Le décrochage est révélateur du fonctionnement de l'école (VEI-Diversité)
Paru dans Scolaire, Orientation le vendredi 14 septembre 2012.
"A quoi sert l’école ?" demande Régis Guyon en ouverture d'un numéro spécial de "VEI Diversité", consacré au décrochage, "nouveau nom de l'échec scolaire". Ce phénomène, et l'intérêt nouveau qu'il suscite, posent la question du sens même de l'institution : doit-elle "s’assurer simplement du respect de [l'] obligation scolaire" ? Assurer à tous "la constitution d’une culture commune et d’une citoyenneté partagée" ? Garantir "une insertion sociale et professionnelle" ? Et il ajoute : "La lutte contre le décrochage scolaire ne pourra pas faire l’économie de poser et de repenser, dans l’école à venir, la question des conditions de la réussite pour tous les élèves et donc de la démocratisation de cette école".
Ce numéro de 287 pages propose des articles de tous les chercheurs qui, en France, travaillent sur ce sujet. Voici des réflexions de trois d'entre eux. Pour Dominique Glasman, on peut identifer "des causes ou des facteurs de décrochage, tant du côté de l’école que de la famille ou du groupe des pairs", mais il est "difficile, voire impossible, d’identifier une cause pouvant jouer et l’emporter sur toutes les autres". Il fait remarquer qu'on semble "assez fasciné" par l'échec scolaire et qu'on oublie les réussites. "Il y a des tas d’élèves qui statistiquement n’auraient jamais dû réussir à l’école et qui pourtant déjouent les pronostics" et "qu’il y a des enseignants qui trouvent des formes d’entrée dans les apprentissages tout à fait pertinentes".
Bertrand Geay rappelle que les jeunes "déscolarisés" sont, "dans la quasi-totalité des cas" des jeunes "originaires des classes populaires, et le plus souvent issus de familles socialement marginalisées ou fragilisées". Il relève qu' "aux formes anciennes de médicalisation de l’échec scolaire s’ajoute toute une série de nouveaux dispositifs qui ne peuvent le plus souvent proposer qu’un 'accompagnement' de la sortie d’école, qu’un encadrement de la déscolarisation vers le monde du travail (...) les professionnels ne disposent dans la plupart des cas que d’instruments permettant une
'sortie' légitime du système d’enseignement (...) C’est finalement l’impératif d’une certaine mise en ordre social qui semble s’imposer avant tout."
Pour Gilles Monceau, l'attention qu'on porte à ces élèves "n’est pas sans rapport avec une inquiétude plus générale concernant ce que l’on désigne aujourd’hui par 'violence scolaire' ". Il se demande si "l’emprise de l’institution scolaire sur les individus (...) ne se trouve pas au passage également renforcée. Celle-là est désormais à même d’identifier le devenir de chacun, de l’accompagner, de l’évaluer, de l’orienter (...) Les professionnels peuvent trouver dans ces évolutions (...) des satisfactions qui ne sont peut-être pas totalement étrangères à la puissance nouvelle qu’elles leur confèrent".
Ce numéro est téléchargeable gratuitement sur le site du SCEREN-CNDP, ici.