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Le CNAJEP invite les candiats à la présidentielle à "garantir aux jeunes des ressources autonomes"

Paru dans Périscolaire, Orientation le lundi 20 février 2012.

"Le quotient familial est un scandale." Ce dispositif n'est pas seulement "inéquitable", il "considère la jeunesse comme un coût, et non comme un investissement". Il reflète l'ambigüité des politiques publiques menées en direction de la jeunesse : "Les politiques d'aide à la jeunesse sont d'abord des politiques d'aide aux familles. Les jeunes sont regardés comme de vieux mineurs et cette stigmatisation doit être combattue." La position de Thierry Pech, directeur de la rédaction du magazine Alternatives Economiques, a fait consensus parmi les intervenants invités par le Cnajep à "reconsidérer la richesse pour mieux agir en direction de la jeunesse". Organisé jeudi 9 février, ce débat s'inscrivait dans la présentation du "Livre Blanc" de cette organisation des "associations de Jeunesse et d'Education populaire", qui cherchent à "construire un nouveau pacte social pour la jeunesse".

Le Livre Blanc préconise ainsi de "garantir aux jeunes des ressources autonomes". Les aides actuellement allouées aux jeunes sont en effet "inadaptées à la réalité de leurs besoins et de leurs attentes". A la suite des économistes Thomas Piketty et Camille Landais, le Cnajep remarque que "le système actuel se fonde sur un versement des transferts directement aux parents des jeunes (allocations familiales, complément familial, quotient familial, etc). Très peu de transferts sont versés directement aux jeunes. » Il faudrait « changer de paradigme » pour permettre aux jeunes de « devenir acteurs de leur propre vie ». Reprenant l'idée du « revenu jeune » de C. Landais et T. Piketty, le Cnajep propose de « refondre les dispositifs d'aide existants (aides au logement, avantages fiscaux, prestations familiales) dans une couverture universelle d'émancipation, valable pour tous les jeunes, mais avec un traitement qui pourra être individualisé ».

Pour T. Pech, cette transformation des politiques publiques est indispensable. Il rappelle que « l'Etat-Providence a été construit à une époque où la jeunesse n'existait pas : elle n'était qu'un seuil, elle est devenue un temps de la vie ». Les aides de l'Etat ont été conçues pour « réparer, et non préparer », ce qui conduit à percevoir la jeunesse comme « un coût, et non un investissement ». L'Etat ne sait pas non plus « faire confiance » aux jeunes, puisque les prestations qui les concernent sont directement transférées aux familles. Pour T. Pech, les propositions du Cnajep font donc dans le bon sens : « toutes les propositions qui transfèrent les prestations des mains des familles vers les jeunes vont dans le sens d'une autonomisation des jeunes. » Le caractère universel de la couverture fiscale souhaitée par le Cnajep est tout aussi "fondamental", selon le philosophe Patrick Viveret. Seule une allocation de ce type permettrait de mettre en place une véritable "politique des temps de vie" qui ne réduirait pas la jeunesse à un seuil.

Prudence politique

Dans le champ politique, la mise en place d'une "couverture universelle d'émancipation" rencontre davantage de réticences. Sans en rejeter l'idée, Thiébaut Weber, représentant de la CFDT, s'est montré plus mesuré lorsque ToutEduc l'a interrogé sur le sujet. "L'idée d'une allocation universelle est envisageable. Cependant, avant d'en arriver à ce stade-là, commençons par garantir aux jeunes qui entrent sur le marché du travail l'accès au RSA." La plupart des candidats de gauche partagent cette prudence, si l'on en croit les interventions de leurs représentants, invités par le Cnajep à discuter les préconisations de son Livre Blanc.

Alors que François Hollande avait évoqué jeudi 26 janvier la création d'une "allocation d'autonomie sous conditions de ressources pour les jeunes en formation", sa représentante, Aurélie Filippetti, a préféré parler de "contrats d'autonomie". Ceux-ci permettraient aux jeunes d'accéder plus facilement au crédit et au logement, grâce à la mise en place de systèmes de "caution solidaire" et "d'encadrement des loyers à la location".

Le Front de gauche et les Verts se sont plus clairement exprimé en faveur d'une allocation. Cependant, ils ne se sont engagés ni sur son montant, ni sur son caractère universel. Danielle Simonet, conseillère de Paris et représentante de Jean-Luc Mélenchon, préconise ainsi la mise en place d'une "allocation d'études et de recherche du premier emploi" pour donner "à tous les jeunes les moyens de se construire de manière autonome". Tout en précisant que sa candidate est favorable à un "revenu d'autonomie pour les jeunes", Karima Delli, membre de l'équipe de campagne d'Eva Joly, a préféré insister sur la question de la formation continue. EELV propose ainsi d'accorder aux travailleurs "un crédit de 8 ans de formation avec revenu assuré", utilisable tout au long de la vie.

Au centre et à droite, l'idée d'une allocation jeunesse universelle rencontre une opposition plus marquée. Pour Jean-François Martins, représentant de François Bayrou, l'idée d'une allocation universelle est "irréaliste". Le candidat centriste ne "proposera pas d'aide généralisée à tous les jeunes parce que la France n'en a pas les moyens", explique le conseiller de Paris. Les efforts doivent avant tout porter sur "l'apprentissage, qui doit être élargi à tous les métiers envisagés et symboliquement adopté par les grandes écoles", précise J-F Martins.

L'UMP s' oppose catégoriquement à la proposition du Cnajep. La majorité sortante "refuse une jeunesse assistée sevrée par une allocation universelle d'autonomie", selon Jonas Haddad, secrétaire national. Il faut davantage mettre l'accent sur la "responsabilisation" des jeunes, ce qui passe par "le développement de l'entrepreneuriat".

Des jeunes "exclus du droit commun"

Par ailleurs, note le représentant de l'UMP, les mesures prises par le gouvernement sont allées dans le sens d'une émancipation des jeunes. L'extension du RSA aux 18-25 ans, ainsi que la possibilité de créer sa propre association dès 16 ans, ont ainsi intégré davantage de jeunes au "droit commun".

Pour le Cnajep, ces mesures, loin de réduire les discriminations à l'égard des jeunes, ont en réalité contribué à les exclure du "droit commun". Le Livre blanc estime que "les conditions d'extension du RSA aux moins de 25 ans - avoir travaillé 2 ans sur les 3 dernières années- semblent avoir été pensées pour ne bénéficier à aucun jeune". De même, le "revenu contractualisé d'autonomie (RCA) n'a été lancé qu'à titre expérimental, pour des montants dérisoires au regard des besoins exprimés par la jeunesse", de 60 à 250 € mensuels.

Quant à la possibilité de créer son association dès 16 ans, elle reste soumise à l'accord parental. Mikaël Garnier-Lavalley, secrétaire général du Cnajep, estime ainsi que "la loi continue de restreindre la liberté associative des mineurs : l'autorisation parentale est obligatoire entre 16 et 18 ans, tandis que les moins de 16 ans n'ont pas la possibilité de créer leur association." Il invite ainsi "le législateur à revenir sur ces dispositions".

Le Livre Blanc du Cnajep est disponible ici.
 

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