L'apprentissage, vecteur d'inégalité ? (collloque international d'Albi)
Paru dans Scolaire, Orientation le mardi 06 décembre 2011.
"L’apprentissage n’apparaît pas comme une véritable alternative au milieu scolaire, mais au contraire, il reproduit les hiérarchies bien plus que l’école." C’est l’une des conclusions du colloque international pluridisciplinaire consacré à "L’apprentissage : vecteur d’insertion et d’égalité des chances ? Ce qu’en disent les chercheurs", qui s’est tenu au Centre universitaire Jean-François Champollion d’Albi (Midi-Pyrénées), jeudi 1er et vendredi 2 décembre.
"Les réformes de l’apprentissage ne peuvent être dissociées d’un désengagement de l’État et d’une dérégulation", estime pour sa part Prisca Kergoat, maître de conférences en sociologie, en clôture du colloque. "Elles ont contribué à segmenter les formations d’apprentis et à dévaloriser les lycées professionnels. Paradoxalement, ces politiques n’atteignent pas leurs objectifs car elles conduisent à valoriser les publics qui en ont le moins besoin."
"La formation professionnelle est un lieu privilégié pour observer la reproduction des normes de genre, car l’apprentissage s’adosse à des pratiques fortement genrées", constate-t-elle par ailleurs.
Parmi les perspectives ouvertes par les intervenants, dans un colloque dont une des organisatrice, Valérie Capdevielle-Mougnibas, a rappelé la dimension "éthique", a figuré la nécessité non seulement de s’intéresser aux politiques et aux publics, mais aussi aux processus de scolarisation mis en œuvre dans les CFA et dans les entreprises, d’éclairer la relation aux tuteurs, ainsi que d’être attentif aux discriminations qui touchent les apprentis des niveaux les plus modestes.
Une évaluation difficile sur le long terme
"Les politiques d’apprentissage contribuent-elles à une conversion de l’apprentissage sur le modèle scolaire ou en font-elle au contraire un lieu d’expérimentation ?"C’est l’une des questions ouvertes en conclusion de ces deux journées. Quant au devenir des apprentis à long terme, les chercheurs ont du mal à évaluer si ce mode de formation permet de s’élever plus facilement dans la hiérarchie, car ils manquent d’éléments sur la promotion dans l’entreprise – par exemple, les ingénieurs formés par l’apprentissage connaissent-ils une promotion plus rapide ?
Les organisateurs ont proposé la constitution d’un réseau de recherche. Les allocutions des conférenciers devraient être prochainement publiées.
Contact : Valérie Capdevielle-Mougnibas (Toulouse-II Le Mirail), ici.