Emplois d'avenir : les inquiétudes des associations
Paru dans Scolaire, Périscolaire, Orientation le mercredi 05 septembre 2012.
Les associations pourront-elles recruter les "emplois d'avenir" qui vont être créés pour l'essentiel "par des employeurs du secteur non marchand dans des activités ayant une utilité sociale avérée et susceptibles d'offrir des perspectives de recrutement durables (filières vertes et numériques, secteurs social et médico-social, aide à la personne, animation et loisirs, tourisme...)", comme le prévoit le gouvernement ? Nadia Bellaoui, présidente de la CPCA (conférence permanente des coordinations associatives) a des doutes.
Nadia Bellaoui : Si l'objectif est de sortir provisoirement un certain nombre de jeunes des statistiques du chômage, mieux vaut compter sur les entreprises qui sont davantage susceptibles d'employer une main d'oeuvre bon marché. Si au contraire, on vise une insertion durable, il faut que les associations aient les moyens d'assurer leur formation et leur accompagnement.
ToutEduc : Encore faut-il que les associations les recrutent, c'est-à-dire qu'elles aient des tâches à leur confier, alors qu'il s'agit des jeunes les plus éloignés de l'emploi...
Nadia Bellaoui : C'est en effet une question qui se pose dans de nombreux secteurs, quand on sait que de nombreuses associations refusent des bénévoles non qualifiés. Le monde sportif et le secteur sanitaire et social représentent des gisements d'emploi, mais le premier a besoin de compétences, et le second a été terriblement fragilisé. Il faut en effet qu'elles aient des personnels pour encadrer ces jeunes. Or, pour la première fois l'an dernier, elles ont perdu 22 000 emplois.
ToutEduc : Vous présidez la CPCA. Les associations ne sont pas des entités isolées. Ne peuvent-elles pas coordonner leurs moyens ?
Nadia Bellaoui : Vous avez raison. Nous devons trouver des formes de coordination au niveau régional, travailler avec les OPCA [organismes de financement de la formation continue, ndlr], utiliser des financements qui existent déjà, par exemple pour le permis de conduire... Il s'agit de construire ensemble des politiques publiques sur le terrain. Encore faut-il que le texte de loi et ses décrets d'application nous y aident.
ToutEduc : Les emplois-jeunes ont, semble-t-il, souvent permis des insertions durables dans l'emploi. Or le volet formation a souvent été négligé. Pourquoi n'en irait-il pas de même avec les emplois d'avenir ?
Nadia Bellaoui : Je vois deux différences de taille. Les emplois-jeunes étaient prévus pour durer 5 ans, au lieu de trois pour les emplois d'avenir. Et surtout, ils ont accueilli beaucoup de jeunes diplômés, qui ont accepté une forme de déqualification. Le dispositif n'a pas bénéficié aux jeunes les plus éloignés de l'emploi.
A noter que lors de la présentation de ce dispositif, Valérie Fourneyron a prévu "la signature de conventions cadres avec les grands réseaux du secteur sportif et de l'éducation populaire". Pour la ministre ministre des Sports, de la Jeunesse, de l'Éducation populaire et de la Vie associative, les emplois d'avenir devraient principalement cibler les domaines liés au périscolaire. Leur développement est un enjeu majeur de la lutte contre les inégalités. "Les plus grandes inégalités ne sont pas sur le temps scolaire mais sur l'accès aux loisirs et sur le temps libre", explique V. Fourneyron pour qui il ne s'agit pas de gonfler artificiellement les chiffres de l'emploi, mais bien de "mettre en place des emplois pérenne". Michel Sapin a souligné que le Gouvernement travaillerait avec les Régions pour accompagner les associations.
Nadia Bellaoui a signé une tribune dans « Le Monde.fr », à retrouver ici