L'enseignement catholique pose la question de son utilité et de son projet
Paru dans Scolaire, Orientation le mardi 02 octobre 2012.
"Comment éduquer au silence" dans une société du bruit, quelles transformations pour l'Ecole quand le maître n'a plus "le monopole du savoir", quand il s'adresse à des élèves "aux références culturelles hétérogènes", comment rétablir du temps long dans un contexte d'instantanéité ? Ce sont quelques unes des questions que se pose l'enseignement catholique. Eric de Labarre, son secrétaire général, entend sortir du "silence", du "vivons heureux, vivons cachés" qui a prévalu ces dernières années et annonce "la première convention de l'enseignement catholique" qui aura lieu les 1er et 2 juin prochain. Mais si l'enseignement catholique pose la question de son utilité dans la société française, républicaine, et compte définir "un état d'esprit partagé", une "identité" commune, s'il n'est pas la "simple juxtaposition d'établissements", peut-il être uniforme alors qu'il est constitué d'entités qui ont chacune leur histoire, qui sont marquées par les congrégations qui les ont fondées ? s'inquiète son entourage interrogé par ToutEduc.
La préparation de cette convention s'inscrit dans le contexte de la rédaction d'un nouveau statut qui sera sans doute publié au mois de mars, à l'heure où l'organisation de l'Education nationale est de plus en plus académique, et où certaines voix s'élèvent pour demander une affirmation plus forte du caractère spécifique de l'enseignement catholique.
Elle s'inscrit aussi dans le contexte de "bonnes relations" avec le ministre et d'une "rentrée infiniment plus paisible" que celle de l'an dernier. "Il était temps de mettre fin à l'application aveugle" du principe de non-remplacement d'un enseignant sur deux, d'autant qu'en 5 ans, l'enseignement privé a rendu 1 283 emplois et gagné 28 500 élèves, dont 4 700 à cette rentrée, essentiellement au niveau collège (+ 7 000), les pertes dans l'enseignement professionnel agricole et dans le premier degré s'expliquant notamment par le passage à 3 ans du bac pro et par la réduction de l'offre pour les - de 3 ans. Sans pouvoir donner un chiffre exact, le SGEC estime à 30 ou 40 000 le nombre des élèves qui n'ont pu être inscrits, faute de place.
Mais apaisée ne veut pas dire sans problèmes, notamment financiers. Si les négociations avec les Départements et les Régions sur les forfaits d'externat se passent plutôt bien, selon l'entourage du secrétaire général, il n'en va pas toujours de même avec les communes. Globalement, il manquerait 200 € par élève. La contribution des familles a été augmentée, en moyenne de 6,9 %, et les responsables font état de la difficulté d'un nombre croissant d'entre elles à s'en acquitter. La FNOGEC (fédération des organismes de gestion) évoque "un phénomène de paupérisation" et de "situation critique" pour "une partie des OGEC", plus de 40 % d'entre eux ayant une capacité d'autofinancement inférieure à 5 % de leurs ressources. Dans ces conditions, préviennent-ils, "nous n'arriverons pas à faire face" à l'obligation de rendre accessibles aux handicapés tous les bâtiments avant 2015.
Autre source inquiétude, personne, même au ministère, ne sait comment ont été répartis les 1 500 postes d'AVS (auxiliaires de vie scolaire) créés par la loi de finances rectificatives. De plus, demande Eric de Labarre, "tous les rectorats savent-ils qu'ils sont ouverts aussi au privé ?" Il serait paradoxal qu'une bonne mesure se retourne contre le Gouvernement, si les parents ont le sentiment que "les moyens annoncés n'arrivent pas".