Archives » Actualité

ToutEduc met à la disposition de tous les internautes certains articles récents, les tribunes, et tous les articles publiés depuis plus d'un an...

Afrique: la faiblesse des systèmes éducatifs menace la croissance du continent

Paru dans Scolaire le mercredi 16 mai 2012.

Actuellement trop fragiles, "les assises du capital humain de l’Afrique ne permettent ni de soutenir une croissance économique dynamique ni d’assurer une prospérité partagée". Le constat du rapport de "l'Africa Progress Panel" sur "l'état de l'Afrique en 2012" est sans appel. Alors que "l’éducation est le moteur de la croissance économique, de l’innovation et de la création", l'Afrique connaît actuellement une double crise dans ce domaine : les inégalités "bloquent les progrès" en matière d'accès à l'éducation et les acquis d'apprentissage souffrent d'un bilan "médiocre".

Les politiques de scolarisation menées par les gouvernements Africains depuis les années 1990 sont un "succès partiel", pour les auteurs du rapport. Le taux d'inscription net, soit la proportion d’enfants en âge d’aller à l’école primaire effectivement inscrits, a considérablement augmenté, passant "de 60 % en 2000 à 76 % en 2009". Pourtant, ces efforts seraient insuffisants pour "assurer l’éducation primaire pour tous" dès 2015 et, ainsi, atteindre l’un des "objectifs du millénaire pour le développement" définis par l’ONU (voir ici). Le rapport rappelle qu'il y a aujourd'hui "30 millions d'enfants déscolarisés en Afrique"; si le rythme de scolarisation suivi entre 2004 et 2009 devait se maintenir, "le continent compterait encore 17 millions d’enfants non scolarisés en 2025".

D'autant que taux de scolarisation ne rend pas compte du "décrochage" des élèves quittant prématurément le système scolaire. L'ampleur du phénomène inquiète les auteurs du rapport. Sur les 173 millions d’africains de 15 à 24 ans, "seule une minorité a fréquenté l’école secondaire, la majorité n’ayant pas achevé le primaire". En 2009, le taux de scolarisation était de 76 % dans le primaire contre 24 % dans le secondaire.

Inéquité, inefficacité

Les progrès de la scolarisation ne sont pas non plus uniformes: la croissance économique du continent a creusé les inégalités. Selon le rapport, "les gouvernements Africains ne parviennent pas à transformer la vague croissante de richesse en opportunités pour leurs citoyens les plus marginalisés". Les zones rurales, les "communautés pastorales" et les familles modestes souffrent d’un taux de scolarisation plus faible. Le rapport pointe en particulier la situation de l'Afrique subsaharienne: "Les enfants et la jeunesse de cette région sont les laissés-pour-compte des nouvelles opportunités." Par ailleurs, les filles représentent toujours "une part anormalement élevée des enfants déscolarisés".

Si les systèmes éducatifs africains sont inéquitables, ils sont surtout inefficaces. D'importantes dépenses publiques en matière d'éducation ont permis d'augmenter le taux de scolarisation, sans pour autant améliorer le niveau des élèves. Selon les auteurs, "les résultats scolaires sont très loin d’atteindre le niveau nécessaire pour débloquer le potentiel de l’éducation en tant que moteur de la croissance, de l’innovation et de la réduction rapide de la pauvreté." En Zambie, 90 % des enfants sont scolarisés mais la moitié n’a pas acquis les compétences alphabétiques de base en sortant du primaire.

Repenser les institutions

Comment remédier à cette situation ? Faut-il modifier les "objectifs du Millénaire", les revoir à la baisse ? Pour les auteurs du rapport, les gouvernements africains doivent confirmer leur engagement de "scolariser tous les enfants d'ici à 2015". Cependant, une fois cette échéance atteinte, il faudrait réviser les objectifs de l'ONU afin qu'ils ne se limitent pas au taux de scolarisation, mais prennent aussi en compte le parcours effectif des élèves. "Les ambitions pour l’après-2015 devraient être l’inscription de tous les enfants à l’école et la maîtrise des acquis fondamentaux en matière d’alphabétisation et de calcul après trois ans de scolarité."

Atteindre ces objectifs impliquerait de recruter de nouveaux professeurs, mieux formés. Les auteurs du rapport estiment qu'il manque actuellement "un million d'enseignants" en Afrique. Ils invitent les gouvernements à concentrer leurs efforts sur les élèves "les plus marginalisés" et certains secteurs spécifiques : "les mesures en direction de la petite enfance comptent ainsi parmi les investissements les plus rentables pour l’éducation."

De telles mesures impliquent de repenser les institutions actuelles, ce qui passe par l'élaboration d’une réfléxion nationale. Les "assises de l'éducation et de la formation" prévues par le gouvernement Sénégalais s’inscrivent dans cette dynamique (voir ToutEduc Sénégal : vers des assises de l'éducation).

Impliquer l'Education Nationale dans l'APD?

Les pays Africains ont aussi besoin de l’appui financier de donateurs étrangers. Leurs promesses tardent à se traduire par des mesures effectives: les pays les plus pauvres "en Afrique et ailleurs" auraient besoin d’une aide financière extérieure "d’environ 16 milliards de dollars par an", alors que le niveau de l’aide stagne à "environ trois milliards de dollars par an."

Pour combler cet écart, le rapport invite les donateurs à "consacrer 10 % de l’aide globale à l’éducation de base dans les pays les plus pauvres." En France, un tel objectif pourrait être atteint en déplaçant "une partie de l’aide actuellement consacrée aux prestataires d’éducation nationaux" vers "le secteur de l’éducation primaire de base".

Le "rapport 2012 sur les progrès en Afrique" est disponible ici.

 

« Retour


Vous ne connaissez pas ToutEduc ?

Utilisez notre abonnement découverte gratuit et accédez durant 1 mois à toute l'information des professionnels de l'éducation.

Abonnement d'Essai Gratuit →


* Cette offre est sans engagement pour la suite.

S'abonner à ToutEduc

Abonnez-vous pour accéder à l'intégralité des articles et recevoir : La Lettre ToutEduc

Nos formules d'abonnement →