Elèves handicapés : une caractérisation insuffisante et un suivi défaillant empêchent une bonne application de la loi (Inspection générale)
Paru dans Scolaire, Orientation le dimanche 23 septembre 2012.
La loi sur la scolarisation des enfants handicapés pourra-t-elle constituer "un levier de transformation du système scolaire", de façon que l'école soit "pleinement inclusive", et s'adapte à "tous les élèves qui ont besoin d’un parcours 'différent', à ceux qui vivent dans la précarité, à ceux qui arrivent en France sans avoir jamais été scolarisés, à ceux qui échouent dans les apprentissages fondamentaux" ? C'est la question que pose la mission d'inspection générale dont le rapport sur "La mise en oeuvre de la loi du 11 février 2005 dans l’éducation nationale" vient d'être publié.
Les deux inspections générales relèvent "une adhésion sincère aux principes et aux valeurs qui sous-tendent la loi", et soulignent "l’engagement et le travail remarquable de certaines équipes". Elles estiment que "les prescriptions des maisons départementales des personnes handicapées sont appliquées, y compris pour les attributions d’auxiliaires de vie scolaire". Mais, notent-elles, cette évolution ne s'est pas traduite par une réduction de la population accueillie en milieu spécialisé. Elles se demandent si "le champ du handicap" n'a pas été étendu "vers des élèves qui, jusque là, ne bénéficiaient pas des dispositions liées à cette reconnaissance".
"La mission s'inquiète d'ailleurs de "la fragilité des données disponibles sur les itinéraires réels des élèves identifiés comme handicapés". "Aucun suivi de cohorte (...) à tous les stades de la scolarité, des élèves quittent le système éducatif, entrent et sortent de la situation de 'handicap reconnu' (...) aucune description, aucune quantification de ces flux n’est possible (...) la délimitation même du champ du handicap semblent varier en fonction des pratiques départementales." Les inspecteurs s'interrogent "sur l’utilisation même de l’expression 'élève handicapé' (...) Quoi de commun, du point de vue de l’école, entre un trouble grave des fonctions cognitives, une dyslexie reconnue tardivement et la situation d’un jeune paraplégique très impliqué dans sa scolarité ? Peut-on installer les mêmes concepts, les mêmes dispositifs, les mêmes organisations pour répondre des besoins aussi divers ?"
La définition des PPS (projets personnalisés de scolarisation) est manifestement l'un des points faibles du dispositif. L'inspection générale s'interdit "de porter une appréciation" sur l’activité des MDPH (maisons départementales du handicap) qui sont chargées de son élaboration. Mais "dans un certain nombre de départements, il n’y a pas de PPS (...)". Dans d'autres, les CDAPH (commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées) "statuent sur des centaines de cas (parfois plus de 1 000) en une même séance (...) beaucoup d’équipes enseignantes (...) n’ont reçu aucune information sur les besoins de l’élève (...) beaucoup de notifications d’attribution d’AVS ne comportent aucune justification, aucune définition du rôle attendu de ce personnel." La mission préconise donc d'inverser le processus. L'Education nationale élaborerait un PPS qui serait soumis pour approbation aux CDAPH.
Le rapport sur "la mise en oeuvre de la loi du 11 février 2005 dans l’éducation nationale" est téléchargeable ici.