. Les solutions envisagées sont exposées au cours d' une réunion de médiation qui réunit l'élève, la famille, le service éducatif, le service pédagogique, voire des établissements médicaux externes à l'établissement scolaire. Développé à titre expérimental dans 38 établissements de l'Académie de Paris en 2011-2012, "Fil Harmonie" y a été reconduit et pourrait être mis en place dans l'Académie de Créteil.

Le principal atout de ce dispositif réside dans sa dynamique collective. En associant des acteurs au rôle complémentaire, "Fil'Harmonie" leur donne les moyens de "soutenir les élèves perturbé tout en sanctionnant leur comportement perturbateur", selon l'expression du Pr. Dominique Monchablon, psychiatre et chef du projet "Fil Harmonie".

Contre-nature

"Les établissements ont besoin de disposer d'équipes pluridisciplinaires où les fonctions sont bien réparties", souligne  le Dr Jean-Noël Beuzen, psychiatre et directeur général de la fondation Pierre Deniker. "Il faut agir pour améliorer la communication entre le milieu scolaire et le milieu médical", abonde Dr J.-C. Colliard.

Cette réfléxion collective ne fait pas encore partie de la culture des personnels scolaires, pour qui le recours à des aides situées en-dehors du champ éducatif n'est pas naturel. "Il n'y a pas de réflexe professionnel de la part des enseignants, ou des assistantes sociales, de s'adresser à la Fondation de la Santé", témoigne Jean-Claude Colliard. Quant aux CPE, "ils doivent réagir très vite face aux situations de transgression : c'est seulement ensuite qu'ils ont recours aux tiers extérieurs", explique le Dr Monchablon.

Après avoir repéré un problème chez un élève, les professionnels mettent en moyenne 67 jours avant de se mettre en relation avec Fil Harmonie, selon le bilan de l'année expérimentale ; dans plus d'un cas sur deux, il s'agit de la première personne extérieure à qui ils s'adressent pour résoudre le problème.

L'enseignement professionnel, exposé et mal informé

Ces chiffres correspondent à une moyenne. Ils ne reflètent pas "l'extrême diversité des stuations et l'hétérogénéité des établissements" notée par la psychologue Catherine Brébant. Certains sont rodés au repérages des élèves en difficulté, d'autres n'ont pas encore les réflexes nécessaires. En particulier, les lycées techniques et professionnels semblent se mettre plus difficilement en relation avec des acteurs extérieurs.

"La plupart des établissements partenaires font partie de l'enseignement général", reconnaît le dr Monchablon. Il est donc essentiel de mener des missions d'information auprès de ce type d'établissements. "Nos problématiques sont transversales, ce sont des problèmes d'adolescents, et non une question de sections", affirme-t-elle.

Selon le bilan de l'année d'expérimentation du dispositif "Fil Harmonie", "les comportements agressifs se retrouvent à 75 % dans les filières professionnelles". L'anxiété massive y est aussi "plus importante qu'en filière générale".

« Retour


Vous ne connaissez pas ToutEduc ?

Utilisez notre abonnement découverte gratuit et accédez durant 1 mois à toute l'information des professionnels de l'éducation.

Abonnement d'Essai Gratuit →


* Cette offre est sans engagement pour la suite.

S'abonner à ToutEduc

Abonnez-vous pour accéder à l'intégralité des articles et recevoir : La Lettre ToutEduc

Nos formules d'abonnement →